Survivre à un conflit avec un collaborateur

Luc Brunet

Vous avez beau faire, c’est l’enfer avec l’un de vos collaborateurs ? Pas de panique, le professeur Luc Brunet, spécialiste en psychologie du travail à l’université de Montréal, a 5 solutions. Ou plutôt 5 modes de gestion des conflits en entreprise à vous proposer pour vous aider à en sortir par le haut.

Vous avez des divergences d’opinions, de valeurs et d’intérêts avec vos collaborateurs. Cette situation vous stresse et génère beaucoup de pertes de temps, vous vous sentez dans l’obligation expresse de le régler. Eh bien dites vous que c’est normal.

Le conflit au boulot, c'est quoi ?

Le conflit au travail est une composante de la vie de tous les jours et il est inévitable. Heureusement nous ne vivons pas tous les jours de graves conflits et nous gérons bien souvent les plus anodins sans nous en rendre compte.

Un conflit peut se définir comme une situation ou des acteurs organisationnels poursuivent des buts différents, défendent des valeurs contradictoires, ont des intérêts différents ou opposés ou poursuivent simultanément le même but (bref, ils sont en compétition).

Il va de soi que l’on ne gère pas un conflit avec un collaborateur comme on le ferait avec un inconnu. Il faudra constamment vivre avec les conséquences du différent et il faut se rappeler que la façon dont on gère un conflit sert... de point de départ au prochain ! Selon Kenneth Thomas, le célèbre théoricien du conflit de UCLA, tout individu devrait être capable de maîtriser cinq modes de gestion de conflits qui sont tous efficaces selon la situation conflictuelle. Ce sont la collaboration (problem solving), l’accommodation, le compromis, l’évitement et la compétition (forcing).

Solution 1 : la collaboration

Les principaux conflits susceptibles de survenir entre collaborateurs sont, entre autres, le malentendu, le conflit d’intérêt et le conflit de personnalité. Le malentendu est une divergence d’interprétation entre deux personnes qui croyaient se comprendre. À titre d’exemple, vous êtes indisposé par le fait que votre collaborateur arrive en retard à une réunion. Celui-ci ne comprend pas votre réaction, vous vous rendez compte qu’il avait compris que la réunion devait se tenir à 9h30 plutôt que 9h00. Ce conflit se résout en rétablissant le contenu de la communication, soit en collaborant.

Il s'agit alors de s’efforcer de comprendre les raisons d’être du malentendu ainsi que les torts engendrés. Pour cela, rien ne vaut une bonne communication en face-à-face : les communications électroniques (e-mail) sont loin d’être les plus efficaces pour gérer le conflit.

Solutions 2 et 3 : l'accommodation et le compromis

Une autre technique de gestion des conflits, dite d’accommodation, consiste à donner raison à l’autre. Cette dernière est des plus efficace surtout quand le maintien de la relation avec l’autre est plus important que la nature du différend.

Le conflit d’intérêt avec un collaborateur est plus difficile à gérer, puisqu'il nécessite de maîtriser l'art du compromis. Un conflit d’intérêt survient lorsqu’un objet indivisible est convoité par deux personnes. À titre d’exemple : la répartition d’un budget de fonctionnement ou encore un budget ne permettant d’acheter qu’un ordinateur... convoité par les deux parties. On voit tout de suite le problème : il y aura un gagnant et un perdant. Et, dans ce dernier cas il faut s’assurer du respect de l’estime de soi ; il ne faut pas oublier qu’il faudra continuer à travailler avec l’autre.

Dans cette situation il faut donc apprendre à utiliser le compromis, à négocier et apprendre à formuler la position de chacune des parties, à identifier les motifs qui pourraient pousser chaque partie à épouser la position de l’autre et identifier le degré de satisfaction.

Solutions 4 et 5 : l'évitement ou la compétition

Le conflit d'intérêt peut sembler le plus difficile à vivre et à gérer, mais ce n'est pas le cas : le conflit de personnalité se révèle souvent le pire. Quoi de pire, en effet, que de travailler avec quelqu’un dont le visage ne nous revient pas? Ou vice-versa. Le conflit de personnalité n’a aucune cause rationnelle. C’est un problème de transfert, l’individu contesté représentant très certainement une personne liée à la vie infantile de l'autre. Les manifestations prennent souvent la forme de reproches (directes ou indirectes) ou de demandes impossibles à satisfaire.

Il faut se rappeler que l’on ne peut pas changer la personnalité de quelqu’un. On peut, tout au plus, faire évoluer certains de ses comportements. Dans ce type conflit, il faut donc apprendre à utiliser l’évitement et la compétition (forcing). L’évitement sera nécessaire pour éviter de répondre aux reproches et demandes qui ne sont que des stratégies de déstabilisation ou visant à vous faire mal voir. La compétition, quand une décision rapide est vitale et que les demandes ou reproches de l’autre risque de nuire à votre réputation, s'avère indispensable. Dans tous les cas, il faudra un jour ou l’autre trouver une façon de ne plus travailler avec cette personne, de lui donner ou de prendre des fonctions dans le cadre desquelles vous n'aurez plus d'interactions professionnelles. Cela vaut mieux, car les conflits de personnalité véritables sont aussi récurrents.

Luc Brunet
Luc Brunet

Vous aimerez aussi :