
Focus sur la dernière tendance bien-être en entreprise. Six entreprises nous expliquent les solutions qu’elles ont mises en place pour satisfaire leurs salariés à la recherche de calme pour travailler, mais aussi de bulles apaisantes pendant leur journée de travail.
Une « quiet zone » dans le groupe GA
L’origine du projet : après s’être installée en flex office au 5ᵉ étage d’un immeuble haussmannien du 8ᵉ arrondissement parisien, le groupe GA (constructions de bureau) se retrouve à l’étroit et fait l’acquisition du 6ᵉ étage. Les dirigeants interrogent alors la vingtaine de salariés sur ce qui leur manque au 5ᵉ. Leur réponse est sans appel : une zone où se poser pour travailler sans être déranger.
La solution : depuis un an, leur vœu est exaucé : la quiet zone du 6ᵉ peut accueillir jusqu’à 8 personnes.
L’avis d’un salarié : « Si je dispose de peu de temps pour régler un dossier, je me rends dans la quiet zone, explique Elodie Le Breton, directrice marketing et communication. Les bureaux sont installés face au mur, personne ne se voit, personne ne se parle. Je suis hyper efficace. Mon téléphone est sur silencieux. En cas d’appel, je sors évidemment de la zone pour m’installer dans l’une des phone box réservée à cet usage. »
Des salles de ressourcement chez Botanic
Le défi : améliorer l’efficacité et la vigilance au travail de ses collaborateurs. Dans le cadre de sa politique d’amélioration de la qualité de vie au travail, Botanic (réseau de jardineries écologiques) a mis en place des salles de ressourcement dans 15 de ses magasins et au siège.
La solution : Avant d’accéder à la salle, les salariés doivent avoir téléchargé une appli développée par Someo Solutions. Elle leur permet de s’inscrire en ligne au planning de la salle. Une fois leur session réservée, ils y entrent en silence, s’installent sur un matelas se connectent avec leurs écouteurs sur leur téléphone (ou tablette disponible sur place) et sélectionnent un programme sonore basé sur les principes de la sophrologie. Et c’est parti pour 8, 15 ou 30 minutes (maximum) de ressourcement qui débute par une mise en pré-sommeil, des sons (mer, rivière, etc.) et se termine par une phase de remise en vigilance. Actuellement, 20 % des salariés ont téléchargé l’appli.
L’avis d’un salarié : « Je m’y rends quand j’en éprouve le besoin, par exemple après une grosse réunion, ou durant la pause méridienne, afin de me détendre. Cela me fait le même effet qu’une séance de yoga. Après, je me sens bien et fraîche pour reprendre le travail », témoigne Valérie Cotro, directrice des ressources humaines.
Un Bal du silence chez Renault
Le défi : Sortir de la routine. C’est lors d’une journée de « learning mission » qu’une équipe de 8 designers, pour la plupart très bavards, ont testé le Bal du silence mis au point par l’agence Gibraltar. Dans ce bal, ce ne sont pas les corps qui dansent mais les mots.
La solution : Concrètement, des binômes tirés au sort, s’installent face à face avec chacun une feuille et un stylo. Et c’est parti pour 30 minutes d’échanges silencieux. Au gré des envies de chacun, les participants griffonnent à tour de rôle sur une même page ou échangent en simultané sur leur feuille respective. Seul le bruit du stylo grattant le papier vient troubler le silence. Très efficace pour briser la glace entre deux inconnus.
L’avis d’un salarié : « J’étais en binôme avec un nouveau designer allemand de l’équipe, explique Paul Stamper, designer chez Renault. On a échangé en anglais. Quand il ne comprenait pas un mot, il écrivait plus gros. Et inversement. Après les échanges de politesse, on a « bavardé » sur nos styles de vie. Au final, ce Bal du silence a, en quelque sorte, libéré la parole. On a sympathisé et nos échanges sont désormais plus faciles notamment quand on discute d’un projet »,
Une salle du silence à l’EM Lyon
Le défi : Proposer une alternative à l’ébullition permanente régnant sur ce campus de 5500 m² qui ne comprend au final que 7 salles de cours. Les architectes du projet ont en effet misé sur la multiplication d’espaces collaboratifs (espaces de co-working, learning hub, bulle pour travailler à 6-8 personnes, agora, etc.). Malgré un traitement acoustique performant, les salariés, les profs et les étudiants de l’école ont parfois besoin de couper le son.
