Quels labels signalent les entreprises où il fait bon travailler ?

Gwenole Guiomard

TEMOIGNAGES – « Entreprise à mission », « B corp » « Positive Work Place » « Great Place To Work »… Sur 4 millions d’entreprises en France, à peine quelques centaines ont passé les épreuves pour décrocher l’un de ces labels ou certification. Avec plus ou moins de fiabilité, ils permettent aux candidats à un emploi d’évaluer le degré de bienveillance de l’entreprise avant d’y postuler. Voici les témoignages de quelques-uns de ces employeurs.
Quels labels signalent les entreprises où il fait bon travailler ?

Ils témoignent

  • Thomas Lemasle, dirigeant de Oé, un néo-négociant en vin
  • Alexandre Boucher, responsable commercial du cabinet de conseil et d’audit RSE de Saint Front
  • Anne Mollet, directrice générale de la Communauté des entreprises à mission
  • Emilie Lowenbach, directrice RSE Ecotone (Bjorg, Bonneterre, Alter Eco)
  • Adrien Moreira, directeur général de Bruce
  • Franck Carnero, directeur mission et impact de la Maif
  • Sophie Scantamburlo-Contreras, directrice générale de Scop3
  • Marianne Urmès, DRH France de TooGoodToGo
  • Charles-Henri Margnat, fondateur du label « positive workplace »
  • Didier Zeitoun, président de Magellan Partners

Qui a envie de travailler pour une entreprise maltraitante, polluante ou discriminante ? «  Job à impact », « sens au travail »… de plus en plus de salariés affirment vouloir « aligner » leurs valeurs et celles de leur futur employeur.

Mais comment savoir si une entreprise y correspond avant d’y travailler et de vivre quotidiennement sa culture d’entreprise ? Est-ce possible de l’évaluer selon des critères objectifs (et pas seulement via l’avis du cousin de la petite amie qui y a fait un stage) ? Une série de labels et de certifications promettent de distinguer les plus vertueuses. Sur 4 millions d’entreprise, seules quelques milliers émergent du lot. Nous avons voulu entendre la parole de quelques employeurs qui ont choisi de se faire certifier ou labelliser.

L’entreprise à mission

C’est, en France, le symbole le plus ambitieux en matière de responsabilité sociétale et environnementale. Mi-mai 2022, quelque 619 sociétés peuvent se revendiquer de cette qualité qui est inscrite dans leurs statuts.

Voir ici la liste des Entreprises à mission

Opposable juridiquement

« Il existe une jungle des labels permettant de mesurer la qualité d’un employeur, explique Alexandre Boucher, responsable commercial du cabinet de conseil et d’audit RSE de Saint Front (17 collaborateurs et 6 recrutements prévus en 2022) et elle-même entreprise à mission depuis 2020. J’estime, en tant que membre d’une société de conseils accompagnant les entreprises dans leur démarche RSE, que la qualité de société à mission est la plus engageante ». C’est donc celle dont un candidat peut avoir le plus confiance.

 

« La qualité d’entreprise à mission est opposable juridiquement, ajoute Anne Mollet, directrice générale de la communauté des entreprises à mission qui dispose de 300 membres dont 250 à mission. Cela signifie qu’un tiers considérant qu’une entreprise à mission déroge à ses statuts peut l’attaquer en justice ».

 

Jobs à impact

Pour les salariés, cela implique aussi qu’ils sont plus écoutés, plus sollicités que dans les autres entreprises. Cette qualité d’entreprise à mission a, par exemple, été obtenue en 2019 – elle est aussi certifiée B Corp - par l’entreprise agroalimentaire lyonnaise Ecotone (qui commercialise des marques comme Bjorg, Bonneterre ou Alter Eco). « Pourquoi venir travailler dans une entreprise à mission ? Pour servir un plus grand projet que le seul projet financier, démarre Emilie Lowenbach, la directrice RSE de cette société de 1600 collaborateurs en Europe dont 600 en France. Tout le monde chez nous a pour but de développer, par leur travail, la biodiversité. Tout le monde y contribue du logisticien qui abaissera l’empreinte carbone de nos transports au marketeur proposant un packaging le moins polluant possible ». Chez Ecotone, les salaires sont indexés sur la croissance du chiffre d’affaire et sur la contribution à la mission de l’entreprise qui est d’améliorer la biodiversité en proposant de la nourriture biologique et végétarienne.

