Diplômés de grandes écoles : la promo 2020 ne s’en sort pas si mal malgré le Covid

Gwenole Guiomard

ENQUETE CGE 2021 – Les diplômés 2020 ont été relativement épargnés par la crise liée au Covid. La 29e enquête d’insertion de la Conférence des grandes écoles dresse le portrait d’une promotion avec une insertion en baisse de 9% seulement et des salaires d’embauche quasi stables. La situation est cependant plus dégradée pour les femmes. Explications et témoignages.
Diplômés de grandes écoles : la promo 2020 ne s’en sort pas si mal malgré le Covid

Ils témoignent

  • Anne-Lucie Wack, présidente de la CGE et directrice générale de Montpellier SupAgro 
  • Nicolas Glady, président de la Commission Aval de la CGE et directeur de Télécom Paris
  • Laurent Champaney, directeur général d'Arts et Métiers Paristech
  • Laurent Giovachini, président de la Fédération Syntec et directeur général adjoint de Sopra Steria
  • Alice Guilhon, directrice générale de Skema Business School

« Prendre les emplois qui sont proposés ». Le conseil des consultants en recrutement en temps de crise a été reçu 5 sur 5 par les 65 700 diplômés 2020 de l’enseignement supérieur. Ceci explique les résultats « pas si mal que cela » de la 29e enquête d’insertion des jeunes diplômés 2020 de la Conférence des grandes écoles à laquelle ont répondu 42 000 diplômés 2020 de 193 établissements (essentiellement des écoles de commerce ou d’ingénieurs), six mois après leur entrée sur le marché du travail.

Nos écoles ont bien résisté face à la crise du Covid.
Anne-Lucie Wack, la présidente, très positive, de la CGE par ailleurs directrice générale de Montpellier SupAgro (Institut national d'études supérieures agronomiques).

Un taux d’insertion 2020 en baisse de seulement 9 % malgré le Covid

Entre septembre et décembre 2020, l’insertion des jeunes diplômés 2020 des grandes écoles françaises a baissé de 9 % selon l’étude de la CGE. Mais le niveau reste néanmoins élevé avec un taux d’insertion de 79,1 % contre 88,1 % l’année dernière.  Les diplômés ingénieurs ont davantage souffert (recul de 10,1%) que les diplômés d’écoles de commerce.

C’est beaucoup mais moins qu’escompté. Nos écoles ont résisté malgré une crise qu’on ne connait qu’une fois par siècle.
Nicolas Glady, président de la Commission Aval de la CGE et directeur de Télécom Paris.

Certains établissements comme Rennes School of business connaissent même un taux d’insertion à 6 mois sans changement, à 92 %, entre 2019 et 2020. A noter :  cette insertion 2020 est meilleure que celle qui a suivi la crise financière de 2008.

Des salaires quasi stables malgré le Covid

Autre point à noter, les salaires annuels moyens brut à l’embauche sont restés quasi stables : passant de 35 714 euros hors primes en 2019 à 35 461 € en 2020, soit une baisse minime de 0,7% en un an. Les employeurs ont donc relativement joué le jeu, surtout avec les ingénieurs mais un peu moins avec les diplômés en management (-1,5%) et les autres spécialités (-3,2%).

Dans mon école d’ingénieurs, mes diplômés évoquent plutôt une baisse salariale de 1 000 à 2 000 euros par rapport à l’année dernière. C’est certes un recul mais il intervient dans une décennie où les salaires ont connu une progression stratosphérique. C’était un marché délirant avec des jeunes embauchés avant d’être diplômé.
Une dirigeante de bureau d'Alumni

Chômage en hausse et en CDI en baisse

Corolaire d’une insertion altérée par la crise sanitaire, le millésime 2020 voit aussi se développer le pourcentage de jeunes restant sur le carreau.

