Et vous, avez-vous un side project secret ?

Véra Octave

[Témoignages] Pour souffler sans quitter leur poste, ou avant une reconversion, ces cadres se sont lancés dans un projet parallèle à leur vie pro. Certains sans en parler à leur employeur, d’autres au contraire. Ils racontent.
Et vous, avez-vous un side project secret ?

Tous les mercredis soir, Michel Q. quitte sa robe d’avocat pour retrouver huit acolytes dans un studio de répétition à Paris. Il prend sa basse et s’installe entre le guitariste, devant la batterie et derrière le chanteur. Pas de grands discours, seul le groove rythme ces deux heures de musique intense. Un hobby comme un autre ? Pas seulement. En effet, de ces réunions hebdomadaires est né un premier album, enregistré mais actuellement en cours de production. « Nous souhaitions immortaliser des morceaux que nous jouons sur scène », commente Michel Q. Et par la même, concrétiser une énergie déployée par chacun des membres du groupe en parallèle de son activité professionnelle.

Cumul salariat et auto-entreprise

Cette envie de s’investir dans un projet en plus de ses tâches quotidiennes correspond à un besoin grandissant, alors que seuls 27% des cadres estiment que leur entreprise cherche à améliorer la qualité de vie au travail*. « Ce type de démarche n’a rien de surprenant par les temps qui courent », remarque Sophie Pero, DRH pour le bailleur social SFHE groupe Arcade. Cela correspond à une forme de souplesse encouragée par le statut d'auto-entrepreneur ». Sophie Pero vient d’ailleurs d’être confrontée à la première demande de ce type au sein de son entreprise. Une cadre l’a sollicitée afin de passer à temps partiel pour développer son statut d’auto-entrepreneur. La DRH, dans le cadre de l’accord qualité de vie au travail, et après avoir vérifié que le domaine d’activité n’était pas concurrentiel, a formalisé un contrat avec une clause de revoyure valable un an. Une manière de tester, pour chacune des parties, la viabilité de la situation.

Définition

Le side project est un projet créatif qui n’a pas de rapport avec son job, ou, s’il en a, est une initiative personnelle et pas une demande de son employeur.

Trouver une forme d’équilibre

« Les cadres se posent souvent la question de savoir s’il est bénéfique ou pas de s’engager sur un projet parallèle d’une autre nature », raconte Piérelle Boursaly, responsable conseil et formation au sein du cabinet Psya. « Il n’arrive pas par hasard. Sa mise en route témoigne le plus souvent d’une crise existentielle suite à une longue expérience professionnelle ou une envie de se rapprocher de quelque chose qui fait sens pour la personne ».

La réflexion de Baptiste, cadre depuis plus de dix ans dans la finance, répond à ce besoin d’engagement dans des actions qui correspondent à ses valeurs. Son employeur actuel gère des fonds privés qui subventionnent des projets de développement durable. Une activité qui impacte la vie de la population des pays émergents, certes, mais pas assez selon lui. Baptiste réfléchit donc à la création d’une société de gestion avec le soutien de son entreprise ou en s’associant avec un ami. « Je pense qu’il est vraiment possible de changer la vie des gens en finançant des projets à haute valeur sociale », explique le cadre, très concerné par le sort des migrants et le respect du droit des femmes. Le fait de se lancer dans ce side-project nourrit sa fonction actuelle. « Cela me permet notamment d’apporter à mon employeur de nouvelles idées », glisse-t-il. Dans le cas de Baptiste, son side project semble doper sa motivation.

 

Cela aide à tenir si l’activité principale n’est pas épanouissante.

 

C’est aussi le cas d’Eric Barthélemy, chef de projet Pôle emploi à Hayange (Moselle). Après avoir répondu à un appel à candidature sur la plateforme interne Innov’action, il a été sélectionné pour mettre en place son projet. L’idée : proposer aux demandeurs d’emploi d’accéder aux offres du marché caché (candidature spontanée). Pendant trois mois, Eric réfléchit au développement de ce service numérique en parallèle de son activité. « A partir de ce moment, ma pratique professionnelle s’est orientée différemment et j’ai commencé à utiliser les entretiens des demandeurs d’emploi pour nourrir mes hypothèses », confie-t-il. A l’issue de cette période de réflexion naît l’application La bonne boîte, fin 2015, qui permet d’identifier les entreprises les plus susceptibles de recruter, sur la base de l’historique des déclarations préalables à l’embauche. D’autres sites suivent - La bonne alternance et La bonne formation – à la plus grande satisfaction d’Éric.

 

Une étape avant le grand saut

« Cela aide à tenir dans un quotidien parfois difficile, si l’activité principale n’est pas épanouissante. Mais la nécessité de réaménager son temps de travail n’est pas toujours évidente », indique Piérelle Boursaly, de Psya.

Un side project peut représenter une période de transition idéale avant d’entamer une reconversion. Une étape intermédiaire qui permet souvent de passer à une autre activité professionnelle en douceur, en limitant les risques. A condition, toutefois, de ne pas ménager ses efforts pour éviter tout désenchantement.

 >> Lire aussi : J.M. Gaucher (Repetto), devenu big boss en parallèle de son métier

* Source : Baromètre des salariés, février 2019 BVA-BPI Group

 

 

Véra Octave
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