Les anciens politiques pourraient-ils devenir vos collègues ?

Gilles Boulot

Après le chamboulement de l’échiquier politique au printemps, nombre d’anciens ministres ou d’élus qui ne le sont plus passent au privé. Mais pas toujours à des postes classiques et à plein temps. Entre jetons de présence, postes de conseillers peu impliqués, titres honorifiques et vrais jobs à plein temps, les reconversions sont diverses.
Les anciens politiques pourraient-ils devenir vos collègues ?

Pour elle, la page est tournée. Nathalie Kosciusko-Morizet a annoncé ce mardi son arrivée chez Capgemini. Elle devrait prendre la direction de la division cybersécurité du groupe basé à New-York. Un poste important, éloigné de la France, et difficilement compatible avec la poursuite d’une carrière politique dans l’Hexagone. Même si NKM n’a pas encore abandonné son mandat de conseillère municipale à la mairie de Paris. Mais pour une reconversion totale comme la sienne, nombre d’hommes et de femmes et d’hommes politiques qui ont perdu leur fonction ou leur mandat et se rabattent sur le privé, ou le monde associatif, ne s’y consacrent pas à plein temps.

Sarkozy à temps très partiel

Ce pourrait être le cas de Nicolas Sarkozy. Son entrée dans le monde de l’hôtellerie – il est membre du conseil d’administration du groupe Accor – ne l’oblige pas à se rendre au bureau tous les matins. Un conseil d’administration a une seule obligation : se réunir une fois par an, même si nombre d’entre eux organisent plusieurs rencontres annuelles afin d’affiner la stratégie de l’entreprise et de prendre les décisions importantes pour l’avenir de celle-ci. Pas de quoi, en tous cas, empêcher l’ex-président de la République de renouer avec sa vocation de toujours : la politique.

François Fillon télétravailleur ?

Un peu plus chronophage, le nouveau job de son adversaire de la primaire de droite, François Fillon, ne nécessite pas pour autant un temps plein non plus. Depuis cinq mois, le candidat des Républicains est en effet devenu le trentième associé du cabinet d’investissement Tikehau Capital. Il a, comme les autres associés, apporté ses propres deniers au capital. Des deniers que lui et son entreprise entendent bien faire fructifier. Pour autant, il n’aura pas besoin de passer beaucoup de temps dans son bureau de 10m2 carrés seulement, selon le site Capital.fr, puisque sa fonction consiste à démarcher les clients susceptibles de figurer dans son précieux carnet d’adresses.

Apparu, Raffarin, Royal : des fonctions honorifiques ou semi-institutionnelles

D’autres anciens politiques reconvertis le sont sans l’être vraiment, du moins sans quitter totalement la sphère de l’Etat. C’est le cas de Benoist Apparu, ancien fidèle d’Alain Juppé qui prend la direction d’In’li, une société née du regroupement de quatre sociétés HLM et très dépendantes des fonds publics. C’est aussi le cas de Jean-Pierre Raffarin. L’ancien Premier ministre qui a officiellement annoncé son retrait de la vie politique vient de créer l’ONG Leaders for peace destinée à alerter contre les risques de guerre à travers le monde, dont il prend la présidence. Ce qui le contraint au bénévolat dévolu à cette fonction. Il en va de même pour Ségolène Royal, ambassadrice chargée de la négociation internationale pour les  pôles arctique et antarctique, un rôle qu’occupait, tout aussi bénévolement, Michel Rocard avant elle.

Des reconversions qui se heurtent à un problème de formation ?

Au final, peu d’anciens politiques se reconvertissent dans le privé d’une manière classique et à plein temps. Et le cas notoire, mais exceptionnel, de NKM est peut-être lié à son parcours atypique, puisque l’ex-ministre est non seulement polytechnicienne, mais elle a exercé en temps que secrétaire d’État chargée de la Prospective et du Développement numérique, ce qui la prédestine pour son nouveau rôle. Un CV atypique qui est également celui de Jean-Pierre Raffarin. L’ex-Premier ministre, diplômé de l’ESCP, a été tour à tour directeur du marketing de Jacques Vabre avant d’être nommé DG de Bernard Krief Communication. Un parcours qui lui aurait permis un retour aisé vers le privé. Mais peut-être que son âge (il fête cette année ses 70 ans) l’en a dissuadé. Pour la plupart de ses anciens collègues des bancs de l’Assemblée ou du conseil des ministres, les reconversions sont donc plus partielles ou honorifiques. La faute à une formation trop orientée vers le service public (Sciences-Po, ENA) ? Les entreprises s’intéressent visiblement moins à ces grandes écoles qu’au réseau et aux liens que leurs anciens élèves ont pu tisser par la suite. Des carnets d’adresses qu’elles veulent bien rémunérer, mais pas à plein temps.   

Gilles Boulot
Gilles Boulot

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