Quelles sont ces entreprises qui respectent la loi handicap ?

Sylvie Laidet-Ratier

3,1 % ! Voilà le taux d’emploi des personnes handicapées actuellement dans le secteur privé en France. Soit à peine plus de la moitié du minimum légal (6 %) imposé aux établissements de 20 salariés et plus. Ce chiffre cache évidemment de fortes disparités entre d’un côté les entreprises "handi-accueillantes" et de l’autre les sociétés dites à quota zéro, celles n’ayant pas bougé le moindre petit doigt en faveur de l’intégration des personnes en situation de handicap. Mais regardons le verre à moitié plein en zoomant sur trois entreprises qui respectent cette fameuse loi handicap de 2005.
Quelles sont ces entreprises qui respectent la loi handicap ?

1-Casino : une politique globale et durable

Taux d’emploi des personnes handicapées : 13 %

20 ans ! Le groupe Casino vient de signer la Charte du réseau mondial "Entreprise et handicap" de l’Organisation Internationale du Travail célébrant ainsi 20 ans d’engagement pour l’emploi des personnes handicapées. Et visiblement le groupe de distribution a trouvé la bonne recette puisqu’il compte 13 % de travailleurs handicapés, soit plus du double de l’obligation légale. Ce chiffre est notamment atteint grâce aux accords handicap successifs. Le dernier en date (oct. 2014), le 6ᵉ, pour la période 2014-2016 prévoit le recrutement de 100 personnes handicapées dont au moins 10 % de moins de 30 ans. Le texte signé par trois organisations syndicales représentatives renforce le développement de l’alternance et le recrutement de 160 stagiaires. Un système de parrainage a également été mis en place pour accompagner les nouvelles recrues et les collaborateurs handicapés orientés vers un nouveau métier. Côté maintien dans l’emploi, un module d’e-learning sera mis à disposition pour favoriser la reprise d’activité des salariés en situation de handicap. « Une expérimentation dans le département de la Loire sera menée en partenariat avec un réseau d’entreprises pour favoriser des passerelles vers des métiers compatibles », précise-t-on chez Casino. Autre innovation, cette fois concernant le renforcement de la politique en faveur des collaborateurs-aidants familiaux : la taxe d’apprentissage va être attribuée aux écoles fréquentées par les enfants handicapés des collaborateurs.

 

 

2-Elior : bouchée double sur le maintien dans l’emploi

Taux d’emploi des personnes handicapées : 6,5 %. 

« Et en mars 2016, ce chiffre devrait encore progresser », annonce d’ores et déjà Christelle Room, responsable diversité du groupe Elior.  Sur ce taux, 6,37 % concernent l’emploi direct de personnes en situation de handicap. Pour en arriver là, ce spécialiste de la restauration collective capitalise sur une politique handicap active depuis 2007 notamment en termes de recrutement. « Nous embauchons des personnes en situation de handicap non pas pour répondre à l’obligation d’emploi, mais parce que nos recrutements sont ouverts à tous. Au total, nous comptons 1030 personnes en situation de handicap sur les sites assujettis à l’obligation d’emploi. En 2014, 129 ont été recrutées essentiellement en CDI et parfois à temps partiel », insiste-t-elle. Depuis juin dernier, le groupe met les bouchées doubles sur le maintien dans l’emploi notamment via une convention extraordinaire signée sur le sujet avec l’Agefiph. Objectif : réduire les risques d’inaptitude et faire progresser l’employabilité de ses collaborateurs. « Pour cela, nous respectons l’équité de traitement dans l’accès aux formations entre les travailleurs handicapés et les personnes valides. En effet, dans nos métiers du geste, plus un collaborateur est formé, moins il court le risque de désinsertion professionnelle après une absence maladie», détaille-t-elle. Elior va également mettre en place un outil permettant d’alerter les managers sur les absences. « 90 jours d’absence serait par exemple un seuil d’alerte à partir duquel le manager devrait engager des démarches en faveur du maintien dans l’emploi », illustre Christelle Room. Elior met aussi un point d’honneur à diffuser le handicap à tous les niveaux de conception de ses produits et services. « Une grande assiette c’est joli mais cela peut parfois être trop lourd. Nos services marketing et innovation vont suivre des formations à l’ergonomie afin d’anticiper et de prévenir les problématiques de santé au travail », renchérit-elle. Les clients (entreprises et collectivités) de ce gros prestataire de services sont également mis à contribution dans le cadre du renforcement du maintien dans l’emploi. Certains financent partiellement des aménagements matériels. « Ce qui sert aux personnes handicapés est aussi utile aux personnes valides. C’est ça la prévention », conclut-elle.

 

3-Renault : les big boss retroussent leurs manches

Taux d’emploi des personnes handicapées : 7,8%

Engagé depuis 20 ans sur l’intégration des personnes handicapées, le constructeur automobile français n’est pas peu fier de son taux d’emploi supérieur à l’obligation légale. Et ce, alors même que les embauches en CDI ont été gelées ces dernières années. Ce n’est donc pas grâce au recrutement que Renault assure sur le sujet. Non, la firme au losange mise davantage sur le maintien dans l’emploi et le changement de posture de ses collaborateurs et dirigeants. « Évidemment, nous accompagnons nos salariés dans leur démarche de reconnaissance de qualité de travailleur handicapé (RQTH), mais nous avons également élargi les bénéficiaires des mesures au conjoint des personnes handicapées et aux parents d’enfants handicapés. On créé de la confiance sur le sujet, les gens se déclarent ainsi d’eux-mêmes. Et nous les aidons financièrement au quotidien pour l’aménagement de leur logement et bien sûr l’aménagement des postes de travail », illustre Bénédicte Vivent, responsable mission handicap de Renault. L’exemple doit aussi venir d’en haut. Elle réunit ainsi 4 fois par an un comité de gouvernance composé de 6 dirigeants du comité exécutif groupe. À l’ordre du jour : le handicap, le handicap et le handicap. « On a élargi cette pratique autour de déjeuner rassemblant des membres de ce comité et des travailleurs handicapés. Ce sont d’excellents lieux d’échange et de débat », assure-t-elle. Le réseau social interne Handi@Renault mais aussi les formations handicap visant les managers volontaires favorisent également les échanges positifs sur le sujet et permettent de démystifier le sujet. Lorsque des alternants handicapés postulent en ligne, Bénédicte Vivent, leurs conseille de lui adresser un mail précisant le numéro de l’offre visée. « Dans un premier temps, j’appelle les candidats à l’alternance pour bien comprendre leurs besoins afin de les aiguiller sur les meilleures offres possibles. Ensuite, je m’occupe de connaître leurs besoins en termes de compensation du handicap. Une fois les bons candidats identifiés pour les bons postes, je me charge de valoriser leurs candidatures auprès des tuteurs potentiels », détaille-t-elle. À ce jour, elle n’a essuyé aucun refus.

 

 

Sylvie Laidet-Ratier
Sylvie Laidet-Ratier

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.

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