Du burn-out au born-out : un spectacle salutaire qui remet le travail à sa place

Sylvia Di Pasquale

Elle a fait un burn-out sévère mais s’en est sortie. Seule en scène dans sa petite robe rouge, Christèle Perrot raconte non sans gaieté comment son syndrome d’épuisement professionnel s’est transformé en dépression pour renaître en changement de vie libératoire. Comment son « burn-out » est devenu « born-out ». Nous l’avons rencontrée.
Du burn-out au born-out : un spectacle salutaire qui remet le travail à sa place

Fini le job dans la finance qui la rendait malheureuse, elle est désormais slasheuse. Chef d’entreprise et artiste à la fois, deux vies en même temps, deux passions qui correspondent enfin à ses envies. Entre deux missions de consulting dans le cabinet qu’elle a créé, elle enfile sa petite robe rouge et monte sur les planches « pour traiter d’un sujet grave avec humour et légèreté ». Pour raconter sa plongée en eaux troubles puis sa renaissance après un burn-out. Son seule-en-scène est désormais rodé – elle en est à sa cinquième représentation depuis 1 an. Les spectateurs en redemandent et apprécient ce spectacle de la vérité. C’est même ce qui fait l’originalité de cet ovni d’1h20, à mi chemin entre spectacle et conférence,  qui n’a pas vraiment d’équivalent au théâtre.

 

Qui est Christèle Perrot ?

Pourtant, les planches n’étaient pas une vocation enfouie. Pas une envie de petite fille, juste une succession d’accrocs. « Car ma vie semblait toute tracée » se souvient celle qui, après un Master 2 en marchés financiers à l’Université Paris-Dauphine, trouve un travail dans une grande banque d’affaires réputée. Elle y restera douze ans. Un parcours fait de vente de produits financiers compliqués, d’un mariage à 25 ans, de trois enfants en deux ans et demi (dont des jumelles). « Et puis, en 2001, ça a commencé à se dérégler ». Un petit rien, d’abord.

Elle passe ses vacances dans un lieu qu’elle a « toujours trouvé magique » mais cette année-là, elle s’y ennuie. Pas de maladie mais du stress. Ne rien dire et faire semblant : une règle qu’elle s’impose alors. Avant de tomber plus sérieusement malade et de mettre sa santé en danger. « Pour la première fois de ma vie, j’expérimente alors mes limites ». Psy. Prozac : le duo classique lui permet de tenir,  mais elle rechute régulièrement dès que le traitement est interrompu. Jusqu’en 2004. Cette année là, la banque lui propose un plan de départ. Elle saute sur l’occasion et crée sa boite de consulting un an plus tard. Axcime fait du conseil en relations humaines et Christèle Perrot se jette à corps perdu dans son nouveau rôle. Jusqu’en 2009. Son mari la quitte. Elle replonge, continue, en mode survie. Jusqu’à ce jour de 2012. « Je me suis offert le plus cadeau du monde : un an sans travailler, prendre le temps d’aimer ceux avec qui je ne prenais plus le temps d’être. »

 

Comment est né ce spectacle-conférence ?

Une année sabbatique permet de se consacrer aux autres mais aussi à soi-même. Pour Christèle Perrot, elle a aussi débouché sur un livre, publié en 2016 Equi-vies, du burn-out à la performanceUne porte qui lui en a ouvert une autre, celle des conférences TEDx. La session Alsacienne des speechs chronométrés l’approche en 2017 pour lui proposer de s’exprimer sur le thème de la limite. Elle fonce et son message fait mouche, auprès des 500 spectateurs réunis dans la salle mais surtout auprès des 100 000 internautes qui ont regardé sa vidéo TEDx.

Son concept de renaissance après le burn-out, ce « born-out » –  une marque qu’elle a déposée – touche les gens : « ils me disent que c’est un peu leur vie que je raconte. A l’antidépresseur près… » Des retours qui lui ont donné envie de monter ce spectacle. La première aura lieu en mars 2018 à Paris.  Depuis, elle le joue de temps en temps sur scène mais aussi lors de conventions de dirigeants. Et bientôt lors du prochain Festival d’Avignon.

L’entreprise n’est pas seule responsable du burnout

Aujourd’hui, elle conjugue. Son cabinet, son livre, ses spectacles creusent, défrichent et expliquent tous ces maux. Burn-out, bore-out, brown-out, et maintenant born-out.

>> Lire aussi : Que se cache-t-il derrière ce nouveau syndrome du brown-out  

« Pour moi, ces termes soulèvent des questions que beaucoup d’hommes et de femmes se posent sur le sens, le plaisir au travail, l’équilibre des vies pro et perso dans une société qui a énormément accéléré. « Mon spectacle cherche à donner des clés pour se poser les bonnes questions. » Et avec sa boite, Axcime, elle s’occupe de « situations relationnelles compliquées » dans les entreprises. De son expérience, elle dresse un drôle de constat : elle estime que « l’entreprise n’est pas la seule fautive en cas de burn-out d’un collaborateur ». Et elle s’en explique : « Je pense qu’il y a une part de responsabilité de l’individu. S’il se dit que seule l’entreprise est coupable, il va replonger éternellement même s’il change de boîte. Car il faut qu’il apprenne à reconnaître qu’il a une prédisposition au sur-engagement dans le travail, au perfectionnisme. »

En finir avec le déni

En entreprise, sur scène, « et dans les cafés après les spectacles où les gens viennent me rencontrer »,Christèle Perrot démystifie, décrypte, livre les faits et délivre son message principal : en finir avec le déni. Celui qui est à l’origine de tous les burn-out. Celui qui ne permet pas de voir que l’on s’est trompé de route.  

Christèle, vous vous faites chier dans votre vie.

C’est la première phrase du spectacle, celle qu’a prononcée son médecin, lors du premier signe de sa maladie, elle avait 31 ans.  Aujourd’hui, ses spectateurs ont tous les âges. « Même des jeunes diplômés viennent me voir. Ils expriment une pression qui, pour eux, commence dès le bac, dès Parcours Sup et les 5 ans d’études qui déterminent ce qu’ils vont faire toute leur vie. » Eux, comme leurs aînés, ont besoin d’arrêter la course folle, de faire une pause. Celle qu’ils s’offre à l’Appolo Théâtre dure le temps d’une soirée avec Christèle Perrot qui espère que ce petit moment débouchera pour eux sur un grand changement.

>> Lire aussi sur Le Figaro : Qu’appelle-t-on vraiment «burn-out» ou «syndrome d’épuisement professionnel» ?

Quand et où ?

  • Samedi 16 mars à 20 heures à l'Apollo Théâtre - 18, rue du Faubourg du Temple - 75011 Paris
  • Du 5 au 28 juillet pendant le festival d'Avignon à 15h au Théâtre de l’Observance;

 

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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