Episode 4 : Valentine

Le DRHache

Cette semaine, le DRHache observe une secrétaire qui « n'obéit pas au proverbe « sois polie si tu n'es pas jolie » ». La 4e chronique du héraut de l'entreprise vache dévoile une fois de plus l'entreprise telle qu'on ne veut pas la voir.

Georgia est américaine. Future cadre dirigeant de la banque, mariée et mère de trois enfants, elle est impatriée en France pour douze mois et la banque lui fournit un appartement.

Georgia est habituée à un certain standing. A New-York, elle vit dans un loft. Son mari possède  une salle de gym afin de parfaire la sculpture de ses épaules, qu'il promène nonchalamment lors du séminaire de management du groupe auquel il s'est invité, on ne sait pas très bien comment, mais personne n'ose rien dire. Vous comprenez, ils sont américains.

Ils sont américains alors on va les soigner un peu, c'est juste pour douze mois. « Valentine, pouvez-vous regarder ce que nous avons comme appartement  disponible dans le quartier, une belle HSP pour une famille de 5 ? »

Comme d'habitude, le management de l'institution va porter au pinacle les inconnus parachutés. Nul n'est prophète en son pays mais à 5000 kilomètres on est forcément un peu un génie sinon on ne vous aurait pas envoyé là.

On pourra toujours vous dégommer longtemps après que vous soyez repartis.

Bon, Valentine s'en occupe.

Valentine  réunit beaucoup de défauts et n'obéit pas au proverbe « sois polie si tu n'es pas jolie » puisqu'elle est d'une agressivité et d'une aigreur exceptionnelles. Mais elle a fait de belles études.

On l'a collé dans ce job où elle est totalement sous-employée «  juste pour voir ce qu'elle vaut », « qu'elle se blanchisse un peu sous le harnais ». Si on poussait un peu, on finirait par entendre suinter des murs de l'institution  « une bonne guerre, voila ce qu'il leur faudrait ».

Valentine a donc toutes les raisons d'être frustrée. Et ça marche bien. Elle sait déployer instinctivement des trésors d'antimarketing et de fausses bonnes idées qui nivellent tout ce qu'elle touche par le bas.

Valentine va s'assurer que Georgia ne soit pas trop bien traitée, mais elle va le faire avec talent puisqu'elle est responsable du dossier et qu'elle compte sur le fait que personne n'ira jamais vérifier quoi que ce soit.

A travers les poils de sa moustache, elle présente à Georgia les conditions d'arrivée à Paris. L'appartement est fourni avec l'électroménager : une machine à laver et un sèche-linge.

Georgia est bien contente : en bonne Américaine, elle pensait que tous les appartements n'avaient pas l'électricité à Paris. Elle arrive donc chez elle, fait le tour, trouve bien la machine à laver au milieu des cafards, mais pas le sèche-linge.

Embarrassée, elle demande le lendemain à Valentine. Réponse, dans le texte :

«  Le sèche-linge est  une grille en plastic blanc et se déplie, c'est très pratique  pour suspendre ses chaussettes ».

En effet, nous n'avons pas l'électricité. C'est en tout cas ce que Georgia va raconter à ses copines de retour à New-York. Même pas en fait, elle va parler de «  différences culturelles » en clignant discrètement de l'œil.

 

Les diplômes c'est bien, mais les voyages forment la jeunesse. Les anglo-saxons prennent souvent un an à la fin de leur cursus universitaire pour partir en voyage à petit budget, apprendre à survivre  et s'ouvrir l'esprit. Chez nous, on pousse les enfants à sauter des classes et à commencer à bosser le plus tôt possible pour payer la retraite de papy et ne pas faire grossir les chiffres du chômage.

Mais parfois on aimerait bien que les diplômes soient  fournis avec les vaccins et le passeport pour passer le périphérique extérieur.

 

 

 

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