10,5% : un taux de chômage en trompe-l'oeil ?

Michel Holtz

Ce devrait pourtant être facile. Calculer le nombre de chômeurs en France devrait relever de la statistique la plus basique. Suffit de les compter. Sauf que pas vraiment. Entre les chômeurs inscrits à Pôle emploi ou non, ceux qui ont travaillé un peu ou pas du tout, le flou et le doute s’installent. Alors que le ministère du Travail publie chaque mois ses propres chiffres, qui concernent uniquement les inscrits à Pôle emploi, l’Insee fait le point de son côté chaque trimestre en publiant le taux de chômage au sens du BIT*. Or sa dernière livraison d’hier aboutit à un taux pour la France métropolitaine de 10,5% au second trimestre de cette année (10,9% pour la France et les Dom). Soit une hausse limitée à 0,1% par rapport au premier trimestre, qui avait connu une hausse de  0,3 %. Sur un an, l'augmentation du taux de chômage est de 0,7 point, selon l'Insee. Bonne nouvelle ?

Hausse limitée à 0.1% au second trimestre

Au cours de la soirée d’hier, Michel Sapin s’est fendu d’un communiqué affirmant que « la situation du marché du travail s’améliore progressivement ». Sauf que le ralentissement de la baisse observé est aussi lié à une modification du sondage de l’Insee. Explications. Pour tenter de mettre l’Union à l’unisson, chaque État doit dorénavant appliquer les mêmes règles. Et poser les mêmes questions aux sondés. Et ces règles ont été modifiées il y a quelques mois. Un enquêteur de l'Insee ne vous demandera plus, par exemple, si vous étiez "à la recherche d'un emploi, même à temps partiel ou occasionnel ", mais si vous étiez "à la recherche d'un emploi" tout court. « L’institut fait parfaitement le job, insiste néanmoins Eric Heyer, économiste de l’OFCE (observatoire français de conjoncture économique). On est largement meilleur que les Allemands. On est même parmi les meilleurs Européens dans ce domaine. »

Taux de chômage des jeunes en baisse

Il ne faudrait donc « pas prendre ces taux au pied de la lettre, mais comme des indices permettant de mesurer des évolutions », note Eric Heyer. Et pour limiter la confusion, le nouveau taux de chômage publié par l'Insee a été corrigé pour permettre la comparaison avec les taux précédents, calculés selon l'ancien questionnaire. Ainsi, "une fois intégrés les effets des modifications du questionnaire, le taux de chômage s’établit à 10,2 % de la population active au deuxième trimestre 2013 après 10,1 % au premier trimestre. De nouvelles séries longues rétropolées cohérentes avec l’enquête Emploi rénovée seront produites par l’Insee et publiées en mars 2014, avec la publication des résultats du quatrième trimestre 2013", rapporte l'Insee.

Pour Eric Heyer, une amélioration réelle reste à souligner. Celle du chômage des jeunes de moins de 25 ans, en baisse de 4% au cours du premier semestre. L’économiste y voit cependant « un effet des contrats d’avenir ». 52 000 jobs déjà signés… qui ne réservent pas forcément d’avenir.

* L’enquête a été réalisée sur un échantillon de 90 000 personnes âgées de 15 à 64 ans. Un chômeur au sens du Bureau international du travail (BIT) est une personne en âge de travailler (c’est-à-dire ayant 15 ans ou plus) qui n’a pas travaillé, ne serait-ce qu’une heure, au cours de la semaine donnée, est disponible pour travailler dans les deux semaines et a entrepris des démarches actives de recherche d’emploi dans le mois précédent (ou a trouvé un emploi qui commence dans les trois mois).

Michel Holtz © Cadremploi.fr

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