Surmenage, harcèlement moral, suicides : nous sommes tous concernés

Sébastien Tranchant

Quand on travaille entre 10 et 12 heures par jour sous pression, il n'est pas rare que tout se dérègle. Le mal-être au boulot, on en parle de plus en plus mais souvent à demi-mots. Pour Dominique Huez, médecin du travail, le travail serait à l'origine de 3 000 suicides par an. Inquiétant.

Au Royaume-Uni, on parle de « burn out » et au Japon de « karoshi ». Alors que dans d'autres pays on reconnaît le phénomène d' « autodestruction par le travail », en France la gêne est palpable quand on évoque le sujet. Pourtant, régulièrement, cette question de la mort au travail revient à la Une de l'actualité. Quand le constructeur Renault a été confronté à partir d'octobre 2007 a une vague de suicides dans son Technocentre de Guyancourt (Yvelines), une fois de plus, ces faits divers en série faisaient les gros titres. Or, c'est tous les jours qu'on souffre au travail, comme l'expliquait dès 1998 Marie-France Hirigoyen dans son livre remarqué « Le harcèlement moral : la violence perverse au quotidien », vendu depuis à 450 000 exemplaires.


Les politiques trop frileux


En mars dernier, deux scientifiques, Philippe Nasse et Patrick Légeron, ont remis au ministre Xavier Bertrand un rapport sur le sujet. Un travail à « l'approche encore trop restrictive, le rapport estimant que 'suicide au travail ne veut pas dire systématiquement suicide lié au travail', écrivait à l'époque le journal Le Monde. Or les spécialistes savent que le lieu où l'on se donne la mort n'est jamais anodin. »


3000 morts par an

Dans un livre publié récemment aux Editions Privé, Dominique Huez, médecin du travail depuis 25 ans à la centrale nucléaire de Chinon, revient sur ce sujet de la souffrance au boulot. « J'estime que le travail est un élément déclencheur dans 25 à 50 % des cas de suicides. Ce qui m'amène à penser que le travail ferait directement ou indirectement 3000 morts par an », déclare-t-il. La faute « à une rigidification de l'organisation du travail et à un management du zéro défaut pour lequel seul les résultats comptent », selon le médecin.


Les cadres se suicident moins

A ce jour, toutes les études réalisées sur le sujet arrivent peu ou prou à la même conclusion : si le suicide touche toutes les catégories de travailleurs, les ouvriers et employés se donnent près de trois fois plus la mort que les cadres.

Sébastien Tranchant
Sébastien Tranchant

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