Ce que le public attend des cadres du privé

Yves-Marie Vilain

L'ADN d'un cadre du privé est parfaitement compatible avec le secteur public. A condition qu'il sache s'adapter à cet environnement codé. Et qu'il apporte dans sa besace le sens de l'écoute.

Insurmontable les différences entre cadres du public et ceux du privé ? De moins en moins constatent les experts. Et la guerre des recrues ne fait que commencer. Crise oblige, le manager du privé vient chercher une sécurité dans le secteur public, lui-même en attente de talents venus du privé. Mais pas à n'importe quel prix.

Faire venir des collaborateurs du monde de l'entreprise suscite des craintes de la part des recruteurs du secteur public. Plus qu'une simple question de cultures différentes, c'est l'étendard éthique qu'ils brandissent : on ne dirige pas un service de l'Etat comme une entreprise.

Court terme versus long terme

Des divergences qui se vérifient sur le terrain. Selon une étude européenne menée par le cabinet de conseils en ressources humaines Hudson, auprès de managers du public et du privé, le responsable de service public, face à l'absence de pression du marché, apparaît plus soucieux de mettre en place une stratégie à long terme que son vis-à-vis du privé. « Un usager ou un contribuable n'est pas encore partout considéré comme un client », rappelle Pierre-Yves Poulain, responsable du développement commercial de MrTed France.

Management participatif versus autoritarisme

L'étude révèle également une différence fondamentale de comportement en matière de rapports hiérarchiques. Là où le fonctionnaire utilise son ascendant hiérarchique pour asseoir son autorité et imposer ses décisions, le manager du privé cherche à convaincre ses collaborateurs du bien fondé des décisions.

Motivation versus laxisme

Il faut dire que les managers du privé ont pris du management participatif en intraveineuse depuis de longues années. Au point d'en faire une seconde nature. Des formations qui ne se sont pas répandues aussi massivement dans le public. « Dans notre conseil général, quelques salariés résistaient à tout changement et leur chef ne savaient pas les convaincre d'évoluer, confie un responsable RH. Lorsqu'il est parti en retraite, nous avons recruté un ancien cadre du privé formé aux techniques de la conduite du changement. C'est devenu un service très performant. » Les chefs d'équipes reconvertis dans le public, sont très appréciés quand ils savent faire œuvre de pédagogie avec leurs collaborateurs et se concentrent sur l'aspect humain : « On attend d'eux qu'ils agissent sur le moral et les motivations des agents sous leur responsabilité. Il s'agit d'une évolution profonde, qui implique une transformation de la perception même du service public ».

Une évolution qui sucite évidemment des craintes, de la résistance et parfois de l'opposition de la part de certains agents. Pour faire face à cette réaction, les managers disposant de qualités d'écoute avérée sont très recherchés. « Passer du privé au public nécessite d'avantage de qualités de leadership que dans certaines entreprises privées. Je recommande aux candidats de communiquer clairement leur vision, et d'expliquer comment ils comptent fédérer leur équipe autour de la notion de service public», conseille Joël Piquionne.

 

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Passer du privé au public : Trois questions à Dominique Lhuillier

 

Yves-Marie Vilain
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