La solution : Sur 300 m², installés à des postes de travail classiques ou sur des pouf géant (fatboy), dans une ambiance gris très foncé animée par une forêt d’arbres, ils ont ainsi la possibilité de venir travailler en silence ou tout simplement se reposer et lâcher prise.
L’avis d’un utilisateur : « Au quotidien, nous n’avons pas de bureau attitré, argumente Jacques Chaniol, directeur du campus parisien de l’EM Lyon. Au départ, moi qui n’ai connu que des bureaux individuels, j’ai cru que ce serait compliqué. Au final cette organisation facilite les relations aux autres et le travail en équipe mais cela ne peut fonctionner que grâce à cette salle du silence où je peux m’isoler pour me concentrer ou me reposer. »
Des bulles acoustiques chez Wynd
Le défi : permettre aux commerciaux et aux développeurs de s’isoler pour se concentrer et/ou passer des coups de fil.
La solution : Pour cela, l’entreprise a installé deux e-bulles au sein de deux de ses trois open spaces. Sans être insonorisés, ces micro espaces de travail développés par Leet Design offrent une protection visuelle et une atténuation phonique à ses occupants.
L’avis d’un utilisateur : « Les e-bulles sont placées en plein cœur des open spaces et me permettent de m'isoler du bruit ambiant pour passer un appel client ou pour la préparation d'un document demandant plus de concentration. J’y traite aussi des sujets plus confidentiels. Elles n’offrent pas une insonorisation complète mais aident fortement à l'isolement sonore pour se sentir « dans sa bulle », plaide un commercial de l’entreprise.
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Dix « quiet room » chez Bouygues Telecom
Le défi : Parer aux nombreuses interruptions rythmant les journées des collaborateurs et au niveau sonore des open spaces.
La solution : L’opérateur télécom a installé 10 quiet room (80 places) sur son technopôle de Meudon. Dans ces salles, les sonneries de portable et les conversations téléphoniques sont formellement interdites. L’idée est au contraire de retrouver le niveau de concentration si cher aux prestigieuses bibliothèques. Pour que chacun gagne en concentration et confidentialité, les bureaux sont même séparés par de petites cloisons.
L’avis d’un utilisateur : « Je m’y rends régulièrement quand j’ai besoin de me concentrer sur une lecture, la rédaction d’un document ou tout simplement quand je ne souhaite pas être interrompu par un coup de fil, un mail, ou une question, illustre Richard Drouin, directeur de l’environnement de travail. Et ça marche, personne n’est jamais rentré me chercher dans la quiet room. Je gagne donc en efficacité. »
Pourquoi on remet le silence en boîte ?
Cette tendance au « silence, on bosse » est d’abord une réponse au bruit de fond incessant induit par les aménagements en open space. Ayant parfois du mal à être efficaces, les salariés revendiquent des lieux pour se concentrer et/ou se reposer les yeux et les oreilles. « Notamment les collaborateurs introvertis qui ne peuvent pas être 10 heures par jour au contact d’un groupe mais ont, au contraire, besoin de se retrouver avec eux-mêmes dans le calme, pour se ressourcer », détaille Stéphane Saba, coordinateur du réseau professionnel Lemon Conseil. Les employeurs y trouvent donc leur compte. « Le silence est également une réponse à la surabondance de mails, de réunions, de flux d’information auxquels nous sommes tous confrontés. Les salariés sont dans l’ultra sollicitation. Ce n’est pas un hasard si certaines entreprises prônent le « silence numérique » en organisant par exemple des journées sans mail », conclut-il.
Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.