Episode 16 : Coach en formation

Le DRHache

Les coachs aussi ont le droit de se former. Le DRHache s'est glissé dans une conférence destinée à des coachs et futurs coachs. A sa manière, il nous éclaire sur « ce métier qui aimerait en être un ».

La luminosité post-soviétique de la salle trop éclairée donne au début de la conférence un ton artificiel et guindé. Les trois femmes qui sont derrière les micros assises à une table sont un peu rigides, on aurait d'entrée envie de leur suggérer une petite séance sur le thème « prendre la parole en public ».

 

Nous sommes à une conférence sur le coaching, ce métier qui aimerait bien en être un.

 

La conférencière a écrit un livre qu'elle va nous présenter pendant une heure, se bornant globalement à en lire des passages et citer ses sources, recommander une dizaine d'autres auteurs dont la moitié sont dans la salle, parler de la souffrance, du moi, de l'autre et de la mère entreprise castratrice.

 

Ça cause syntagme et recension.

 

« Vous comprenez quand le travail fait symptôme, on peut se demander si cela tendrait à optimiser les relations car tendanciellement, on assiste à une déprotection, une clôture de soi à soi intrinsèque à l'emprise de l'organisation, c'est la norme hystérique bien sûr, l'idéal pervers qui pousse nos cadres à s'autostroker dans le dispositif transférentiel. »

 

A peine exagéré.

 

On comprend assez vite que toutes ces lectrices de Télérama, tous ces messieurs en costumes à velours côtelé marron avec d'épaisses lunettes noires et les cheveux en bataille sont en fait des psy de formation, avec la couche de beurre psychanalytique sur la tartine et dans le meilleur des cas un peu de confiture lacanienne. Ces indépendants préfèrent travailler en entreprise mais n'ont pas envie de rentrer dans les départements de DRH. Ils ont passé les cinq dernières années et la moitié de la conférence d'aujourd'hui à tenter désespérément de se créer un sentiment identitaire, une raison sociale (sociétale...) une AOC, le COACHING.

 

Une fois dépassé l'agacement provoqué par la mélasse complaisante du vocabulaire abscons - comme lorsqu'on va voir un film en VO sans les sous-titres -, on finit par rentrer dans l'histoire et comprendre à moitié ce qui est à un tiers signifié.

 

On est aux aguets d'une surprotection de l'individu contre l'entreprise, mais l'on constate avec plaisir que l'on a affaire à des gens intelligents qui vont savoir éviter ce piège. Un des messages qu'ils passent, c'est que l'on est responsable de son époque, et que dénoncer la souffrance avant qu'elle ne devienne intolérable c'est bien, mais qu'il faut aussi apprendre à l'accepter un peu, et que l'on a un peu tendance à confondre contrainte et souffrance.

 

On retient des idées intéressantes, des paradigmes comme ils disent.

Celui du jour, pour ce que j'en ai compris :

 

On parle beaucoup de souffrance en entreprise, ça vend bien et ça permet à l'individu de se regarder le nombril. Tentons une explication de cette souffrance :

 

L'époque est à la jouissance. Quand Freud à commencé à sévir, l'époque était à la frustration et au refoulement collectif, mais entre révolution libertaire et droits accrus de l'individu, on a pris un pli jouissif. On doit adorer son boulot. On doit s'épanouir. On doit s'éclater mûrir éclore s'éclairer se réaliser se dérider prospérer ON DOIT JOUIR.

 

Bien bien bien.

 

Mais on veut aussi être reconnu, et c'est là que le bât blesse. On veut être loué, valorisé, distingué, renommé, indiscuté.

 

La jouissance est une notion personnelle, et la reconnaissance implique plus de collectif.

 

Et les deux sont juste assez inconciliables, nous sommes en fait en contradiction permanente.

 

ET SURTOUT

 

Nous sommes responsables de notre époque.

 

 

 

 

Le DRHache
Le DRHache

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