Que penser de ces employeurs qui vous aident à arrêter de fumer ?

Sylvie Laidet-Ratier

On profite du lancement du Mois sans tabac pour interroger ces employeurs qui proposent un sevrage tabagique à leurs salariés. Pourquoi le font-ils ? Est-ce désintéressé ? Quelles méthodes proposent-ils ?
Que penser de ces employeurs qui vous aident à arrêter de fumer ?

Sauver des poumons

Non, les employeurs ne proposent pas un sevrage tabagique à leurs troupes pour limiter le nombre de pauses clopes et donc doper la productivité. En tout cas, pas ceux que nous avons interrogés. Pour Rémi Gaubert, co-fondateur de l’ESN Web-atrio, « il s’agit de sauver quelques poumons et je fonctionne en citoyen. Je ne fume pas et pourtant tous les ans, je paie 1000 euros de ma poche à la Sécurité Sociale pour les fumeurs*. C’est injuste, donc en travaillant à réduire le nombre de fumeurs, je paierai moins ».

 

Moins d’odeurs

Le dirigeant y voit également un intérêt sur l’ambiance et la santé au travail. « C’est sain pour ceux qui souhaitent arrêter de fumer mais aussi pour les autres qui n’ont pas à subir l’odeur de retour de la pause cigarette et les fenêtres ouvertes pour chasser cette fameuse odeur », ajoute-t-il. En France, 57% des fumeurs déclarent vouloir arrêter de fumer, selon le dernier baromètre Santé publique publié en 2017.

Chez PASàPAS-KPF, spécialiste de l’accompagnement SAP, l’opération no smocking (enfin plutôt « limited smocking ») s’inscrit également dans une démarche pour une meilleure qualité de vie au travail.

Tandis que, chez Staffmatch (intérim), on préfère en parler comme d’une opération de team building visant à récompenser les non fumeurs qui de fait, prennent moins de pauses que les clopeurs.  

 

Sevrage, à chacun sa méthode

Légalement rien n’oblige une entreprise à mettre en place ce type de dispositif. « Elles investissent le terrain de différentes façons, plus ou moins poussées. Certaines proposent un suivi tabacologique assorti d’un suivi nutritionnel ou sportif. Donc un accompagnement sur le moyen long terme.

D’autres organisent des ateliers d’information détaillant les différentes étapes pour arrêter de fumer, les profils de fumeur et les méthodes de sevrage existantes », explique Alice Denoize, tabacologue, intervenante au sein des Ateliers Durables.

D’autres, comme Web-atrio, financent les dispositifs pour éradiquer la taffe au taf : patchs anti-tabac, rendez-vous chez l’addictologue, séances chez l’hypnotiseur, magnétiseur, etc. 

-          L’an passé, PASàPAS-KPF a proposé à 100 % de ses salariés de profiter de séances chez un hypnotiseur. « 20 collaborateurs s’y sont rendus pour le tabac et 5 pour autre chose. Mais tous étaient évidemment volontaires pour aller voir celui que l’on appelait « le mage » », raconte Jesus Berecibar, dirigeant et co-fondateur.

-          Chez Staffmatch, point de prise en charge financière de ce sevrage tabagique, mais un challenge d’équipe dont la règle est de ne pas fumer au travail pendant un mois. « On ne souhaite pas se substituer à une pharmacie en proposant des patchs ou autre. C’est davantage un accompagnement psychologique entre fumeur et non fumeur. Durant ce mois sans tabac, la consommation de café augmente et on met plus de coupe-faim à disposition. Par exemple des corbeilles de fruits », illustre Vincent Rech, le fondateur de Staffmatch. A la clé une demi journée de congé offerte. Les non fumeurs eux, y sont automatiquement éligibles.

 

Pas d’obligations de résultats

Tout d’abord, sachez que rien ne vous oblige à vous inscrire dans ce type de programme. Et ce, même s’il est suggéré et financé par votre employeur durant votre temps de travail. Arrêter de fumer reste une affaire personnelle relevant de votre vie privée. A vous de choisir. Si vous vous lancez dans un sevrage tabagique « corporate », vous n’êtes obligé de rien. Vous réussissez à stopper la clope ? Tant mieux. Vous échouez ? Tant pis. Votre employeur ne peut évidemment pas vous en tenir grief ou vous placardiser pour cette raison.

-          « Après les séances chez « le mage », il y a eu trois réactions, détaille Jésus Bérécibar. Ceux qui sont sortis en griller une juste après. Ceux qui ont arrêté quelques mois et ceux qui ont stoppé la cigarette définitivement. Au moins un, donc c’est déjà un miracle ».

-          Web-atrio n’a pas fait de statistiques sur le nombre de sevrages réussis ou pas. « Ce n’était pas l’objet. Nous, on propose ce type d’accompagnement, les salariés disposent. On n’impose rien mais je reste convaincu que les petites graines finissent un jour par porter leurs fruits », insiste Rémi Gaubert.

-          Chez Staffmatch, pas de contrôle organisé à l’occasion du Mois sans tabac. On préfère parler de « relation de confiance ». Cela étant les fumeurs qui ne jouent pas le jeu n’ont pas droit à la demi journée offerte par l’employeur. Smocking or working, il faut choisir !

* En réalité, le tabagisme coûte environ 120 milliards d'euros annuels à la société française, soit un impôt indirect de 2390 € par adulte, selon les derniers chiffres de l'Observatoire français des drogues.

L'opération #MoisSansTabac

Elle est organisée par tabac-info-service à partir du 1ᵉʳ novembre. Il s’agit d’un défi collectif qui propose à tous les fumeurs d’arrêter pendant un mois avec le soutien de leurs proches. Des kits sont disponibles sur le site.

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Sylvie Laidet-Ratier
Sylvie Laidet-Ratier

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.

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