Stress au travail : « Nous apportons de l'aide au salarié comme à son manager »

Tiphaine Réto

Marie Pezé est docteur en psychologie, psychanalyste et expert auprès de la Cour d'appel de Versailles. En 1997, elle fut à l'origine de la première consultation « Souffrance et travail ». Il en existe aujourd'hui 35 en France, dont le site web a été lancé avant l'été.

Retrouvez en ligne les autres article de ce dossier sur le stress en entreprise : "Ceux qui l'ont vécu" et "Les recours possibles".

Le site s'adresse à toutes les catégories socioprofessionnelles. Les cadres sont-ils plus particulièrement touchés par la souffrance au travail ?

Pas plus que les ouvriers. Mais on s'est rendu compte de leur souffrance plus récemment. C'est d'ailleurs triste qu'on ait été obligé d'attendre des suicides de cadres pour prendre la question au sérieux. L'intensification de leur travail, par exemple, a fait apparaître une nouvelle « maladie » qu'on appelle l'ESA, l'état de stress aigu. Il se manifeste notamment par des crises de nerf soutenues... et peut aller jusqu'au suicide. Ce n'est pas le fait de personnes fragiles. Ca peut arriver à tout le monde.

La démarche s'inscrit dans une lignée de livres, d'articles et de pages web sur le thème de la souffrance au travail. Qu'apportez-vous de plus à l'internaute ?

Il n'y avait pas encore de site rassemblant une telle masse d'information sur tous les volets de la souffrance au travail. Or, quand vous êtes en situation de souffrance, vous n'avez pas l'énergie de vous perdre dans les documents. Nous orientons les lecteurs en demande en fonction de leur cas (Faut-il prévenir son N+1 ? Se mettre en arrêt de travail ? Comment trouver les bons contacts ?) Nous travaillons aussi sur « l'après », sachant l'amertume qu'on peut ressentir après avoir quitté son entreprise. Enfin, au-delà des salariés, nous voulons être une ressource pour les chefs d'entreprises, les médecins généralistes, les avocats... et passer outre une certaine idée de « lutte des classes » sur ce terrain. Nous faisons par exemple un listing précis et exhaustif des techniques de management pathogènes, allant du tutoiement imposé à un rythme de travail trop séquencé. Un salarié peut retrouver sa situation de travail dans ces lignes, mais un manager trop zélé peut aussi y trouver des réponses. Il ne s'agit pas de juger, mais de guider.

Avec 6 000 connexions par jour, le site répond à un vrai besoin. N'est-ce pas aussi le signe d'un problème de prise en charge en face-à-face ?

Il y a six mois d'attente dans les consultations. C'est surtout la preuve qu'il n'y en a pas assez. Et qu'il y a encore un long chemin à parcourir. Mais la jurisprudence de 2002 sur l'amiante a changé les choses puisque désormais l'entreprise est responsable de la santé du salarié en termes de sécurité et de résultats. Que ce soit moralement ou physiquement, le chef d'entreprise se doit désormais de protéger ses employés (art. L.4121-1 du Code du travail).

Tiphaine Réto @ Cadremploi.fr

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