
Un quart des recrutements de cadre passe par des intermédiaires, cabinet de « recrutement » ou dédiés à la chasse de tête. Pour comprendre sur quels critères les cols blancs sont sélectionnés, le cabinet de conseil OasYs vient de publier une étude menée auprès de 130 cabinets en partenariat avec la 4ᵉ édition du « Guide des professionnels du recrutement » *.
Parmi ces 6 affirmations, saurez-vous distinguer le vrai du faux ?
Explications et décryptage avec Isabelle Mounier-Kuhn, associée et directrice des practices chez OasYs.
L’expérience métier compte de moins en moins
Faux. C’est même l’un des premiers critères pour 98 % des clients des recruteurs, à égalité avec la personnalité du candidat. C’est un critère plus important que l’expertise secteur (83 %). D’ailleurs 86 % des consultants interrogés estiment qu’il est très difficile de faire changer d’avis un client sur le critère d’expertise métier contre 63 % sur le secteur d’activité.

L’explication d’Isabelle Mounier-Kuhn : « Les clients ont besoin d’être rassurés sur les compétences du candidat notamment sur les fonctions techniques et informatiques, ils cherchent donc souvent des clones au niveau des compétences. En revanche, ils sont plus ouverts sur l’expérience du secteur car les compétences sont transposables d’un univers à l’autre. »

Les demandes de profils atypiques augmentent
Faux. 72 % des chasseurs interrogés estiment que leurs clients leur demandent un clone dans plus de 2 missions sur 4. C’est-à-dire un candidat ayant les mêmes caractéristiques que son prédécesseur (formation, métier, secteur). C’est un peu moins vrai dans les chasses de cadres dirigeants (67 %) où les critères de personnalité, de valeurs et de leadership prédominent.
Concernant les profils atypiques, 89 % des chasseurs avouent présenter « rarement » ou « jamais » ce type de profils. Si vous envisagez une reconversion en milieu de carrière ou si vous voulez passer du public au privé, ne comptez pas sur les chasseurs…
L’explication d’Isabelle Mounier-Kuhn : « Le plus souvent, les profils atypiques trouvent grâce à leur réseau. C’est très rare de prendre des reconvertis car les clients cherchent des profils qui ont déjà exercé leur métier et sont opérationnels rapidement. Sauf pour certains métiers comme le développement commercial par exemple où la pénurie de candidats est forte. Si la personne montre qu’elle est motivée, on va lui faire confiance. »

A partir de 45 ans, on est de moins en moins chassé
Vrai. 75 % des chasseurs de tête interrogés estiment que, pour leur client, l’âge peut être un critère discriminant, alors qu’en 2014 ils étaient 67 %. Et plus un candidat avance en âge, moins il est présenté à un client. Au cours des dix dernières missions, 53 % des consultants interrogés dans l’étude ont présenté 6 candidats entre 40 et 45 ans, 23 % de candidats entre 45 et 50 ans et seulement 11 % de candidats de plus de 50 ans. En majorité les candidats placés ont entre 40 et 45 ans (64 %). Mais petite lueur d’espoir : 67 % des chasseurs de tête estiment leur client sont plus ouverts qu’auparavant à la présentation de candidat de plus + de 45 ans.

L’explication d’Isabelle Mounier-Kuhn : « La cible privilégiée des chasseurs de tête reste le candidat entre 38 et 45 ans. Sauf pour les dirigeants, où les cabinets vont jusqu’à 60 ans pour trouver une grande expertise.
Concernant le recrutement de senior, il y a un grand paradoxe : se plus en plus de chasseurs présentent des seniors de plus de 50 ans à leur client, mais ils n’arrivent pas à franchir le cap. Les entreprises ont peur que ces seniors leur coûtent cher ou qu’ils n’aient pas mis à jour leurs compétences. Mais les choses sont en train de changer. »
Lire aussi : Ils ont trouvé un CDI à plus de 60 ans.
Les candidats au chômage font peur
Faux. 46 % des clients estiment que ça n’a aucune importance que le candidat soit sans

activité. En revanche, à partir de 12 mois de chômage, leur regard change et ils sont 58 % à avoir des préjugés sur le candidat. Pour les cadres qui se positionnent sur les missions de transition, une période d’inactivité peut devenir un atout, car ils sont disponibles immédiatement.
L’explication d’Isabelle Mounier-Kuhn : « C’est un changement radical par rapport à l’étude de
2007. Aujourd’hui les cabinets n’hésitent plus à proposer ce genre de profil à leurs clients. Avec la crise de 2008, beaucoup de cadres qui recrutent ou en poste en entreprise ont vécu des périodes d’inactivité et cela a modifié leur regard sur le chômage. »
Maîtriser une langue étrangère, c’est un critère indispensable pour être chassé
Vrai. Selon l’étude, la maîtrise d’une langue étrangère est un critère indispensable pour 94 % des entreprises qui recrutent. 69 % d’entre elles pensent qu’une expérience internationale est un atout.
L’explication d’Isabelle Mounier-Kuhn : « La compétence linguistique a toujours été recherchée et présente depuis 10 ans dans nos études (89 % en 2011 et 90 % en 2014). La majorité des sociétés qui recrutent via des chasseurs de têtes sont des sociétés internationales. La pratique des langues est donc indispensable. »
On chasse en priorité les profils qui ont des compétences digitales
Faux. Seul 37 % des clients cherchent des candidats qui ont des compétences digitales.
L’explication d’Isabelle Mounier-Kuhn : « Lors de la précédente étude, le taux était de 0 %, il a beaucoup évolué mais reste bas. Première explication : toutes les fonctions ne se sont pas liées au digital.»
Le diplôme est toujours aussi important
Vrai et Faux. Faux car la sélection sur le sacro-saint diplôme vacille. La preuve, 62 % des consultants estiment qu’ils ont une marge de manœuvre pour faire changer d’avis leur client concernant la formation initiale. Mais il est à noter que la formation complémentaire devient un critère important pour 75 %des clients.
L’explication d’Isabelle Mounier-Kuhn : « Les chasseurs sont moins attentifs à la formation initiale car elle s’est diversifiée notamment avec des cursus de plus en plus internationaux. Il y a moins ce benchmark de « formation idéale » dans laquelle le candidat doit absolument rentrer. La formation continue compte de plus en plus pour les entreprises qui recrutent car elles sont sensibles aux candidats qui ont mis à jour leurs compétences et qui veulent continuer d’évoluer. »

Etude réalisée entre septembre 2017 et janvier 2018 en partenariat avec « le Guide des professionnels du recrutement », de Gwenole Guiomar, auprès de 130 cabinets représentatifs. Méthode utilisée : l’entretien téléphonique ou en entretien face à face d’une durée de 30 à 45 minutes.