Jugez plutôt :

Taux de chômage des jeunes diplômés au moment des enquêtes :  

  • 2021 : 17,7 %
  • 2020 : 10,2 %
  • 2018 : 4,2 %
Dans l’enquête 2021, la principale difficulté́ citée par les diplômés en quête d’un emploi est le faible volume d’offres (73,9 %), devant le manque d’expérience professionnelle (62,4 %). L’ordre était inversé l’an dernier.
Enquête insertion CGE 2021

Sans surprise, les poursuites d’études se développent en 2020 (9,9 % ont fait ce choix contre 8,2 % en 2020) sans doute dans l’attente de retrouver un emploi.

Le taux de CDI de ces jeunes se dégrade aussi, passant de 77,1 % en 2020 contre 82,2 % en 2019. Mais ce taux baisse à 57,2 % pour les écoles des autres spécialités comme les ENS, le CFJ, le Celsa et autres IEP.

Les jeunes femmes s’insèrent moins vite et sont moins payées

Enfin, cette crise a, certes, frappé tout le monde mais plus encore les jeunes femmes diplômées des grandes écoles :

  • Le taux de chômage des femmes est plus élevé (18,7% vs 17% chez les hommes). En particulier, les managers hommes ont moins de mal à décrocher un emploi que les femmes (4.8 points d’écart).
  • Elles sont moins payées que les hommes dès l’embauche : 34 104 euros vs 36 345 euros pour les hommes ; cela représente quand même un delta de 2 241euros (presque un 13e mois)
  • Elles sont moins embauchées en CDI : 70,7 % de CDI chez les femmes vs 81,4 % pour les hommes.

Les tendances pour 2021 

La Conférence des grandes écoles est optimiste pour les diplômés de 2021 qui seront analysés l’année prochaine.

Si nous considérons les études de l’Insee, les déclarations des employeurs, nous sentons une reprise d’activité »,
Nicolas Glady, de Télécom Paris
Nous retrouvons le dynamisme d’avant-crise avec des entreprises revenant nous voir.
Laurent Champaney, directeur général d'Arts et Métiers Paristech en lice pour la nouvelle direction de la CGE
Des tensions sur le recrutement apparaissent d’ores et déjà dans certains domaines (numérique notamment) et la « guerre des talents » est sur le point de reprendre.
Laurent Giovachini, président de la Fédération Syntec et directeur général adjoint de Sopra Steria

Bref, à la CGE, l’optimisme est de rigueur. D’autant plus que cette crise a intensifié des tendances en faveur de l’emploi de leurs diplômés.

  • Ainsi, avec le développement du télétravail et du management à distance, de plus en plus de diplômés des grandes écoles débutent leur carrière en dehors de l’Ile-de-France. Ce qui devrait permettre d’agrandir leur champ des possibles en matière de recrutement.
  • De même, on note aussi une appétence de ces jeunes pour les petites et moyennes entreprises, qui sont à l’origine de la majorité des embauches de ce pays. Le taux de jeunes diplômés GE débutant dans ces sociétés à taille humaine est ainsi passé de 40 à 45 % ces dernières années.

Reste que les dirigeants de ces écoles aussi grandes soient-elles ne peuvent pas savoir ce que demain sera fait.

« On espère cependant que les employeurs nous soutiendront. Va-t-on assister à la création d’un goulot d’étranglement au 2e semestre 2021 avec l’addition des diplômés 2020 sans emploi et ceux de 2021 ? Je ne saurai le préciser. Mais nous espérons que cela ne sera pas le cas. Des signes encourageants nous rassurent. Nous voyons d’ores et déjà des employeurs revenant sur nos campus pour faire leur marché, redemandant à embaucher nos apprentis. C’est rassurant et c’est autant de bons signes quant aux embauches de notre promotion 2021 ».
Alice Guilhon, directrice générale de Skema Business School.

Infographie : enquête d'insertion CGE 2021 en résumé

Clic ici pour télécharger l'infographie complète

Gwenole Guiomard
Gwenole Guiomard

Je suis journaliste spécialisé dans les questions de formation et d’emploi. L’un ne doit pas aller sans l’autre et la compréhension des deux permet de s’orienter au mieux. Je rédige aussi, tous les deux ans, le Guide des professionnels du recrutement. Je suis aussi passionné d’histoire et amoureux des routes de la soie.

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