Restructurations en cours
Jacques Feytis, contrôleur général des Armées, dirige les ressources humaines du ministère de la Défense depuis juillet 2012. Sa principale mission : restructurer c'est-à-dire réduire les effectifs tout en réorganisant pour éviter toute vacance de postes et surtout préserver les compétences vitales à l’armée française. Une « manœuvre RH » que lui a directement confiée le ministre Jean-Yves Le Drian après le vote de la deuxième loi de programmation militaire de décembre dernier, elle-même précédée de la parution d'un "Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale" remis au président de la République le 29 avril 2013. Elle doit conduire à supprimer 34 000 postes d’ici 6 ans, pour ne garder que 242 000 militaires et civils. Des coupes qui devraient préserver les forces opérationnelles « même si elles devront faire aussi bien, avec 10 000 postes de moins ». Sa tâche est d’accompagner la transformation des armées, avec moins d’hommes et plus de matériel sophistiqué. « La puissance de feu d’un Rafale représente trois fois celle d’un Mirage 2000. » Donc moins de pilotes et de mécaniciens de maintenance. Sur les opérations extérieures aussi, les troupes s’amenuisent. « Moins de 2000 militaires tiennent le Mali qui est plus grand que la France. » Evidemment, cette réduction d’effectifs ne va pas de soi. La cravate Feytis a fort à faire avec les galons en place, les chefs d’état-major qui veulent conserver leurs effectifs. « Il n’y a pas de bras de fer, mais des discussions », tempère le DRH. D’autant que les réductions en question doivent également toucher les cadres. « Chaque année, nous devons inciter 1000 officiers à quitter l’Armée. »
15 000 recrutements chaque année
Des manœuvres qui n’empêchent pas la Défense de recruter, chaque année aussi. Car les hommes et les femmes de troupe doivent être jeunes. « Ils restent cinq ou six ans en moyenne ». Alors l’Armée en embauche 15 000 nouveaux par an. Est-ce plus facile de les attirer quand le chômage sévit ? « Ils ne viennent pas de guerre lasse à cause du chômage, nous les attirons parce que nous sommes un premier employeur qui forme, qui emploie et qui reconvertit. » Même si l’Armée n’a pas sur tous les postes les moyens de sa sélection. « Nous avons un tout petit peu plus d’un candidat pour un poste d’opérateur mais huit pour un poste de gradé. »
Pour en finir avec Louvois
Le rôle du DRH au ministère de la Défense c’est aussi de faire en sorte que les personnels soient payés en temps et en heure. Ce qui n’était pas le cas avec le désastreux système Louvois de paiement de soldes des militaires, qui depuis son entrée en fonction en 2011 a connu des dysfonctionnements, au point de plonger 160 000 familles de militaires dans de graves difficultés financières. Officiellement abandonné en décembre dernier, il ne sera néanmoins remplacé que « fin 2016, début 2017 », le temps de concevoir le nouveau système. Un groupement de trois industriels, dont l’anonymat est juridiquement protégé, y travaille. « Nous ne voulons plus prendre de risques avec la paie de nos militaires. » Il sera déployé quand « tout sera impeccable. A la différence de Louvois, nous prévoyons de longs mois de tests du produit. »
Propos recueillis par Sylvia Di Pasquale dans le cadre d’une interview video réalisée pour Cadremploi.fr et Le Figaro Economie.
Photo : François Bouchon © Le Figaro
Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.