Chez CGI, « monter en compétences n’est pas une option »

L'équipe de Cadremploi

ENTRETIEN – La transition numérique des entreprises occupe des armadas de consultants en ce début de 21e siècle. Beaucoup d’entre eux ont choisi leur camp : ils préfèrent rejoindre des ESN qui savent doper leurs compétences sans les épuiser. Un choix qui leur permet de progresser en continuant d’apprendre et d’être “désirables” pour les employeurs. Nous avons voulu savoir comment CGI, l’un des plus gros acteurs mondiaux, attire ces Top Gun et leur permet de faire fructifier leur capital de compétences tout en en faisant profiter leurs clients. Entretien croisé entre Sarah Cordier, DRH d’une unité d’affaires de CGI et Christophe Maillet, le “Maverick” des RH au sein de la même entité, qui pilote 200 top consultants spécialisés en RH.

Entretien croisé entre Sarah Cordier, DRH d’une unité d’affaires de CGI et Christophe Maillet qui pilote 200 top consultants spécialisés en RH chez CGI.

Chez CGI, « monter en compétences n’est pas une option »
Entretien croisé entre Sarah Cordier, DRH d’une unité d’affaires de CGI et Christophe Maillet qui pilote 200 top consultants spécialisés en RH chez CGI.

Ils témoignent

  • Sarah Cordier, DRH de la BU TPSHRM, une entité de CGI qui réunit les activités Transport, Secteur public, Solutions RH et Manufacturing (résumé par TPSHRM). Cette unité compte plus de 1 000 collaborateurs sur 80 000 dans le monde, dont 11 000 en France.
  • Christophe Maillet, vice-président, domaine Ressources humaines chez CGI. Au sein de la même entité que Sarah Cordier, il pilote une équipe de 200 personnes qui délivre des prestations aux DRH : externalisation de la paie – comme pour la SNCF, développement des talents, pilotage des indicateurs RH et tous les sujets émergents, comme la Diversité, l’Inclusion et la Qualité de Vie au Travail.

Cadremploi : Dans une ESN comme CGI, qu’est-ce qui motive vos consultants à se lever tous les matins ?

Christophe Maillet : Vous avez raison que la question-clef, c’est l’engagement ! D’après notre enquête annuelle, c’est de la satisfaction de leurs clients que les consultants de CGI tirent le plus de plaisir à travailler. Pas étonnant pour une entreprise dont les clients et les salariés sont des parties prenantes au même plan que ses actionnaires.  De plus, en vendant des solutions aux DRH, mon équipe est condamnée à être exemplaire dans ce domaine…

Sarah Cordier

Sarah Cordier : d’ailleurs, nous nous tournons souvent vers l’équipe de Christophe pour connaître l’état de l’art en matière de processus métier et de solutions numériques – ou pour expérimenter avant de généraliser – en interne à toute la population CGI, comme en externe chez ses clients. C’était le cas pour un nouveau format de comité carrière, ou en ce moment pour une nouvelle approche de la prévention des risques psycho-sociaux.

On peut vendre les mêmes solutions partout ?

C.M. : il y a des sujets qui se prêtent à une certaine forme d’industrialisation, comme la paie par exemple, qui est très encadrée d’un point de vue réglementaire – et d’autres où l’artisanat doit prévaloir car chaque contexte est différent. Je pense que c’est tout l’intérêt du domaine des Ressources Humaines : les mêmes causes ne produisant pas toujours les mêmes effets, il faut en permanence savoir réagir et s’ajuster ; ça peut être déstabilisant pour certains mais c’est comme ça.

S’adapter aux différentes maturités technologiques des clients

On imagine que vos clients veulent travailler avec des consultants qui maitrisent les technos dernier cri ?

Christophe Maillet

C.M.  : effectivement, bien souvent, les clients attendent des prestataires externes qu’ils maîtrisent les toutes dernières technologies afin d’accélérer leur transformation. A nous de les guider dans l’identification de cas d’usage pertinents, d’accompagner l’organisation dans ce mouvement, d’amender les processus, d’impliquer les salariés, de gérer la transition, de continuer à maintenir les applications historiques… Les compétences attendues des consultants sont beaucoup plus larges.

L’importance de l’observation de ses pairs

Face à ces besoins très hétérogènes, est-ce que vos consultants ont la possibilité de choisir leur mission ?

S.C. : C’est même notre promesse d’employeur – qui va dans l’intérêt de toutes les parties prenantes. Déjà, chez CGI, un manager ne recrute pas pour une mission spécifique – ce qui nous rendrait tributaire d’un client, d’une technologie, d’une situation, mais parce que manager et managé se sont trouvé une trajectoire commune, des valeurs communes, une ambition commune.  Ensuite, les entretiens professionnels, que nous avons décidé d’imposer chaque année, sont l’occasion de suivre et d’ajuster cette trajectoire d’évolution – ou pour définir une inflexion vers un autre secteur d’activité, un autre domaine fonctionnel, une autre solution technique…

Quel est ensuite le rôle du manager de proximité dans l’affectation ?

