Pourquoi j'ai choisi d'être expatrié au Nigeria ?

Tiphaine Réto

« Logistic manager » depuis 2 ans au Nigeria, F. dit compenser des conditions de travail « à risques » par des conditions salariales très favorables : à 35 ans, il gagne 100 000 euros par an et bénéficie d'un droit aux vacances exceptionnel. A savoir pour deux mois travaillés un mois au vert.

Vous êtes au Nigeria depuis deux ans. Quel a été votre parcours avant cela ?


Ca va faire 12 ans que je vis en Afrique. Après mes études à la fac, je suis parti m'installer en Côte d'Ivoire pour monter mon entreprise d'importation et de vente de pièces détachées pour automobile. J'y suis resté 8 ans avant de rentrer en France passer un diplôme d'ingénieur. A peine diplômé, j'ai été nommé en Angola. Très vite, une opportunité s'est présenté au Nigeria. J'ai accepté tout de suite. Ici, je suis basé dans une petite ville, près de Port Harcourt. Je suis chargé de l'approvisionnement des plateformes et des bateaux qui travaillent en off-shore. Je travaille avec une vingtaine d'employés locaux et suis le seul expatrié sur place.

Les conditions de vie ne vous semblent pas trop difficiles ?

La situation est relativement dangereuse. Il faut être vigilant. J'habite ici dans un camp complètement cerné par la police armée et je ne me déplace jamais sans garde du corps et chauffeur. Durant les trois dernières années, je crois qu'il y a eu près de 700 kidnappings crapuleux, visant principalement les expatriés. Et, même si les Nigérians sont de manière générale des gens affables et courtois, dans le travail, il n'est pas rare d'être menacé lorsqu'on refuse les conditions d'un interlocuteur local. Personnellement, ça ne m'est pas arrivé et je ne veux pas entretenir de psychose. D'autant plus que je commence à avoir l'habitude des conditions difficiles. J'étais en Côte d'Ivoire en 2003, quand les évènements ont commencé. J'ai ensuite atterri en Angola, un pays qui a connu près de 25 ans de guerre civile... et pendant mes derniers congés, j'ai eu la bonne idée d'aller en Thaïlande. Je me suis retrouvé en plein dans les émeutes !

Qu'est-ce qui vous a fait accepter ce poste ?

Il y a d'excellentes contre-parties. La première, c'est le salaire : je touche 100 000 euros par an, payés sur 14 mois. A cela vous rajoutez les primes et les bonus.  Ensuite, en travaillant ici, vous bénéficiez d'un droit aux vacances exceptionnel. Pour deux mois de travail, je peux prendre un mois de congé. Dans d'autres compagnies, c'est un mois/un mois. Et puis ici, c'est un petit monde. On est au cœur de l'activité, vraiment sur le terrain. Je côtoie des gens qui travaillent dans d'autres sociétés et je suis au courant de tout ce qui se passe, de toutes les opportunités. Après... on est à des postes stratégiques. Au charbon. On n'a pas droit à l'erreur, car ça coûte extrêmement cher à notre société. Et la moindre erreur se voit tout de suite...

Vous conseilleriez cette expérience à d'autres personnes ?

Les managers disent qu'ils ont de plus en plus de mal à trouver des gens pour venir ici. Ils cherchent avant tout des personnes célibataires, car c'est devenu extrêmement compliqué de faire venir des familles. Je ne comprends pas que des jeunes ne souhaitent pas tenter cette aventure. En dehors des avantages sur le salaire et les vacances, ce type d'expérience est extrêmement intéressant à connaître. Si ça se passe mal, on ne vous tiendra pas rigueur de vouloir rentrer plus tôt. Et quoi qu'il arrive, c'est très valorisant d'avoir essayer. Et puis, il ne faut pas exagérer non plus : ce n'est pas l'enfer ici. Seulement le Nigeria.

Tiphaine Réto
Tiphaine Réto

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