L'auto-licenciement va-t-il devenir un bon plan ?

Louise Fontana

La proposition de loi du député Thierry Braillard qui vise à encadrer la pratique de la prise d’acte, plus connue sous le terme d’« auto-licenciement », a été votée en première lecture le 27 février dernier par l’Assemblée. S’auto-licencier va-t-il devenir un bon plan ? Cadremploi fait le point avec deux avocats experts du droit du travail.

Un divorce aux torts de l’employeur

Aujourd’hui, quand vous estimez que votre employeur ne respecte pas ses obligations : mis au placard, harcèlement moral, non-paiement de salaires… Vous pouvez, grâce à la jurisprudence, prendre acte de la rupture du contrat de travail par votre employeur et lui signifier par lettre que vous quittez votre poste sans préavis.

Le problème, c’est qu’il faut ensuite attendre des mois pour que le conseil des prud’hommes tranche et requalifie la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse ou en démission, s’il estime que vous êtes en tort.

La proposition de Thierry Braillard veut officialiser cette pratique et la faciliter en raccourcissant les délais de jugement. « Le salarié pourra saisir le conseil des prud’hommes directement au bureau de jugement, sans passer par la case bureau de conciliation, explique Albert Hamoui, avocat à la cour, spécialiste en Droit du travail. Ce qui en principe pourrait ramener la durée de la procédure de deux ans à un mois. » Est-ce pour autant un blanc seing pour vous auto-licencier ?

 

N’agissez pas sur un coup de tête

Pas forcément, car la nouvelle procédure ne vous permettra pas de quitter votre employeur sans conséquences pour autant. « Je n’ai jamais vu de jugement intervenir en un ou deux mois, du fait de l’encombrement de la justice prudhommale ». Prévient Eric Rocheblave, avocat au barreau de Montpellier, spécialiste en Droit du travail. En pratique, la procédure risque plutôt de durer six ou huit mois.

De plus, pour l’instant, la loi ne prévoit pas que le salarié sera pris en charge par Pôle emploi pendant ce laps de temps. C’est pourquoi nos deux experts recommandent de ne surtout pas utiliser cette nouvelle disposition à la légère. « Le problème de l’auto-licenciement, c’est que c’est tout ou rien, prévient Eric Rocheblave. Si le juge vous donne raison, tout se passe bien, mais s’il vous donne tort, vous devrez rembourser à votre employeur le préavis que vous n’avez pas effectué. »

 

Notre conseil : n’utilisez pas la prise d’acte avant d’avoir pris conseil avec votre représentant syndical ou votre avocat, afin de vous assurer que votre dossier est solide et que votre employeur est bien dans son tort.

Louise Fontana
Louise Fontana

Vous aimerez aussi :