S.C. : c’est une particularité importante de CGI : la plupart des membres d’une équipe travaillent exclusivement pour les clients directs de leur manager. Chaque manager connait donc les préférences, les aspirations et les souhaits de carrière de chacun des membres de son équipe – et aussi les besoins de ses clients ; donc la proposition est faite à son niveau. C’est ce qu’on appelle le management de proximité, au niveau de ce qu’on appelle des équipages.

Dans ce contexte, que faites-vous de spécifique pour doper les compétences de vos salariés ?

S.C. : l’offre de notre université d’entreprise est extrêmement large, mais CGI Université est surtout reconnue pour ses cycles – orange, vert, bleu, noir – qui correspondent à des moments-clefs dans une carrière : mon premier projet en responsabilité, mon passage Directeur, ma prise de poste Vice-Président. Il faut dire que les salariés sont formés en résidentiel, lors de 3 ou 4 séjours espacés sur plusieurs mois, avec des intervenants extérieurs. Des liens se créent dans les promos qui perdurent des années après…

C.M. : on réfléchit également à inventer une collaboration avec Institut Mines-Telecom Business School qui permettrait de sensibiliser nos managers et leurs clients aux dernières évolutions de la recherche, par exemple dans le domaine de l’intelligence artificielle ou du numérique responsable.

Le rôle de l’auto-formation

La montée en compétences passe-t-elle aussi par l’observation des collègues dans vos métiers ?

C.M. : Tout à fait. On se forme aussi énormément en mission, en voyant faire le manager, l’expert, en observant les mots, les gestes… dans une forme de compagnonnage. D’ailleurs, dès la sortie du confinement, nous avons fait revenir très vite les managers et les experts afin qu’ils reprennent le lien avec les alternants et les jeunes diplômés de l’Institut Mines Telecom Business School par exemple, qui étaient restés trop longtemps seuls devant leur écran, à distance.

S.C. : C’est pour cela que dans nos accords de télétravail, la présence de managers auprès des juniors est prévue afin de ne jamais les laisser seuls.

Est-ce que certaines demandes de montée en compétences sont plus difficiles à satisfaire ?

C.M. : cela peut arriver quand elles concernent des technologies tellement novatrices qu’elles ne sont pas encore vraiment sur le marché – et le consultant peut se former même s’il n’y aura pas d’affectation immédiate sur une mission. Cette GPEC nous permet d’être en avance de phase.

S.C. : A titre d’exemple, cela m’intéresserait qu’un consultant de l’équipe de Christophe se forme aux RH dans les métavers alors qu’il n’a pas encore de demande client, à l’exception de quelques coups marketing pour le recrutement. Nous l’avons provisionné à son budget de formation…

Le « turn dynamique »

Si une mission dure plusieurs années, est-ce que le consultant est obligé de rester jusqu’à la fin ?

C.M. : Non, surtout pas. Nous encourageons une culture du turn dynamique auprès des consultants, des managers et des clients. C’est un levier puissant de la performance économique des opérations et de la montée en compétences des consultants. Les clients résistent parfois à ces changements, les pénalisent financièrement – c’est notre travail de les convaincre, et ces mobilités restent pour nous des investissements à provoquer.

S.C. : Nos comités d’affectation hebdomadaires, à tous les niveaux de l’organisation, en assurent le suivi et permettent d’arbitrer toutes les mobilités. Par ailleurs, notre charte mobilité précise que tout consultant de plus de deux ans d’expérience peut demander une mobilité géographique – et que le manager doit l’organiser et ne peut pas l’empêcher.

Former ses salariés les rend plus « bankables ». N’avez-vous pas peur qu’ils vous quittent ?

C.M. : A la question « Mais pourquoi formez-vous des gens alors que vous savez qu’une fois formés ils risquent de partir », j’aime beaucoup citer cette réponse « A quoi me serviraient des gens qui restent mais qui ne sont pas formés. » C’est vital de former, ce n’est pas qu’une obligation d’employeur, c’est une nécessité d’entrepreneur.

Faire carrière dans une ESN est possible

Les ESN ont la réputation d’être une industrie de flux, où l’on ne fait que passer. Mais est-ce possible de faire carrière chez CGI ?

C.M. : J’y progresse depuis 18 ans… Notre président Europe de l'Ouest et du Sud, Laurent Gerin, a fait toute sa carrière chez CGI. La France compte environ 1 million d’informaticiens : 600 000 dans les ESN comme la nôtre et 400 000 chez leurs clients – et on peut penser la montée en compétences sera toujours mieux financée et suivie dans une ESN que dans des équipes de back-office clients. Donc, si un jeune diplômé souhaite faire carrière dans les métiers du numérique, c’est dans une ESN qu’il sera le mieux formé.

Votre entité doit recruter 300 personnes d’ici un an, hors stagiaires et hors alternants. Quelles questions vous posent les candidats qui s’intéressent à CGI ?

C.M. : J’étais justement au forum de printemps de IMT-BS récemment, une école où recrutons régulièrement. Les étudiants posent surtout des questions sur les secteurs et les domaines sur lesquels nous travaillons. Ils sortent de formation donc ils ont hâte d’aller sur le terrain. Ils veulent être sûr de débuter leur carrière dans une ESN qui les mette en situation, leur confie rapidement des responsabilités, s’engage à les suivre et à investir sur eux pour les garder le plus longtemps possible.

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