Bénévolat, une arme à double tranchant sur un CV

Sylvia Di Pasquale

Vos déboires autour de la fameuse rubrique « loisirs » du CV, nous les évoquions ici il y a une petite quinzaine. Vous avez réagi, commenté, approuvé ou rejeté. Certains d'entre vous ont témoigné plus directement, pour nous expliquer que pour faire fuir un recruteur, il y a pire que le classique triptyque « cinéma, lecture, voyage ». Il y a le bénévolat.

 

A vous croire, ce temps offert sans but lucratif n'a pas la même valeur selon que l'on est candidat ou recruteur.

 

Mais quelques expériences ne font pas une tendance. Alors on a cherché, vérifié et trouvé. Sept centres de recherche en économie et sociologie, regroupés sous le drapeau de la Fédération TEPP (Travail, emploi et politiques publiques), se sont penchés sur cette question au début de cette année. Les chercheurs ont réalisé de faux dossiers de candidature de jeunes diplômés de l'informatique et des métiers de la banque assurance. Certains de ces chercheurs d'emploi pour de rire avaient inscrit sur leur CV des activités bénévoles, d'autres non. Devinez quel groupe a recueilli le plus d'entretiens ? Les non-bénévoles.

 

Conclusion des chercheurs ? « Il est possible que l'employeur anticipe une plus faible disponibilité du fait de l'engagement bénévole. » Certains pros des RH considéreraient donc cet investissement chronophage et susceptible d'empiéter sur le job pour lequel le candidat postule et veut être payé. Certes, de tels débordements existent. Un amateur d'ornithologie peut passer ses nuits à observer le bruant des plaines en pleine ponte, et revenir lessivé au boulot le lendemain.

 

Mais cet a priori ne date-t-il pas d'un autre siècle ? Du temps où l'on se donnait corps et âmes à l'entreprise, une et unique, de sa sortie d'école jusqu'à la retraite ? C'est fini, messieurs dames, les générations montantes ne veulent plus de ces diktats. 29 % des 15-24 ans pratiquent une activité bénévole. Et pour 80 % d'entre eux, ce type d'action est même « un atout dans leur CV », qui « permet d'acquérir des compétences » pour 72% de ces jeunes, selon une autre étude signée France bénévolat. Leurs aînés, les 25-34 ans, ne sont pas en reste puisque 25% de cette tranche d'âge pratique toujours l'action désintéressée. Et ce sont rarement les plus fainéants. Pour eux, avoir une passion autre que le bureau, et même deux jobs, n'est plus tabou. En avoir un seul, augmenté d'activités sans but lucratif encore moins. Sport, solidarité, culture, peu importe la thématique qui les emballe. Ils y sont (forcément) sensibilisés au collectif et à l'intérêt général. Autant de choses que les DRH recherchent, allant jusqu'à nourrir (grassement) des agences événementielles pour concocter des team buildings (de folie), pour retrouver un peu de ce spirit (perdu).

 

Participer à des actions collectives peut être bénéfique, et pas seulement à titre personnel. On le sait, certaines activités sportives servent de réseaux, y compris professionnels. Et pas seulement le golf. Certaines activités politiques également. Et peu importent leurs couleurs. Et il y a toutes les associations professionnelles. Il est d'ailleurs tout à fait possible que, parmi les DRH qui se méfient des bénévoles, l'on trouve des membres de l'ANDRH (Association nationale des directeurs des ressources humaines). Des bénévoles, donc.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr - 14 novembre 2011

 

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Dessin de Charles Monnier © Cadremploi.fr

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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