Le bien-être au travail une arnaque ? Vraiment ?

Sylvia Di Pasquale

Le bien-être au travail une arnaque ? Vraiment ?

Ainsi donc, le bien-être au travail serait une fieffée arnaque, issue d’un « courant pseudo humaniste très puissant » (et par là-même néfaste). C’est du moins la thèse défendue dans le quotidien suisse Le Temps, par Maxime Morand, conseiller en leadership et ancien responsable RH de groupes bancaires. Passons sur le côté éminemment provoc du cocktail Molotov lancé par le coach, dont la boîte s’appelle fort pertinemment Provoc-Actions, pour nous pencher sur cette quête du bonheur au boulot.

Certes la chose est à la mode comme jamais, ce qui, a priori, nous ferait pencher pour les thèses du sieur Morand par simple réticence pour les tendances passagères. Mais en épluchant l’un de ses premiers arguments, utilisés pour dessouder le fameux bien-être, on tique. Car il avance que « depuis que nous parlons de bonheur au travail, la souffrance et le burn-out n’ont jamais été autant au rendez-vous ». Une bien curieuse manière d’inverser les choses. Un peu comme si le fait de mettre en avant les accidents de la route dans les médias les avaient fait augmenter. Alors que c’est précisément le contraire qui se produit.

Le burn-out (ou surmenage), la souffrance et même le bore-out (placard) ne datent pas de la mode récente du développement personnel patchoulisant. Ils ont non seulement toujours existé, mais constituaient la norme jusqu’à notre époque moderne. Et le fait d’en parler, même beaucoup, est une manière de prendre en compte le phénomène, et de lutter contre.

Puis le coach nous met en garde. Attention : il ne faut surtout pas passer du travail « tripalium » (au sens d’instrument de torture) au bien-être qui semble – je traduis –  transformer l’entreprise en yourte pour décroissants à dreadlocks en sarouel ultra-cools. Une manière de considérer les organisations d’entreprise incapables de mesure et de juste milieu.

 

Mais peut-être que Maxime Morand devrait considérer que les salariés ne sont pas dupes. Que le bien-être au travail n’est qu’un deal passé entre employeurs et employés, un contrat tacite établi par l’entreprise qui précise sans le stipuler noir sur blanc que « banco, je te facilite la vie au boulot, tu bosses bien et plutôt beaucoup et comme tu te sens bien au bureau, tu n’iras pas chercher ailleurs et faire exploser mon turnover ». Les secteurs en tension, comme l’informatique, qui peinent à recruter, et à conserver les bons éléments, semblent avoir parfaitement intégré cette donne.

@Syl_DiPasquale © Cadremploi

Dessin de Charles Monnier

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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