
Une alerte du FBI américain
Après celle d’Europol, une note du FBI n'en fini pas d'affoler les recruteurs, mais aussi certains candidats. Le 28 juin dernier, l’agence fédérale américaine mettait en garde contre une augmentation des plaintes pour usage de « deepfakes » lors des entretiens d’embauche menés à distance. Les technologies ne connaissant pas les frontières, il n’y a aucune raison pour que la France soit épargnée. Depuis l’apparition de cette technique de trucage, de nombreuses personnalités publiques en ont été victimes. Désormais, les deepfakes peuvent toucher tout un chacun.
Deepfakes : définition
Ce mot valise désigne une technique de trucage numérique élaborée grâce à l’intelligence artificielle. Elle permet de créer des images ou des voix ultra réalistes de personnes réelles en les synthétisant numériquement. Ces videos peuvent faire dire n'importe quoi à n'importe qui et duper tout le monde.
Si certaines deepfakes peuvent être juste divertissantes, d’autres sont plutôt destinées à nuire aux personnes usurpées. Parmi les “deepfakes” de célébrités, celles d’Obama, de Volodymyr Zelensky ou de Mark Zuckerberg étaient toutes destinées à nuire à leur double réel en circulant sur les réseaux sociaux. Selon l'éditeur américain Sensity, le nombre de vidéos deepfakes double tous les six mois depuis 2019, où il en décomptait 15 000.
Les deepfakes en entretien, comment ça marche ?
Pour ceux qui manipulent ces deepfakes, les entretiens en visio sont pain béni. Les recruteurs pressés de "closer" aussi, ceux qui négligent les vérifications d'identité parce qu'ils ne veulent pas voir le candidat leur échapper...
Les principales victimes de ces imposteurs sont les entreprises qui ont intégralement digitalisé leur process d’embauche, y compris les entretiens. Pour duper les employeurs, les malfaiteurs prennent une fausse identité avant de se présenter aux entretiens en visioconférence. Ils utilisent à la fois des techno de deepfakes et des informations d'identification personnelles qu’ils ont volées aux vrais experts du job auquel ils postulent.
Plus vous êtes présents sur le Web (surtout via des video, qui leur facilitent la tâche), plus vous courrez le risque que ces imposteurs usurpent votre identité. En effet, il leur est plus facile de créer un programme de simulation basée sur une video que sur des photos statiques de vous. Idem, il est plus simple de cloner votre voix s’il existe déjà des enregistrements audio. (lire ici l'expérience de Patrick Hillman en août dernier, un exemple des nuisances des deepfakes dans le business).
Sans surprise, aucune entreprise n'a, pour le moment, pris la parole pour avouer qu'elle avait été victime d'imposteurs en entretien. Mais la communauté de recruteurs de profils IT est sur les dents.
« Je saurai reconnaître un faux candidat, assure Hakim*, consultant en recrutement de datascientists, des profils hyper convoités et très pénuriques en ce moment. Les mouvements des lèvres sont parfois décalés par rapport au son, il y a parfois des bugs dans l'image, de mauvais raccords au niveau du cou ou la personne ne cligne jamais des yeux par exemple. » Pourtant, les alertes d'Europol et du FBI sont formelles : quand les plaintes sont déposées, les escrocs ont déjà sévi sans être détectés à temps.
Heureusement, des logiciels de détection automatique de deepfakes commencent à être proposés par les Gafam afin de se protéger de ces techno toxiques
Pourquoi se donner autant de mal pour être recruté ?
Usurper votre identité en entretien d’embauche permet à ces malfrats de décrocher des postes afin d'inflitrer les entreprises pour les voler.
Selon le FBI, les candidats usurpateurs visent le plus souvent "des postes techniques que le marché peine à pourvoir, en particulier dans le dans le développement logiciel et l’administration de bases de données".
Une fois recrutés, ils font main basse sur les données sensibles, les bases de données clients, les secrets industriels ou toute autres données stratégiques susceptibles de nuire à l'entreprise dupée.
Exemples de deepfakes
La plus célèbre (2018) : comment faire dire n'importe quoi à Barak Obama
* le prénom a été modifié à la demande du recruteur qui préfère préserver son anonymat.
Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.