 

Management bienveillant

« Ces entreprises à mission sortent aussi d’un management uniquement orienté par le profit, ajoute Adrien Moreira, directeur général de Bruce, un cabinet d’intérim en ligne de 100 salariés qui postule pour devenir entreprise à mission. Son but – vaste programme –, est de rendre le marché de l’emploi « plus juste et plus efficace ».

 

Cette qualité d’entreprise à mission a aussi été obtenu par l’assureur Maif en 2020 (8 000 salariés et 1 000 recrutements prévus en 2022). « Cela se traduit par une logique managériale plus équilibrée, plus bienveillante, estime Franck Carnero, le directeur mission et impact. Nous développons ainsi des actions pour améliorer les fins de carrière de nos salariés avec des accords de préretraite progressive assortie de primes si le futur retraité consacre une partie de sa préretraite à aider une association. On propose aussi à nos salariés de 9 à 10 semaines de congé payé ou des congés maternité plus importants que le minimum légal. Nous sommes aussi des pionniers en matière de télétravail que l’on a mis en place dès 2017. Mais le plus épanouissant n’est pas là. J’estime que notre politique visant à apporter des satisfactions aux sociétaires, aux salariés et à la société qui nous entoure contribue à la satisfaction des collaborateurs. Ils réfléchissent en permanence à développer un supplément d’âme quand ils prennent une décision. D’où des « clients plus sereins, des collaborateurs se sentant plus utile. Ils se sentent ainsi fiers d’appartenir à une entreprise qui a décidé, lors du confinement, de rembourser 100 millions d’euros aux sociétaires ayant souscrits une assurance voiture sans l’avoir utilisée pendant les mois de confinement ».

 

Redistribution des bénéfices

Ces entreprises redéfinissent aussi la question de la rémunération. « Chez nous, tous nos bénéfices sont réinvestis en recherche et développement et dans l’intéressement/participation de nos collaborateurs », précise Sophie Scantamburlo-Contreras, directrice générale de Scop3, une société montpelliéraine à mission mettant en relation des vendeurs d’équipements d’occasion (tables, chaise, cuisine, ordinateurs) et des clients (une sorte de Vinted des équipements d’entreprise). « Par ailleurs, ajoute-t-elle, nous avons ouvert 4 % de notre capital à nos salariés pour les fidéliser constituant un actionnariat salarial important ».

Le label B Corp

 

Le label B Corp est un autre symbole d’une entreprise souhaitant montrer son intérêt envers ses salariés.

L’entreprise « Too good to go » dont le but est de lutter contre le gaspillage alimentaire en commercialisant à des tiers les invendus (150 salariés et 50 recrutements de prévus en 2022) l’a obtenu en 2019. « Notre certification B Corp nous pousse à réfléchir au bien-être de nos salariés, explique Marianne Urmès, la DRH France. Cette certification prend du temps. Il faut répondre à 200 questions. Pour un candidat, c’est un gage de sérieux, d’engagement très fort de l’employeur. On œuvre tous les jours à améliorer l’état de notre planète. C’est source de sens ». Mais la certification B Corp impose aussi à prendre des engagements au niveau de la gouvernance, des collaborateurs, des clients, de l’environnement… Ainsi, chez « Too good to go », l’employeur enquête tous les 6 mois sur les attentes des collaborateurs. Les questions de télétravail sont discutées collectivement. Ils ont aujourd’hui la possibilité d’en faire 3 jours par semaine avec une semaine en tout télétravail tous les trimestres. Un forfait mobilité durable de 400 euros par an est aussi accordé à tous les salariés pour qu’ils puissent se déplacer écologiquement (location de vélos par exemple).

