Bloqué par le volcan islandais : serez-vous quand même payé ?

Mathieu Bruckmüller

Coincés à l'autre bout du monde par un volcan islandais au nom imprononçable, des milliers de Français se sont retrouvés dans l'incapacité de rentrer travailler pendant plusieurs jours. Théoriquement leurs employeurs ne sont pas tenus de les rémunérer. Or, selon plusieurs avocats en droit du travail, les entreprises pourraient bien faire une exception. Explications.

La pagaille causée par ce volcan islandais, personne ne l'avait vu venir. En quelques heures, Eyjafjöll a créé un incroyable vent de panique en bloquant, entre autres, des milliers de salariés aux quatre coins de la planète. Pour les spécialistes interrogés, cet évènement est bel et bien un cas de force majeur. (Il est à la fois extérieur à la personne mise en cause, imprévisible et irrésistible). Conséquence directe, le salarié, ne peut pas être licencié pour son absence. Mais pour éviter tout soupçon d'abandon de poste, « il lui appartenait de prévenir son employeur dans les 48 heures suivant la date prévue de son retour », soutient Nicolas Billon, avocat chez Simon Associés. Il pourrait également devoir lui fournir toutes les pièces justifiant de sa situation comme les billets d'avion par exemple.

Pas de travail donc pas de salaire ?

En revanche, légalement, l'employeur n'est pas tenu de supporter les conséquences de la force majeure en rémunérant les collaborateurs absents. Solution de repli pour le salarié : négocier avec son patron afin que les jours d'absence, pour éviter qu'ils ne soient décomptés du salaire, soient pris de façon rétroactive sur ses congés payés ou ses RTT. « Mais en aucun cas, l'employeur n'est tenu d'accepter. Il aura toujours le dernier mot car les congés payés comme les RTT se posent, par anticipation, avec des règles bien précises », rappelle maître Yanick Alvarez-de Selding.

On le voit bien, en théorie, c'est le salarié qui supporte le gros des conséquences. Pourtant, rares seront les entreprises qui vont effectuer des retenues sur salaires ou demander à leurs employés de poser des jours de congés, anticipe maître Billon, qui conseille des PME et des grands groupes.

« C'est une question de décence. Je ne vois pas l'employeur aller chercher des poux dans les cheveux de ses salariés. Il y a eu beaucoup d'émotion autour du blocage des aéroports. Pour moi, les entreprises ne vont exiger aucune contrepartie de leurs employés. Si jamais, elles ne les paient pas, elles risquent fort de s'attirer un mauvais buzz. L'employeur doit être ferme dans certaines circonstances, mais là il s'agirait d'un pointillisme déplacé ».

Les salariés des grands groupes plus favorisés

Un optimisme qui n'est pas partagé par tous. « Le problème ne va pas se poser pour les grandes entreprises qui à mon avis ont les moyens de maintenir la rémunération de leurs salariés. Le risque est plutôt pour les collaborateurs des petites entreprises, déjà très affectées par le contexte économique », explique Evelyn Bledniak, avocate auprès des salariés et des CE. « La fiche de paie d'avril vient de tomber. Je m'attends déjà à être contactés prochainement par des salariés mécontents ».

Reste les salariés envoyés en déplacement à l'étranger et qui se sont eux aussi retrouvés bloqués. « Dans ce cas, ils continuent à être payés par leur employeur qui doit aussi couvrir les frais annexes comme l'hébergement et les repas », explique Yanick Alvarez-De Selding.

Mathieu Bruckmüller
Mathieu Bruckmüller

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