Parité : les femmes plus diplômées mais moins cadres que les hommes

Gilles Boulot

Bonnes élèves, les femmes jeunes diplômées accèdent aussi facilement à l’emploi que ces messieurs. Mais cinq ans plus tard, 73 % d’entre eux sont cadres contre 63 % d’entre elles seulement.
Parité : les femmes plus diplômées mais moins cadres que les hommes

La récurrente journée des droits de la femme, ce 8 mars, devrait faire le constat du mieux. Celui de l’amélioration de la parité au boulot et celui du progrès de leur ascension sociale. Selon une récente étude de l’Insee*, elles sont même plus studieuses que ces messieurs : en 2015, 49 % étaient diplômées de l’enseignement supérieur, alors que les garçons n’étaient que 40 % à la même période. Sauf que, lorsqu’il s’agit de franchir les portes de l’entreprise, les choses se gâtent et s’inversent.

Dix points de différence

Pas tout de suite, pas dès l’embauche, mais cinq après : l’écart femmes-hommes est flagrant, selon une enquête du Cereq**. Pour le Centre d’études et de recherches sur les qualifications, 63 % des femmes titulaires d’un parchemin de niveau Bac + 4 et plus ont obtenu le statut cadre cinq années après leur recrutement. Pas mal. Sauf que ces messieurs, de même niveau de diplôme, sont 73 % dans le même cas. Dix points de différence dans l’obtention de ce statut, c’est beaucoup. L’une des explications de cette inégalité est évidemment à chercher dans les effectifs des écoles d’ingénieurs, où le taux de féminisation est non seulement faible (moins de 30 %), mais a tendance à évoluer assez peu, selon l’Observatoire des femmes ingénieurs.

Les recruteurs toujours réticents

Mais l’écart femmes-hommes chez les cadres a une autre explication : ce bon vieux timing de la maternité. Cinq ans après leur prise de fonction, au moment même où elles pourraient accéder au statut cadre, les femmes arrivent à la période de leur vie où elles ont des enfants. Quel rapport ? On sait bien qu’il n’y a aucune incompatibilité entre le fait d’être manager et mère de famille, évidemment.

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Sauf que les entreprises ne l’entendent pas ainsi. « Les recruteurs continuent de privilégier les hommes lorsqu’il s’agit d’offrir des postes d’encadrement », a noté Dominique Epiphanie, sociologue au Cereq qui a coordonné cette étude. Les recruteurs en question agissent-t-ils de la même façon lorsque ce sont des recruteuses ? « Les femmes n’échappent pas aux stéréotypes ».

Les femmes ont encore une certaine propension à moins se valoriser que les hommes

Une part d’autocensure toujours présente

Pour autant, les entreprises et leurs RH ne sont pas les seules responsables de ce décalage de 10 points en faveur des hommes pour l’accès à la fonction cadre. « Les femmes ont encore une certaine propension à moins se valoriser que les hommes ». L’autocensure n’a pas fini de sévir, même si, comme l’a également noté la chercheuse, « les jeunes générations sont de moins en moins timorées et osent aujourd’hui, réclamer des augmentations et des promotions, beaucoup plus que leurs aînées. »

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De plus en plus désinhibées et de plus en plus diplômées, elles devraient donc finir par rejoindre les hommes au royaume des cols blancs. En espérant que cette féminisation ne soit pas liée à la dévalorisation du statut cadre, comme c’est parfois le cas lorsqu’une fonction, un métier ou un statut est dévalorisé.

* Insee Première n° 1739 du 27/2/2019.

** Bref Cereq N° 373 : « Et les femmes devinrent plus diplômées que les hommes... »

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