L’un des intérêts de ce label, c’est son impact sur les recrutements. Ce que confirme Thomas Lemasle, le jeune dirigeant de Oé, un négoce en vin lyonnais qui promet de faire « le bien par le bon », certifié B Corp depuis septembre 2017 (et re-certifié depuis) : « Nous n’avons aucun problème pour recruter. Nos candidats postulent car nous avons d’autres missions que nos seules rentrées financières. Nous donnons du sens à notre travail. Si une entreprise veut attirer des candidats en ces temps de pénurie de main-d’œuvre, je lui conseille d’être vertueuse ». Et de le prouver.

 

Les autres labels

Il existe aussi de très nombreux autres labels comme « Happy at work », « Great place to work » ou « Positive work place ».

 

Positive workplace créé en 2019

 « C’est un label RSE, explique Charles-Henri Margnat, le fondateur du label « positive workplace », créé en 2019 (90 entreprises labellisées).

 

Cet index a été créé pour éviter le « green washing » et repérer les entreprises démontrant un réel engagement de l’entreprise avec une enquête envoyée aux salariés, aux clients et aux fournisseurs.

 

« Pour un candidat, poursuit Charles-Henri Margnat, ce label signifie qu’il postule pour une entreprise qui privilégie le dialogue en entreprise. C’est une sorte de garde-fou d’une qualité de vie au travail et la garantie que son employeur prône, par exemple, un bon partage des richesses. C’est un point fort… Dans le cadre de notre labellisation, nous demandons à toutes les entreprises de calculer par exemple leur rapport d’équité. Il s’agit du ratio entre le salaire médian de l’entreprise et la rémunération la plus élevée. C’est une obligation en Grande-Bretagne. Nous préconisons qu’il demeure en dessus de 10. Cela signifie que le dirigeant ne doit pas gagner plus de 10 fois le salaire médian de son entreprise… Ce sont des points que nous expliquons à la direction lors du compte-rendu de notre audit ».

 

Great Place to Work

D’autres labels coexistent. « Nous sommes labellisés Great place to work, conclut Didier Zeitoun, le président de Magellan Partners, un cabinet de conseils en organisation de 1800 salariés souhaitant recruter 550 consultants en 2022. Cela nous donne une visibilité. On mesure aussi, en interne, si les collaborateurs se sentent bien chez nous. Et pour les candidats, c’est l’assurance de travailler dans une entreprise qui promeut ses salariés, qui leur permet de se reconvertir, qui engage des jeunes via l’alternance. Tout le monde ne fait pas l’effort de décrocher ce type de label ».

Liste des Sociétés à mission détenant aussi le label B Corp 

 

  • Agence Declic
  • Atlas Responsible Investors
  • Birdeo
  • BL évolution
  • CAMIF
  • Canovia
  • Citizen Capital Partenaires
  • Comerso
  • CONNEXING
  • Eoden
  • EUTOPIA GESTION
  • FAGUO
  • FREY
  • Gifts for Change
  • Good Goût
  • GREEN-SANTE
  • HAATCH
  • Kea & Partners
  • Les Filles et les Garçons de la Tech
  • Link Up Factory
  • Ma Bonne Etoile (marques SQUIZ et FILLGOOD)
  • Mirova
  • MySezame
  • norsys
  • Nuova Vista
  • OpenClassrooms SAS
  • PIXELIS
  • REDMAN
  • SIDIESE
  • Spygen
  • Sweep
  • Sycomore Asset Management
  • Tenzing
  • TOOVALU
  • UTOPIES
  • WeNow
Gwenole Guiomard
Gwenole Guiomard

Je suis journaliste spécialisé dans les questions de formation et d’emploi. L’un ne doit pas aller sans l’autre et la compréhension des deux permet de s’orienter au mieux. Je rédige aussi, tous les deux ans, le Guide des professionnels du recrutement. Je suis aussi passionné d’histoire et amoureux des routes de la soie.

Vous aimerez aussi :