Un tatouage au travail, si je veux... ?

Clémentine Monperrus

Les détatouages au laser ont augmenté de 32 % aux Etats-Unis. La motivation première mise en avant par les clients : le travail. Mais vos tatouages peuvent-il vraiment vous pénaliser dans le cadre d’un recrutement ou de votre évolution professionnelle ? Réponses d’experts.

Dans un récent reportage d’ABC News (à visionner ci-dessous), on voit jeunes dip’ et demandeurs d’emploi se ruer dans les centres de détatouages au laser. Selon The Patient's Guide, les détatouages ont augmenté de 32% aux Etats-Unis l’an dernier, et que ceux qui y ont recours évoquent le travail comme motivation première, rapporte le journaliste. Mais que dit la loi française à ce sujet ? Peut-on vraiment perdre un job à cause d’un tattoo ?

La loi est bien floue dans le texte, sur la question des tatouages, piercings et autres éléments d’apparence physique. Sachez cependant que le Code du travail interdit toute discrimination liée à l’apparence physique d’un candidat à l’emploi ou d’un salarié déjà en poste (art. L.1132.1 du Code du travail). Ce dernier précise en outre que l’employeur peut apporter des restrictions quant à la tenue d’un salarié, puisque cette dernière ne doit pas porter atteinte à l’entreprise ou à la sécurité. Mais la contrainte doit être « proportionnée », en fonction du poste et du secteur d’activité du salarié (art. L. 1121-1 du Code du travail).

Ce que dit la jurisprudence

Ainsi, la Cour de la Cassation (Cass. Soc, 11.1.2012, N° 177) a jugé infondé le licenciement d’un chef de rang de restaurant gastronomique, qui avait été licencié après avoir décidé de porter des boucles d’oreilles au travail. Mais attention méfiance : la jurisprudence n’est pas toujours protectrice pour le salarié, comme le montre le cas d’un employé des Télécoms qui avait, lui, été licencié pour… port de bermuda au travail.

Concernant les tatouages, les décisions de justice sont marginales. Récemment, le défenseur des droits a été saisi par un candidat qui s’est vu refuser un emploi à cause de ses tatoos (le règlement intérieur de l’entreprise prévoyait l’interdiction de « tout port de tatouage ou piercing »). Mais le litige s’est réglé à l’amiable et le candidat a finalement été embauché.

Argumentaire de l’employeur

Au-delà de cette affaire, « il est accepté qu’un employeur puisse demander à son salarié de cacher un tattoo trop voyant ou à connotation trop forte. A condition, bien sûr que cette restriction à la liberté du salarié soit justifiée et proportionnée dans le cadre de ses fonctions », confirme Yves Nicol, avocat en droit social et auteur du blog avocattalk.fr.

Face à un tribunal, « tout dépendra donc de la motivation soulevée par l’employeur en cas de licenciement ou de refus d’embauche », conclut Yves Nicol. Le cas du tatouage peut être rapproché des cas de litiges vestimentaires, dans le cadre desquels le juge cherche à s’assurer qu’il ne s’agit pas d’une discrimination et que la sanction/décision de l’employeur était justifiée.

Les recruteurs posent des limites

Dans les faits, les règlements internes aux entreprises n’hésitent plus à poser les limites : Air France par exemple exige des candidats à l’embauche une "présentation soignée" et souligne que "le manuel des règles du port de l'uniforme n'autorise pas les tatouages ou piercings visibles pour le personnel naviguant".

Mais la question, pour le chercheur d’emploi ou le salarié travaillant dans un secteur aux codes traditionnels, reste avant tout une question de bon sens. Puisqu’il y a fort à parier qu’un recruteur rebuté par le tatouage trop voyant d’un candidat n’ira certainement pas le souligner en entretien d'embauche.

Charlotte Rosier, consultante en image, conseille vivement « d’éviter de tatouer les parties du corps trop exposées : mains, cou, visage… » Car, selon cette dernière, « quand on cherche du travail ou une évolution de carrière, il faut faire attention à son image. 60% de la première impression vient de l’apparence. Il ne s’agit pas d’entrer à tout prix dans un moule, mais il ne faudrait surtout pas devenir prisonnier de sa propre image. »

 

Clémentine Monperrus © Cadremploi.fr

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