Emploi : les secteurs qui n’attendent pas le 11 mai pour reprendre leur activité

Sylvia Di Pasquale

CORONAVIRUS - Alors que l'épidémie de covid-19 sévit encore, l’heure n’est pas encore au déconfinement de la population. Mais celle de certains salariés a sonné. Certaines entreprises n’ont jamais fermé, d’autres ont déjà rouvert quand d’autres encore ne font qu’y songer. Même celles qui ne sont pas jugées essentielles tentent de continuer leur activité, ou de la relancer avant le début annoncé du déconfinement, le 11 mai prochain. De l’aéronautique au BTP en passant par l’automobile, la reprise se fait partiellement, en toute sécurité, totalement, en télétravail, ou anarchiquement. Selon que l’on soit une TPE du bâtiment ou une marque de voiture, les conditions économiques et sanitaires ne sont pas les mêmes. Tour d’horizon des secteurs qui n’attendent pas la fin du confinement pour repartir.
Emploi : les secteurs qui n’attendent pas le 11 mai pour reprendre leur activité

Le seuil des 9 millions de salariés en chômage partiel est franchi et la récession promet d’être historique. Pour tenter d’atténuer la pression économique, de plus en plus d’entreprises, de première nécessité ou non, ont décidé de ne pas attendre le 11 mai pour reprendre leur activité ou l’accélérer, date annoncée par le gouvernement pour le début du déconfinement.

 

Aéronautique et espace : une reprise en basse fréquence

Le sort de l’aéronautique est lié aux commandes que les compagnies aériennes passent à ce secteur. Or, la paralysie du trafic mondial, réduit de 80% ces dernières semaines, va peser lourdement sur leurs investissements. Airbus, a néanmoins rouvert ses unités françaises après 4 journées de fermeture seulement. Mais les 46 000 personnes que comptent ses unités de production françaises n’ont pas toutes retrouvé le chemin des ateliers. Loin de là.  Seuls 5 à 10% de celles et ceux qui travaillaient à Toulouse et Colomiers sont en activité actuellement. Les autres étaient jusqu’à présent en congés, mais depuis le 17 avril, leur DRH, Thierry Baril, les a placés en chômage partiel jusqu’au 17 mai prochain, soit une semaine après le déconfinement probable annoncé.

Plus haut dans le ciel, chez ArianeGroup, les unités de production qui assemblent les lanceurs devaient quant à eux reprendre le travail dès le 30 mars dernier. Mais les syndicats ont demandé un report de la reprise. Résultat : seulement 10% des salariés volontaires ont effectivement repris la direction des usines qui assemblent les lanceurs.

 

Automobile : une reprise en pente douce

Chez les constructeurs français, PSA comme Renault, la volonté de faire tourner les usines s’est assez rapidement manifestée après le 16 mars.

Peugeot-Citroën, qui avait fermé ses unités de production dès l’annonce du confinement a souhaité les voir redémarrer au tout début du mois d’avril. Mais les syndicats s’y sont opposés et les dirigeants ont revu leur copie. C’est chose faite, les mesures sanitaires sont prises et la reprise se fait progressivement.

Chez Renault, l’autre constructeur français, la leçon de la concurrence a été bien apprise et la reprise, décidée plus tard, se fera progressivement, à partir du 22 avril, dans les usines françaises, après négociations avec les partenaires sociaux. Chez le seul importateur fabriquant ses autos en France, le retour à l’usine s’effectuera le 21 avril. Mais Toyota, puisque c’est de lui qu’il s’agit, va jouer la prudence, en ne faisant travailler que la moitié de ses effectifs, afin de respecter les protocoles de sécurité sanitaires. Résultat : seules 1 500 voitures sortiront de l’usine d’Onnaing. C’est le nombre d’autos habituellement assemblées dans cette usine chaque jour.

Michelin de son côté signale la reprise de ses activités en France et en Europe, de façon « graduelle » car le redémarrage d’activités industrielles comme la fabrication de pneus « prend du temps ».

 

BTP : une reprise frémissante

Le président de la FNTP (Fédération nationale des travaux publics) l’expliquait récemment : « La part d'entreprises en arrêt total est passée de 80% le 26 mars à 70% au 10 avril ». On est loin du compte de la grande reprise. Mais la FNTP réunit surtout les grandes entreprises du secteur (Eiffage Colas, Vinci, etc.) dont les chantiers dépendent souvent des collectivités qui ne sont pas forcément enclines à une reprise avant le 11 mai, date plus ou moins officielle du déconfinement. Lire aussi >> Dans le BTP, la timide reprise des chantiers (Le Figaro)

En revanche, du côté des PME du bâtiment, représentés par la Capeb (confédération des artisans et de petites entreprises du bâtiment), les résultats sont parfois totalement inverses de ceux de la FNTB. Dans l’Orne, ces petites boites sont au travail, pour 75% d’entre elles, selon le représentant local de la Confédération. Entre des artisans souvent seuls, ou accompagnés d’un ou deux salariés et les grands groupes, la nécessité de réaliser un chiffre d’affaires « quoi qu’il en coûte » et les représentations syndicales désireuses de protection sanitaires sont évidemment très différentes.

Informatique : une reprise lente sans arrêt brutal

Si l’automobile le BTP et l’aéronautique ne peuvent évidemment pas produire en télétravail, il n’en va pas de même des entreprises du numériques et principalement des ESN (Entreprises de services du numérique). Un sondage, mené par le réseau Inop’s auprès de sa communauté (800 PME et 35000 indépendants), les a interrogées après quinze jours de confinement. Il en ressort des scores plutôt optimistes. Ainsi, 69% des missions en cours étaient maintenues et opérés par des consultants en télétravail pour 72% d’entre eux. Évidemment, le chômage partiel touche le secteur comme les autres, mais beaucoup moins que les autres, puisque seulement 21% des effectifs y étaient contraints.

Plus récemment, un autre sondage mené par le syndicat patronal du secteur (Syntec numérique) le 10 avril dernier auprès de 166 adhérents, estimait à 27;9% le taux moyen de salariés au chômage partiel. Pour autant, ces ESN ne voient pas l'avenir en rose : 74,1% de sondés anticipent déjà une baisse de leur chiffre d’affaires prévisionnel sur le deuxième trimestre  2020,  en  moyenne  de -22,9%. De plus, 1 chef d’entreprise sur 2 pense que la reprise aura lieu sur plusieurs mois, entre septembre et décembre 2020. Pourquoi un tel pessimisme ? Les nouveaux projets ne se bousculent pas dans le carnet de commande.

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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