L’impolitesse au bureau est contagieuse mais enrayable

Ingrid Falquy

Dans l’openspace, le simple fait d’être témoin d’irrévérences entre collègues peut nous transformer en gros malpolis . Même à notre insu. Selon des chercheurs, c’est aux entreprises de prévenir la contagion.

« Les comportements négatifs au bureau se répandent comme un simple rhume. » Ils s’attrapent facilement, et chacun peut être porteur, quel que soit son poste. Telles sont les conclusions inquiétantes d’un groupe de chercheurs en sciences comportementales de l’Université de Floride. Leur étude intitulée "les effets de contagion de l’impolitesse" est parue dans l’American Psychological Association en août 2015. Ils ont étudié une large palette de comportements dits irrespectueux, du dédain à l’insulte, au cours de trois expériences.

Répondre au mal par le mal

Ainsi, 90 étudiants ont été suivis pendant sept semaines, alors qu’ils participaient à un cours de négociation. Après chaque exercice en groupe ou en binôme, ils devaient évaluer leurs camarades sur la base d’une trentaine de questions.  « Vous êtes-vous sentis traité avec respect ? » « Votre partenaire a-t-il eu des remarques déplacées ? » « Paraissait-il honnête ? Pourriez-vous travailler avec lui dans une bonne ambiance à l’avenir ? ». Résultat : les cobayes qui ne se sentent pas respectés répondent en montrant les crocs. Pire, ils transfèrent cette attitude sur leurs interlocuteurs.

Une atmosphère anxiogène

Le constat va encore plus loin : il suffit d’être témoin une fois d’échanges houleux pour les trouver de plus en plus normaux.

Ainsi, d’autres cobayes ont dû assister, gênés et impuissants, à l’humiliation publique d’un de leurs camarades en retard (un complice des chercheurs) :

« C’est quoi ça ? Comment pouvez-vous être en retard, c’est quoi votre problème ? On a commencé il y a 15 minutes ! Regardez-vous… Je ne sais pas comment vous pouvez espérer obtenir un travail dans le monde réel en ayant ce type de comportement, mais on a déjà commencé. C’est trop tard pour vous maintenant, partez ». Rien que ça. Après cet épisode, le seuil de tolérance des témoins à l’impolitesse étaient plus élevés, comme l’a montré le test cognitif qui a suivi. Un vrai cercle vicieux.

Une reproduction inconsciente

Les gros problèmes naissent souvent de petits incidents. D’où la recommandation, frappée au coin du bon sens, des chercheurs : « Les organisations devraient faire plus attention aux comportements négatifs au travail  qui ne paraissent à première vue pas trop importants ou critiques ». , D’autres études ont déjà montré que les discourtoisies ont des conséquences désastreuses sur la créativité, l’entraide, les émotions et la performance*. Alors, puisque la contagion est inconsciente, il est suggéré de forcer un peu le destin, en veillant à ce que la communication soit toujours claire et sans ambiguïtés car, de petits mots en petites phrases, on peut vite en arriver sans le vouloir à un openspace totalement anxiogène.

 

* Porath & Erez, 2007, 2009

Ingrid Falquy
Ingrid Falquy

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