Petit guide de survie en open space

Tiphaine Réto

Les livres se sont succédés sur le thème de l'enfer vécu par certains salariés en open space. Le bruit et promiscuité font désormais partie de la vie du cadre en entreprise. Petits trucs pour ne pas finir chèvre dans un bureau paysagé.

Le chiffre est en pleine expansion : 14 % des salariés français travaillent dans un open space d'au moins 4 personnes. « Aujourd'hui, la plupart des jeunes commencent leur carrière dans un bureau ouvert », reconnaît Béatrice Taudou, directrice des études de Sociovision.

Des conditions pas toujours faciles

Un passage obligé, donc. Mais pas toujours bien vécu. Bruit, promiscuité, sentiment de contrôle social... « Les espaces décloisonnés ont amené de nouveaux fonctionnement dans le travail, mais les pratiques, elles, n'ont pas toujours évoluées dans le bon sens, observe Béatrice Taudou. Les gens parlent fort au téléphone, ne s'isolent pas toujours pour travailler en groupe. C'est parfois difficile pour les salariés de travailler dans ces conditions. » A chacun, donc, de ruser à sa manière...

Esquiver le bruit

« Le bruit, ce n'est pas ce qu'il y a de plus embêtant, note Laurent, informaticien dans une SSII. J'ai investi dans un bon casque intra-auriculaire qui me permet de me mettre dans ma bulle. » Idem pour Muriel, journaliste dans un quotidien. « J'ai toujours mon iPod avec moi et quand j'ai besoin de me concentrer, j'écoute de la musique. » Pas évident pour tous, pourtant. « S'isoler dans sa musique n'est pas possible dans toutes les entreprises, reprend Béatrice Taudou. D'autant que le premier principe de l'open space, c'est quand même de permettre une fluidité de l'information. Si vous ne savez rien de ce qui se passe autour, ça ne sert plus à grand chose. »

Fuir les collègues envahissants

Mais sous prétexte de fluidité, on risque d'être toujours interrompu par Maurice qui veut vous payer un café à cinq minutes de la réunion que vous n'avez pas fini de préparer ou par Josette qui trouve que de votre place, la vue sur les toits de Paris est vraiment formidable. En plus, t'as vu ? Il pleut... « Il y a des journées où on a beau vouloir être efficace, on n'avance à rien à cause des importuns, raconte Benjamin, webdesigner dans une agence toulousaine. Du coup, je me suis mis un panneau « Ne pas déranger » que je mets bien en évidence dans les coups de bourre. Le tout, ça a été d'expliquer à mes collègues que, loin d'être impoli de ma part, ça allait m'éviter de leur hurler dessus au moment où ma patience aurait atteint ses limites. »

Protéger son espace vital

L'autre tactique pour être plus tranquille dans l'open space, c'est d'y choisir sa place. Comme à l'école : près du radiateur, dans le fond, avec le mur dans votre dos. Aaaaaah... Le mur ! Votre meilleur allié pour protéger votre intimité informatique des regards trop curieux. « C'est le gros problème des bureaux paysagers, concède Béatrice Taudou. Il y a une sorte de contrôle social qui fait que les gens se sentent en permanence épiés. » Et pour remplacer en un clin d'œil votre page Facebook par un sérieux document Excel, un « alt+tab » très agile n'est pas toujours le plus pratique. Là encore, les trucs et astuces varient d'un salarié à l'autre, allant du rétroviseur pour bureau au discret filtre pour écran qui demande d'être bien en face de l'ordinateur pour voir ce qui s'y affiche. Xavier, lui, a choisi de lier le pratique à la tactique. Chef de projet dans une ONG, il a entouré son espace de travail de blocs de tiroir de rangement. « Ca me fait un rempart pour ne pas avoir sans arrêt le va-et-vient de mes collègues autour de moi et ça me permet de ranger un peu les dossiers qui s'accumulent au fil de l'année. »

Customiser son espace

L'autre avantage, c'est que, même classiquement transparents, les blocs de tiroir de Xavier donnent à son bureau un petit côté « personnel ». Une customisation également adoptée par Laurent. « Je tourne souvent d'une entreprise à l'autre et donc, souvent, d'un open space à l'autre. Pour me créer « mon » bureau, j'amène quelques dessins de ma fille que j'accroche, quand je le peux, près de moi. Sinon, je me contente de charger de belles photos en fond d'écran d'ordi. » Un minima dont beaucoup doivent se contenter dans l'uniformisation des bureaux ouverts. « Aujourd'hui, les open space sont réfléchis et aménagés pour répondre à des questions d'harmonie, explique Béatrice Taudou. Personnaliser son bureau n'est pas forcément bien vu partout. Ceci dit, plus l'open space est beau, moins les salariés ont envie de le décorer à leur manière... »

Se ménager des moments de pause

Même beau, l'open space peut vite devenir pesant. « Moi, je prétexte des coups de téléphone importants pour m'isoler dans les salles de réunion, confie Benjamin. Ca me permet de souffler une demi-heure. J'y passe aussi de vrais coups de fil, d'ailleurs. Un peu plus au calme que quand on a l'impression que tout le service écoute la conversation. » Se ménager des moments de pause, c'est aussi le conseil de Béatrice Taudou : « Il faut profiter de tous les espaces de décompression, tous les moments de rupture, tels que la pause de midi. Manger seul de temps en temps pour sortir un peu du « tous ensemble », ça peut être une bonne idée. »

Ultime solution : télétravailler

Et quand ce « tous ensemble » devient vraiment insoutenable, il reste encore une solution : le télétravail. Ca a été le choix de Laurent dans son précédent travail. « Le contexte était un peu particulier : il y avait des travaux pour réaménager le plateau de l'étage au-dessus de nous. Du coup, c'était très fatiguant d'être en permanence au bureau. Ceux qui le voulaient et le pouvaient ont pu aménager leur semaine pour travailler une journée de chez eux. » Un aménagement bon à prendre, quand les entreprises le concèdent : « Ce n'est pas encore dans les normes sociales, reconnaît Béatrice Taudou. Mais, là, ça va être aux jeunes de faire bouger les choses. »

 

Tiphaine Réto © Cadremploi.fr

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