
Le temps n’est plus au court-circuit des partenaires sociaux. Réunis ce matin autour du Premier ministre, syndicats et associations ont entendu Édouard Philippe annoncer l’instauration d’une « prime de mobilité » plafonnée à 400 euros par an. Emballement médiatique aidant, cette prime était devenue « obligatoire » dans la matinée et prenait des allures d’annonce surprise du Premier ministre. Sauf que pas vraiment.
La prime mobilité est bien facultative
- D’abord, il s’agit d’une mesure qui n’est qu’incitative pour les entreprises. L’employeur peut donc la zapper et ne pas du tout se sentir obligé de prendre en charge des frais de transport du salarié entre son domicile et son lieu de travail, que le salarié utilise son véhicule (74% des trajets se font en voiture*), les transports en commun (20 %*), son vélo, le covoiturage, ou tout autre moyen de déplacement.
- De plus, cette mesure figurait déjà dans la loi mobilité, adoptée au Sénat depuis le début du mois d’avril (mais qui arrive le 14 mai à l’Assemblée nationale, pour une éventuelle adoption définitive en juillet). Rien de neuf, donc, si ce n’est que ces quelques 30 euros mensuels ressemblent fort à une réponse aux gilets jaunes. Mais il reste loin du montant moyen des frais engagés par les salariés pour assurer leurs trajets domicile-travail. Alors que le mouvement avait démarré sur la base d’une revendication justement liée au prix du carburant. Or, l’essence comme le gazole sont aujourd’hui affichés à des tarifs plus élevés encore que lors du début de la contestation et n’a jamais été aussi haut depuis 2013.
Les PME renâclent
Mais si les salariés aux revenus les plus modestes risquent de prendre avec bienveillance cette annonce, ce n’est pas le cas des entreprises, déjà dans la crainte de se voir supprimer des niches fiscales, ainsi que le président de la République l’a annoncé lors de sa conférence de presse du 25 avril dernier. Si le Medef n’a pas réagi à cette mesure incitative, la CPME ne s’en est pas privée. Le syndicat des petites entreprises a expliqué au JDD qu’il s’agit « d’ une charge de plus qui va taper d’abord sur les plus fragiles, à savoir les entreprises implantées en dehors des grands centres urbains ».
Les sièges sociaux étant souvent installés en région parisienne, où la prise en charge partielle du Pass Navigo est obligatoire, elles sont moins concernées par la nouvelle mesure que les PME et TPE, surtout celles, et elles sont nombreuses, situées en zone rurale. Ce sont donc les entreprises les moins riches qui sont incitées à payer et leurs salariés qui risquent de ne pas voir passer la nouvelle prime. La tradition qui veut que, financièrement parlant, il vaut mieux travailler dans un grand groupe que dans une PME n’est pas prête de s’éteindre.
* Source : Insee.
