Bien-être au travail : ce que les salariés attendent vraiment et ce qu’ils n'aiment pas

Sylvie Laidet-Ratier

Une chaise de bureau confortable, du flex-office réservable, un bureau fermé… Le dernier baromètre Actineo révèle les attentes secrètes des salariés français en matière de qualité de vie au bureau. Et l’on découvre que les employeurs oublient parfois les besoins les plus basiques. Conséquence : 43 % des cadres ressentent le besoin de s’arrêter alors qu’ils ne sont pas malades.
Bien-être au travail : ce que les salariés attendent vraiment et ce qu’ils n'aiment pas

Le dernier baromètre Actinéo*, publié tous les deux ans depuis dix ans, révèle les tops et les flops de la qualité de vie au travail. Pour la première fois, il prend en compte le travail en dehors du bureau, dans des lieux de coworking devenus des bureaux délocalisés.

 

Top : un bureau individuel fermé

C’est l’un des résultats les plus étonnants du dernier baromètre Actinéo*. Alors que la tendance est au management participatif, à l’agilité, au mode « projet », qui nécessitent de communiquer dans des espaces ouverts, 59 % des Français rêvent de bosser dans … un bureau fermé individuel. Bref, de quitter le fameux open space afin de pouvoir se concentrer tranquillou dans un bureau rien qu’à eux. En cause ? Des maux bien connus des habitués des open space : le bruit ambiant, le manque de confidentialité, le passage permanent, etc…

 

Top : un siège de travail ergonomique pour tous

On aurait pu croire que la plupart des entreprises ont investi dans des sièges ergonomiques. Eh bien non :  seuls 39 % des sondés déclarent en être équipés (vs 59 % des cadres dirigeants). Et pourtant, il semblerait que disposer d’un siège ergonomique réglable en fonction de son anatomie et de sa façon de travailler, dope la qualité de vie au travail. Un équipement de base qui permet aussi de prévenir les maladies professionnelles comme les troubles musculo-squelettiques. Alors, on jette les vieilles chaises bancales, et on demande à sa DRH d’investir ?

 

Top : du flex office réservable

Ce n’est pas tant le flex office –le fait de ne pas avoir de bureau attribué –  qui rebute les salariés mais le fait de ne pas pouvoir réserver un bureau où se poser avant d’arriver sur son lieu de travail. Donc un parc de bureaux connectés à une application recensant les places disponibles et donnant la possibilité de booker son espace, serait largement apprécié. Vive les smart building dont on nous parle beaucoup mais qui visiblement ne tiennent pas encore toutes leurs promesses.

 

Top : pouvoir choisir son lieu de travail

Certes la priorité des sondés par Actinéo est de pouvoir choisir plus librement l’aménagement de leur temps de travail. Mais la flexibilité spatiale fait aussi de plus en plus partie des attentes. Ils sont ainsi 25 % (+5 points par rapport à 2017) à souhaiter « pouvoir choisir plus librement leur lieu de travail selon leurs besoins ». Ce souhait de « nomadisme » atteint même 35 % chez les millenials. Feront-ils réellement bouger les lignes ?

 

Flop : le flex office traditionnel

Avec le flex office, le principe est simple : c’est premier arrivé, premier servi. En résumé, le matin, en débarquant au boulot, vous n’avez pas de bureau attitré et vous vous installez où il y a de la place. 14 % des personnes interrogées par Actinéo pratiquent le flex office. Ce taux progresse de 8 % points (eh oui) en 2 ans. 92 % des actifs en flex office n’ont visiblement pas la possibilité de réserver leur place avant d’arriver au bureau. Et c’est là que le bât blesse et que les Français se crispent. « Même en flex office, les gens ont envie de recréer des petites communautés de travail. Or sans réservation, c’est impossible. Les smart building peuvent pourtant aujourd’hui répondre à ces demandes », souligne Alain d’Iribarne, chercheur au CNRS et président du conseil scientifique d’Actinéo.

 

Flop : les espaces de coworking, un enthousiasme pas toujours partagé

C’est fait. Cette année plus de la moitié des actifs interrogés par Actinéo (53% soit + 5 points par rapport à 2017) se déclarent « travailleurs nomades ». Autrement dit, bossent au moins une fois par semaine dans les cafés, hôtels, halls de gare, jardins publics et autres espaces de coworking. Et là encore, c’est loin d’être le pays des bisounours. Que les domiciles, cafés, hôtels et autres gares ne soient pas adaptés au travail, passe encore. Ce n’est pas leur vocation première. Mais que les espaces de coworking, justement dédiés au boulot, ne trouvent pas grâce aux yeux des salariés, est inquiétant. En cause, le niveau de bruit, la température et l’ergonomie des sièges. C’est vrai que certains espaces de coworking se rapprochent davantage de décors factices dignes des grandes enseignes de distribution de meubles en kit, avec en guise de fauteuils, des chaises de cuisine bien raides. Bref, le design scandinave, c’est bien pour la maison mais pas dans des espaces de travail (même si cela contribue parfois à embellir le lieu).

 

La moitié des salariés sous stress et 32% au point de s’arrêter sans être malades

Faut-il applaudir des deux mains à la lecture des chiffres du dernier Observatoire Actinéo* sur l’évolution des modes de vie des Français au travail ? Pas si vite : si 87 % des actifs interrogés (+7 points en 2 ans) se déclarent « satisfaits de leur qualité de vie au travail », seuls 24 % vont jusqu’à se dire « très satisfaits ». Et d’autres indicateurs viennent gâcher la fête :

  •  « Se sentir « stressé dans son travail » est le lot de près d’un actif sur deux.
  •  42 % se prennent parfois à penser que « leur travail manque de sens », note-t-on chez Actinéo.
  • Plus inquiétant encore, 37 % des personnes interrogées trouvent que leur employeur ne se préoccupe pas de leur bien-être au travail.
  • Dans les grandes entreprises (1000 salariés et plus), ce taux de sceptiques monte même à 47%.

« Or, ce sont ces grandes entreprise- qui sont le plus souvent labellisées sur le sujet de la qualité de vie au travail. Quel intérêt y a t-il à se faire labelliser alors que l’on a les plus mauvaises performances du point de vue des collaborateurs », s’interroge Alain d’Iribarne, chercheur au CNRS et président du conseil scientifique d’Actinéo. Conséquence de cette insatisfaction au travail, 32 % des répondants ressentent le besoin de s’arrêter alors qu’ils ne sont pas malades. Ce chiffre grimpe même à 43 % chez les cadres.

 

* Enquête en ligne administrée du 4 au 15 février 2019 auprès de 1218 actifs occupés français travaillant dans un bureau.

Sylvie Laidet-Ratier
Sylvie Laidet-Ratier

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.

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