Episode 7 : Je n'irai pas googliser vos profils

Le DRHache

Les recruteurs doivent-ils céder à la tentation de fouiner dans la vie privée des candidats ? « C'est tentant, il faut bien le reconnaître. » Surtout que, bien souvent, les indices sont semés sur le Net par les candidats eux-mêmes. Pas d'excuse du point de vue du DRHache qui, cette semaine, prend les recruteurs voyeurs aux pièges de leurs propres contradictions.

Attaquons aujourd'hui un problème de société, qu'on ne saura illustrer autrement que par un néologisme : la googlisation des candidats. Faut-il, doit-on, peut-on, est-il éthique de rechercher sur internet des informations privées sur un candidat à travers les moteurs de recherche, les sites de rencontre ou de networking (désolé) ? Le recruteur doit-il se baisser pour ramasser ces informations qui trainent par terre, en général diligemment semées par le candidat lui-même ?

Il semblerait qu'aujourd'hui un cinquième des entreprises en phase de recrutement se livrent à une enquête sur le candidat au sein des réseaux sociaux du Web.

Pour un stage ou un premier emploi, on voit régulièrement passer dans le bureau du recruteur des jeunes personnes rasées de près ou ayant revêtu leur habit de lumière pour l'occasion. Sourire Colgate, l'air tout à la fois concentré et détendu, ils disposent d'une heure pour donner le meilleur d'eux-mêmes dans un certain registre, celui du sérieux, de l'engagement, de la rigueur et de la construction de soi.

Ce numéro de funambule, auquel ils ont été assez préparés dans le cadre des écoles de commerce, nettement moins à l'université ou dans les écoles d'ingénieur, est périlleux certes, mais aussi à leur avantage : ils peuvent mettre en scène une version légèrement tronquée, idéalisée de leur personnage. Les tout petits arrangements avec la réalité sur un CV sont monnaie courante (plus de 2/3 des CV seraient enjolivés), il appartiendra au recruteur de recouper et de se baser sur un faisceau de critères (sensibilité, exégèse, test de cohérence) pour faire son choix, mais il aura toujours une version lissée du personnage / candidat.

La question qui nous préoccupe aujourd'hui est la suivante : est-il

1) normal

2) utile

d'aller vérifier sur Facebook s'il n'y a pas de photo de ce charmant jeune homme avec un slip sur la tête et une bouteille de champagne dans chaque main ?

C'est tentant, il faut bien le reconnaître.

Et puis ces photos, ces commentaires plus ou moins inintelligents, finalement, c'est lui qui les a mis. Alors...

Eh bien non.

Pour les juniors, les gamins de 22-24 ans, il ne faut pas le faire. Tout d'abord parce que nous prônons les valeurs de séparation de la vie privée et de la vie professionnelle, ça n'est pas pour les violer en catimini. Ensuite parce que l'image est un piège, et que l'on peut s'être retrouvé dans une situation hasardeuse sans pour autant être l'ennemi public N° 153 452.

Il y a dix ans, un jeune HEC avait fait les frais d'une série de mails maladroits commentant l'attitude d'un recruteur. Ses mails avaient été envoyés et renvoyés tout autour de la planète, et il y avait eu un effet de meute assez comparable finalement au mécanisme d'acharnement sur lesquels peuvent déboucher les rumeurs*.

D'autre mails, faux, ceux-là, puis des rumeurs de mise-à-pied, voire de suicide, avaient circulé. Et dix ans après, ceux qui se souviennent de son nom, peuvent le taper sur google : l'histoire y est encore contée...

Jeunes gens, méfiez-vous des traces que vous laissez sur la Toile. La seule petite dose d'onguent que je puisse vous passer aujourd'hui est celle-ci : les grands groupes ont des systèmes de protection informatique, les fameux firewall, tellement développés, que la majorité de ces sites personnels ne sont pas consultables au bureau.

Et si un recruteur commence à faire ce genre de recherche de chez lui, à mon avis il devrait consulter.

 

Le DRHache
Le DRHache

Vous aimerez aussi :