Pour ou contre l’allongement du congé paternité ?

Sylvie Laidet-Ratier

En attendant une nouvelle mouture du congé paternité, nous avons demandé à des pères cadres ce qu’ils pensaient de son éventuel allongement. N’hésitez pas à réagir ou à témoigner si vous êtes également concerné.
Pour ou contre l’allongement du congé paternité ?

Actuellement pris par 7 pères sur 10 (seulement), le « congé paternité et d’accueil de l’enfant » – c’est son appellation complète – dure au maximum 11 jours ouvrables à prendre dans les quatre mois suivants la naissance de l’enfant. Il peut succéder aux trois jours de « congé de naissance » pris au moment de l’arrivé de l’enfant ou bien être pris séparément.

 

L’allongement du congé paternité en gestation

Fin octobre 2017, quarante personnalités ont signé la pétition lancée par le magazine Causette en faveur de l’allongement de ce congé. Le texte remis au gouvernement a évidemment porté le sujet sur la scène politique. Au point que l’exécutif a commandé un rapport à l’Inspection générale des affaires sociales afin « d’étudier toutes les possibilités d’allongement mais aussi de meilleure rémunération et de meilleure information du congé paternité », précise Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat à l’égalité entre les femmes et les hommes. Dans l’opposition, Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, estime que ce congé paternité devrait être obligatoire afin de lutter contre les inégalités professionnelles femmes-hommes.

 

POUR : Pourquoi ils militent pour un congé paternité plus long

En couplant ses vacances de fin d’année avec ses 14 jours (11 + 3 jours) de congé paternité, Johan, ingénieur en aménagement dans un bureau d’études parisien, est finalement resté un mois aux côtés de sa compagne et de son nouveau né. « En un mois, j’ai à peine eu le temps de prendre mes marques avec notre bébé et d’épauler correctement ma femme. La mise en place de l’allaitement étant toujours un peu compliqué, il me paraît évident que le congé paternité doit être rallongé », plaide ce jeune papa qui a finalement enchainé avec trois mois de congé parental et rebosse actuellement à temps partiel à 80 %. Allonger ce congé permettrait effectivement de « rééquilibrer le partage des tâches et de lutter contre la charge mentale des femmes », tout en limitant « l’impact de la maternité sur la carrière des femmes » plaident les signataires de la pétition.

 

Plutôt CONTRE : les défenseurs d’un statu quo sur le sujet

Nicolas, conducteur de travaux dans un groupe de BTP, est ravi que son manager, père de trois enfants, l’ait encouragé à prendre son congé paternité. « Avec ma femme, nous avions convenu que je le poserai à partir de son retour à la maison. Ces 14 jours nous ont suffi à trouver notre équilibre. J’ai pu apprendre tous les gestes indispensables aux soins d’un nourrisson. En reprenant, le boulot, j’étais plus serein », se souvient-il. Pour ce jeune papa, inutile d’allonger le congé paternité, « sauf en cas de complication lors de l’accouchement », tempère-t-il.

Sébastien, jeune informaticien, ne voit pas non plus grand intérêt à prendre davantage de jours. « Même pendant mon congé, je continuais à bosser à distance par intermittence. Au final, je n’étais ni vraiment avec ma fille et ma compagne, ni vraiment au boulot. Une situation plus stressante que satisfaisante », regrette-il.

Autre argument avancé par ces pères : la rémunération. Actuellement, la CAF plafonne à 86 euros par jour, la prise en charge du congé paternité. Un sérieux manque à gagner pour certains pères dont les employeurs ne prennent pas en charge la différence avec leur salaire mensuel.

 

Qu’en pensent les employeurs ?

Ikea vient d’accorder 14 jours supplémentaires aux pères, portant ainsi à cinq semaines le congé paternité, le tout intégralement rémunéré. « Philosophiquement, les entreprises sont favorables au congé paternité. Mais quand les pères arrivent pour poser leurs jours, c’est une autre histoire. En pratique, leur manager leur explique que ce n’est pas le bon moment pour le prendre, qu’il vaudrait mieux attendre la fin de la clôture des budgets, etc. Bref, ce congé est encore considéré comme un congé de confort et pas comme une logique sociétale d’intégration des pères dans la société », regrette François Enius, conseiller de dirigeants. Pourtant, les employeurs vont devoir s’adapter à cette nouvelle génération qui devient parents. « Désormais, les pères ont l’intention d’accueillir sereinement leurs nouveaux nés et de profiter de leurs enfants correctement. Bref, de ne pas attendre d’être grand-père pour s’occuper de leurs petits-enfants », conclut-il.

 

Vous souhaitez réagir à ces témoignages ou apporter le vôtre si vous êtes concerné par le sujet du congé paternité ? Le forum ci-dessous vous permet de vous exprimer, dans le respect des principes éthiques et de savoir-vivre. Nous avons hâte de vous lire.

Sylvie Laidet-Ratier
Sylvie Laidet-Ratier

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.

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