Chômeurs, tous des tire-au-flanc ?

Sylvia Di Pasquale

Le joli raccourci que voici. Un chômeur sur cinq ne cherche pas d’emploi. Résultat : 20 % des inscrits à Pôle emploi sont des tire-au-flanc. CQFD. « Ah mais non, pas du tout, on n’a jamais dit ça », s’offusquent les politiques, les boss de l’ex-Assedic et le chœur des médiatiques. Mais leurs précautions sont vaines et seul surnage ce taux : 20 %.

Pourtant, chacun a saisi ses pincettes du bout des doigts. Les auteurs de ce rapport d’étape comme Les Echos qui l’ont publié cette semaine : ce taux de chômeurs qui « n’ont pas fait d’actes positifs et répétés de recherche d’emploi » a été constaté dans exactement 2 agences, à Toulon et à Manosque. Deux agences seulement alors que la France en compte 956. En plus, seuls 6,7 % des chômeurs inscrits dans les agences incriminées ont été finalement sanctionnés. Pour la représentativité des fameux 20 %, on repassera.

Il n’en reste pas moins que cette info, avec l’amalgame qu’elle crée forcément, déboule en plein débat sur la réforme des indemnités chômage et la volonté d’intensifier les contrôles des chercheurs d’emploi. Quand une institution comme l’Unédic est en déficit de 4 milliards, il est totalement légitime de s’interroger sur les moyens d’enrayer la machine à perdre. Comme il est légitime de contrôler les chercheurs d’emploi, de vérifier qu’ils recherchent bien un emploi et d’éviter les abus.

Mais est-il vraiment nécessaire d’argumenter cette volonté avec un rapport d’étape qui n’est représentatif que de la volonté de certains ? Une volonté de rechercher des coupables annexes quand c’est l’institution Pôle emploi toute entière qui est en cause, qui ne sert que de chambre d’enregistrement pour constater la (mauvaise) situation des sans-emploi. Qui se contente (le cas échéant) de les indemniser. Et qui n’a pas les moyens d’effectuer, pour un nombre de chercheurs d’emploi croissant, la mission pour laquelle elle a été créée : gérer industriellement la mise en relation d’entreprises qui recherchent des candidats, avec ceux qui recherchent un emploi. 

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr

Illustration © Charles Monnier

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

Vous aimerez aussi :