Le Québec : une même langue, mais une autre culture !

Olivier Pierson

Souvent idéalisé, le Québec peut devenir une terre de désillusions pour l'expatrié français un peu trop sûr de lui. Voici 5 idées reçues que nous vous livrons pour corriger le tir.

Une parcelle de France en Amérique du Nord

La langue commune est un piège ! C'est l'arbre qui cache une forêt de différences. « Les Québécois sont des Nord-Américains qui ont donc un état d'esprit de l'Amérique du Nord et non de l'Europe », met en garde Ingrid Normand, représentante pour le Québec à l'ANAEM. « Les références et les codes culturels, les modes de fonctionnement et de communication sont différents. Vous devez tout réapprendre, mais dans la même langue », renchérit Maëlle Bourguignat, conseillère emploi au sein de l'AMPE Citi. Cela exige une bonne dose d'humilité et d'écoute. En résumé, faites l'éponge ! Absorbez tout ce qui constitue votre nouvel environnement, et n'hésitez pas à poser des questions si une situation vous échappe. Parmi les différences notables, les congés payés. Après un an de travail chez le même employeur, vous avez droit à 2 semaines de congés par an. Des semaines peuvent être ajoutées en fonction du contrat de travail et de l'ancienneté. Inutile de vous dire aussi que dans la Belle Province, les RTT... c'est de la science-fiction !

L'anglais est obligatoire pour réussir

Sans être incontournable, la pratique de l'anglais reste un atout et ceux qui pratiquent les deux langues s'en tirent mieux.

Tout va dépendre du lieu de résidence de l'employé, du secteur d'activité et du poste. « Dans la plupart des cas, et surtout à Montréal, l'anglais est requis. C'est surtout vrai pour les postes en relation avec la clientèle », observe Ingrid Normand. Les offres d'emploi compilées par l'ANAEM Montréal sont éloquentes : 12% des offres n'exigeaient aucun niveau; 42% des postes proposés demandaient un niveau d'anglais intermédiaire, et 28% un niveau d'anglais courant. Hors de la métropole, les offres n'exigeant aucun niveau d'anglais culminent à 49%. Pour Raphaël, un Français établi à Montréal depuis plus d'un an, « un Français unilingue trouvera plus facilement un emploi qu'un anglophone unilingue. » Une façon de rappeler que si l'anglais est utilisé couramment, le français reste la langue du travail dans une province farouchement attachée à cette identité.

Les Français viennent au Québec pour les grands espaces

Encore un cliché. « La plupart des Français qui viennent au Québec le font à titre temporaire pour acquérir une expérience professionnelle à l'étranger car celle-ci est reconnue par des employeurs français », souligne Ingrid Normand. D'autres ressortissants français vivent une expérience prolongée ou ne quittent plus la Belle Province. Ceci dit, les Français apparaissent comme les immigrants les plus mobiles. Selon le ministère de l'Immigration québécois, 70% de nos compatriotes se fixeraient à Montréal, contre 88% pour les autres immigrants. Reste que les régions ont aussi du travail à proposer et des atouts à faire valoir, à commencer par des locations moins élevées que dans la métropole. « Votre profil sera parfois plus recherché dans d'autres régions de la province en manque de main d'œuvre, et où votre bagage français peut être un plus, alors qu'à Montréal, vous êtes un Français parmi d'autres », fait remarquer Maëlle Bourguignat.

On trouve plus facilement un emploi au Québec

Il faut être très prudent avec cette affirmation, dans un contexte de crise économique qui frappe aussi le Québec. D'abord, tout est fonction du type d'emploi et du secteur d'activité visés. Selon l'ANAEM, les secteurs de l'informatique, de l'ingénierie, de l'assurance, de la santé et de la restauration restent en forte demande. Ensuite, et c'est le point très important, vous arrivez dans un pays où vous avez tout à apprendre, et où la recherche d'emploi est très différente de celle pratiquée en France. « Beaucoup d'immigrants ne comprennent pas pourquoi un pays qui a autant besoin de main d'œuvre possède un marché de l'emploi caché », révèle Ingrid Normand. A peine 20% des offres d'emploi sont affichées, et il faut utiliser le fameux « réseautage » pour trouver chaussure à son pied. Autre obstacle : « Les professions et métiers réglementés sont souvent difficiles d'accès pour des diplômés hors Québec, et l'expérience professionnelle à l'étranger n'est nullement reconnue par les employeurs.»

« Ici, les diplômes passent au second plan, ce qui peut être très frustrant. Ce sont d'abord des compétences que vous allez vendre », prévient Maëlle Bourguignat. L'expérience québécoise est primordiale, « mais il faut souvent accepter de démarrer à un niveau inférieur à celui qu'on avait en France, et dans un domaine d'activité qui n'est pas forcément son secteur de formation. Cela peut créer des désillusions... »

Mes diplômes français sont reconnus

Bien souvent, une équivalence de diplôme payante est à effectuer auprès du ministère de l'Immigration et des Communautés Culturelles (MICC) québécois et/ou de l'ordre professionnel pour les métiers réglementés, ou encore une université lorsque vous souhaitez étudier. « Dans ce dernier cas, explique Ingrid Normand, les arrangements de reconnaissance mutuelle (ARM), qui doivent être signés à la suite de l'entente franco-québécoise de reconnaissance de qualifications professionnelles du 17 octobre 2008, devraient grandement faciliter les choses. » Le Québec compte 45 ordres professionnels réglementant 51 professions. La date butoir pour les ARM a été fixée au 31 octobre 2010. L'entente est déjà applicable pour les ingénieurs, tandis que d'autres professions comme architecte, expert-comptable, ou encore travailleur social, vont bientôt emboîter le pas. Pour les métiers et professions non réglementés par un ordre professionnel, l'équivalence du diplôme est recommandée.

Pour en savoir plus : www.mri.gouv.qc.ca

Concernant vos diplômes, même s'ils sont officiellement reconnus depuis 1996, informez-vous sur le système d'enseignement québécois, de façon à pouvoir expliquer à quoi correspond votre niveau français à un employeur ou sur un CV. A titre d'exemple, un BTS n'existe pas au Québec, et un baccalauréat est une licence chez nos cousins.

 

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Olivier Pierson
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