Je suis meilleur que mon chef, que faire ?

Céline Chaudeau

Votre manager se repose beaucoup – trop même, à votre goût – sur vous ? Vous en venez à douter de sa légitimité ? Attention ! Nos experts vous proposent de réagir, en cinq étapes.

1. Reconnaître les bons symptômes 

Votre chef vous semble nul ? Premier constat : facile à dire... « C’est une litanie qu’on entend souvent en formation », observe Yves Maire du Poset, directeur du cabinet Piloter ma carrière. Ce consultant spécialisé en ressources humaines et auteur du livre Toutes les clés du savoir-vivre en entreprise invite les intéressés à prendre un peu de recul. « On peut commencer par se demander s’il est objectivement si nul que cela, ou si l’on est juste mécontent de la charge travail qu’il nous donne, par exemple. » « La frontière est mince entre déléguer quelque chose à quelqu’un et se décharger de cette chose sur lui », distingue Sandi Mann, auteur du guide Managez votre boss en 7 jours.

Parmi les indices probants :  

- vous devez faire une partie de son travail,

- vous travaillez plus que lui,

- il vous demande très souvent votre avis.

2. Manager son chef pour le faire travailler

« La pire réaction serait de s’emporter et de lâcher des mots qui ne serviraient à rien », prévient Sophie Letourneau, consultante chez Coaching time. Mais cette coach assure que la situation n’a sûrement rien de désespéré. Adepte de la communication non violente, elle assure que l’on peut manager son manager en utilisant la méthode OSBD (observation, sentiment, besoin, demande). « On peut ainsi le pousser à faire son travail de manager en lui expliquant, avec les formes, qu’il y a des délégations que l’on n’a pas envie d’accepter. On commence par faire une observation précise, on décrit les sentiments que cela suscite, on exprime un besoin et on formule une demande concrète pour contribuer à améliorer la relation avec le manager. »

3. Voir le bon côté des choses

Vous n’aurez peut-être pas le courage – ni l’envie – de recadrer votre manager. Pas la peine de ruminer pour autant : ce statu quo peut aussi vous servir. Sandi Mann rappelle une évidence : « cela peut être très profitable si votre boss se repose sur vous, car cela vous rend indispensable, donc moins exposé en cas de suppression de poste ». Mais Yves Maire du Poset, lui, invite plutôt les salariés à voir le verre à moitié plein. « Si on s’obstine dans le seul constat que son chef est mauvais, c’est la dépression assurée. Or, il y a toujours des choses à apprendre de lui en l’observant. On peut aussi le solliciter sur son expérience ou sa connaissance de l’entreprise. »

4. Tirer profit de la situation

On peut aussi profiter de la situation en travaillant main dans la main avec son manager. « On peut se dire qu’on va jouer le jeu, l’aider à réussir et espérer en récolter les fruits », poursuit Yves Maire du Poset. Selon ce consultant, un collaborateur peut se rendre indispensable et négocier de l’argent, voire une promotion future. Et même s’il n’est pas très coopératif, on peut tirer son épingle du jeu car la réussite d’un mauvais chef - forcément suspecte - peut attirer l’attention sur son subordonné. « On peut toujours accepter l’idée d’être considéré comme une cheville ouvrière et donner son aide. Le salarié sera peut-être reconnu par son chef ou, à défaut, par d’autres membres de l’entreprise qui se demanderont d’où viennent de telles compétences. » « La reconnaissance peut être donnée par la hiérarchie ou obtenue par le collaborateur ailleurs, confirme Mathieu Maurice, le directeur du développement du Cepig (Centre d’études de psychologie individuelle et de groupe). Beaucoup de managers sont incapables de donner du feedback. Mais le collaborateur peut aller le chercher ailleurs, auprès de la direction des ressources humaines, chez d’autres managers, des collègues ou même des clients », explique l’auteur du guide 4 clés pour gagner en autorité naturelle.

5. Se donner une date limite

« Ne vous laissez pas pour autant enfermer dans cette prison dorée, prévient Sandi Mann. Votre boss se repose peut-être tellement sur vous qu’il vous empêche de progresser. » Mathieu Maurice recommande aux intéressés de se protéger. « Le salarié doit s’interroger sur son degré d’adaptabilité. Il doit savoir ce qui est négociable ou pas pour lui pour déterminer le moment judicieux pour monter au créneau. » « Quoi qu’il arrive, il faut se donner une date limite, résume Yves Maire du Poset. Il faut se dire que l’on va vivre l’année où les deux années qui suivent comme une épreuve en espérant faire valoir sa compétence, mais cela ne peut pas durer jusqu’à la retraite. Au bout d’une certaine période, c’est contre-productif pour la santé et l’image du salarié. Il faudra demander une mutation en interne ou envisager un départ. » 

Céline Chaudeau
Céline Chaudeau

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