Savoir partir

Sylvia Di Pasquale

Savoir partir

Le départ de Claire Chazal des JT de fin de semaine sur TF1 va peut-être au-delà des simples vicissitudes du microcosme médiatique. Il suffit pour s’en convaincre d’éteindre les projecteurs, d’enlever le vernis et d’oublier les couvertures de Paris Match. Que reste-t-il ? Une femme cadre de 59 ans, évincée au bout de 24 ans de bons et loyaux services, d’une manière plutôt expéditive. Une histoire de tous les jours, une épée de Damoclès pointée sur nombre de seniors dans nombre d’entreprises, femme comme homme, au nom du besoin de sang neuf, de rajeunissement, de changement d’image ou d’économies salariales.

Évidemment, ses émoluments passés, actuels et à venir, qu'elle choisisse ou pas de quitter TF1, lui permettront sans trop de soucis de voir arriver son tiers provisionnel de cette année et de toutes les suivantes. Bien sûr son image lisse et aseptisée peut susciter des moqueries.

Néanmoins, l’émoi causé par son éviction mérite d’être grattouillé.

Car au-delà d’une people surmédiatisée, c’est peut-être un peu d’eux-mêmes que ses défenseurs ont vu pour la dernière fois à l’écran hier soir. Surtout si ce sont des seniors, cadres, jugés has-been par une direction qui estime qu’ils/elles coûtent trop cher, qu’un/qu’une plus jeune ferait parfaitement l’affaire. Des hommes et des femmes qui projettent dans Claire Chazal leur angoisse de l’éviction.

Et puis, il y a les autres, ceux qui considèrent qu’elle a fait son temps. Un reproche que notre société brandit souvent aux responsables qui s’attardent sur leur zone de confort. Savoir partir à temps, surtout quand on occupe des postes exposés, est une discipline trop peu pratiquée. Pas forcément pour laisser la place aux jeunes, mais pour soi-même, passer à autre chose, continuer à apprendre et à se renouveler. « La vie commence où s’arrête notre zone de confort », résume un mantra. Rester trop longtemps, c’est vivre le risque de se prendre un gros coup à la dignité le jour où le vent tourne. La dame du 20 heures le savait, elle qui déclarait il y a peu « Je redoute le moment où cette façon d’exercer mon métier va s’arrêter ».

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi

Illustration de Charles Monnier

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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