En Angleterre, la hausse des embauches en CDI a un prix

Michel Holtz

Voilà qui devrait réjouir les thuriféraires d’une économie libérale et d’un code du travail décomplexé. Selon l'Office national de la statistique de Grande-Bretagne, le chômage anglais est à la baisse et s’établit à son niveau le plus bas depuis deux ans. Évidemment, selon que l’on fasse l’addition à l’anglaise ou à la manière du BIT (Bureau International du Travail), le résultat n’est pas vraiment similaire : pour les statisticiens britanniques, il s’établit à fin avril à 4,5% (ce qui correspond au plein emploi) et pour ceux du Bureau il serait de 7,8%. Quoi qu’il en soit, il est inférieur de près de trois points au taux de chômage français. Et, cerise sur l’emploi : les revenus des "Grands Bretons" ont augmenté de 1,3% (bonus compris) sur les quatre premiers mois de l’année.

Sauf que cette douce averse de bons chiffres cache tout de même un vilain crachin. Car cette petite hausse de salaire reste inférieure de moitié au taux de l’inflation. Gagner plus et trouver plus facilement du travail tout en ayant moins de pouvoir d’achat, c’est un tour de force confirmé par une récente étude du cabinet d’audit KPMG. Cette dernière rapporte que le nombre d’embauches en CDI explose depuis 2 ans. L’indice qui les mesure culmine à 57,6% en avril, sachant qu’au-delà de 50%, les économistes considèrent que la croissance est de retour. Du coup, on s’interroge et on se demande pourquoi les Anglais acceptent des CDI parfois au rabais, et pourquoi les entreprises britanniques embauchent, malgré la crise dont elles sont victimes, à l’instar des autres pays européens.

Pour l’avocat Jean-Charles Bensussan, spécialiste du droit international, « les Anglais acceptent des salaires parfois plus bas que ceux qu’ils touchaient dans leur précédent job, tout simplement parce que les indemnités de chômage sont beaucoup plus plafonnées qu’en France. Et qu’en plus, la durée d’indemnisation ne dépasse pas six mois. » Bref, les salariés doivent travailler, et vite. Du côté des entreprises, les dommages et intérêts exigibles aux prudhommes locaux en cas de rupture de contrat sont plafonnés. Les licenciements sont donc moins onéreux et facilités en Angleterre, où les « les emplois sont créés par les PME dans 90% des cas. » Selon Jean-Charles Bensussan, il faut comparer les codes du travail de chaque côté du Channel : « On a le taux de chômage qu’on mérite ». Ou la protection sociale qu’on mérite. C’est selon.

Michel Holtz © Cadremploi.fr

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