- Une moindre tolérance aux nuisances sonores depuis le confinement
- Des sources de bruit protéiformes
- L’impact délétère du bruit au travail
- Quelles solutions contre le bruit au travail ?
- Le rôle des managers et des médecins du travail
- A (re)lire : 6 solutions trouvées par les entreprises pour offrir une meilleure concentration aux salariés qui en ont besoin
Ils témoignent
- Romain Bendavid, directeur de l’expertise corporate et work experience au sein de l’IFOP
- Jean-Luc Puel, président de l’association JNA (Journée nationale de l'audition)
- Jean-Charles Ceccato, vice-président de JNA
Une moindre tolérance aux nuisances sonores depuis le confinement
Le bruit au travail n’est désormais plus qu’une question de décibels. « Depuis les confinements successifs, nos oreilles se sont déshabituées au bruit. Le résultat, c’est que nous sommes désormais moins tolérants aux nuisances sonores, qu’elles apparaissent au sein du foyer ou sur le lieu de travail », explique Romain Bendavid, directeur de l’expertise corporate et work experience au sein de l’Ifop.
L’hybridation des modes de travail amplifie cette intolérance.
En s’habituant à télétravailler au calme, depuis leur domicile, à raison de deux à trois jours par semaine, les actifs développent une forme d’aversion au bruit lorsqu’ils retrouvent leur très cher open-space.
Résultat : 51 % des actifs se disent gênés par le bruit, contre 49 % en 2021, révèle la 6e vague du baromètre Ifop-JNA, réalisée en septembre 2022 auprès de 1118 actifs. Sans surprise, les ouvriers et les actifs franciliens souffrent le plus de ces nuisances sonores (65 %). Ces dernières ne sont d’ailleurs plus l’apanage des seuls travailleurs de l’industrie et du BTP. « Dans le commerce, qui inclut la réparation d’automobiles, le transport, l’entreposage, l’hébergement et la restauration, 61 % des actifs se plaignent des nuisances sonores, preuve que le problème n’est pas circonscrit aux secteurs déjà connus », précise Romain Bendavid.
Le brouhaha permanent d'un open space peut être un facteur de pénibilité
Des sources de bruit protéiformes
D’après le baromètre de l’Ifop, plusieurs sources de bruit sont pointées du doigt par les actifs :
- celui provenant de l’extérieur des locaux (35 % des réponses),
- les allers et venues de personnes (28 %),
- les conversations entre collègues (27 %),
- les conversations téléphoniques ou en visioconférence (24 %)
- ainsi que le matériel utilisé tel que les imprimantes et les ordinateurs (23 %)
« Lorsque les open-spaces ont fait leur apparition dans les années 60, c’était pour deux raisons : favoriser le lien entre les salariés et faciliter la circulation de l’information. Aujourd’hui, ce mode d’organisation est source de conflits, de stress, de fatigue, à cause des nuisances sonores qu’il génère. La culture du bruit divise, alors qu’elle était faite pour rassembler », note Jean-Luc Puel, président de l’association JNA.
L’impact délétère du bruit au travail
D’après le baromètre, les nuisances sonores ont des conséquences néfastes sur les relations de travail puis, par effet de ricochet, sur le bien-être des actifs. Le bruit génère :
- de l’incompréhension avec les personnes encadrantes (pour 48 % des sondés),
- de l’agressivité dans les échanges (pour 45 %),
- des tensions ou des conflits au sein de l’équipe de travail (41 %)
- voire des comportements de repli sur soi (37 %).
Pour 53 % des télétravaillers, cette gêne dûe au bruit pourrait leur faire fuir le présentiel.
Quelles solutions contre le bruit au travail ?
« Le problème du bruit, les entreprises en ont conscience, mais ne l’adressent pas encore. Il y a une forme d’inertie du côté des employeurs », constate Romain Bendavid. Seuls 28 % proposent à leurs salariés un équipement de protection individuelle comme des casques anti-bruit ou des bouchons d’oreille, pourtant peu couteux. Nul doute que celles qui le font sont directement concernées par l’obligation légale de ne pas dépasser un certain niveau de décibel (85dB) comme les usines, les exploitations agricoles, les salles de concert...
Par ailleurs, seuls 23 % des employeurs offrent des espaces de repli pour permettre aux salariés de s’isoler du bruit. Pour l’association JNA, c’est insuffisant et il est temps de passer à la vitesse supérieure. D’autant qu’en cas de trouble de l’audition provenant d’une forte exposition sonore, les salariés sont démunis : 58 % ne savent pas comment réagir.
Le rôle des managers et des médecins du travail
La première piste à exploiter est de multiplier les actes de prévention, alors qu’un quart de la population mondiale sera atteinte d’un problème auditif en 2050 selon l’OMS. Après tout, respecter le calme d’un lieu est avant tout « une question de bon sens faisant appel à des règles de vivre ensemble », rappelle Romain Bendavid.
Les managers doivent, quant à eux, être formés pour apprendre à réguler ce bruit.
« Le dépistage de l’audition doit enfin être mieux proposé par les médecins du travail qui, jusqu’ici, étaient plutôt concentrés sur le dépistage visuel », indique Jean-Charles Ceccato, vice-président de JNA.
A (re)lire : 6 solutions trouvées par les entreprises pour offrir une meilleure concentration aux salariés qui en ont besoin
Exemples de solutions mises en place en 2018 dans 6 entreprises.
Après avoir occupé le poste de rédactrice en chef d’ExclusiveRH.com (entre autres), je travaille désormais à mon compte. Pour Cadremploi, je contribue à la rubrique Actualités via des enquêtes, des interviews ou des analyses sur les évolutions du monde du travail, sans jamais oublier l'angle du digital.