
- Rémunération : au secours, les femmes cadres toujours moins bien payées que les hommes
- Progression de carrière : les femmes accèdent à une certaine forme de management
- Congé parental et paternité : les pères, présents à court terme mais grands absents à long terme
- Formations : un gars, une fille (cadre), même traitement
- Conseils d’administration : la parité progresse vraiment
- Impact de la Covid en 2020 : les femmes plus durement affectées
Rémunération : au secours, les femmes cadres toujours moins bien payées que les hommes
Les hommes cadres gagnent en moyenne 8% de plus que les femmes cadres.
Malgré les lois, les rappels à la loi, l’index égalité (revu et corrigé) et l’obligation d’enveloppes de rattrapage salarial et tout le toutim, on prend les mêmes chiffres et on recommence : à postes et compétences équivalents, les hommes cadres gagnent toujours plus (+8%) que leurs homologues féminines. Un chiffre qui augmente tristement (+1% en un an) selon l’étude de l’Apec publiée en mars 2022.
Si on entre un peu dans le détail, on constate que dès le début de leur carrière les femmes ont des rémunérations inférieures aux hommes (- 3% pour les moins de 35 ans). Et au fil des années, ce fossé se creuse pour atteindre -11% pour les plus de 55 ans. A poste et compétences équivalents, rappelons-le ! Pour autant cet insupportable décalage ne semble pas vraiment être un caillou officiel dans la chaussure des cadres. Seuls 43% des hommes et 58% des femmes cadres pensent qu’il y a un réel écart salarial. Chez les femmes, ce chiffre tend même à reculer alors que le gap salarial entre les genres ne fait que se creuser à leur détriment. Est-ce parce que les boites communiquent davantage sur le sujet et que les femmes se satisfont de beaux discours ? Est-ce parce que les femmes se sont accoutumées au fait de gagner moins et donc jettent un peu l’éponge sur le sujet ? Est-ce parce que les femmes ont d’autres chats à fouetter que de scruter leurs fiches de poste (on pense notamment à la gestion quotidienne de la vie de famille qui leur incombe encore malheureusement majoritairement) ? Est-ce un peu des trois ? Sans doute. En tout cas, à poste et compétences égales, l’écart salarial entre les femmes et les hommes cadres se creuse et tout le monde s’en fiche.
Un raison d’espérer quand même : selon une étude Figures, une application de rémunération en temps réel, menée auprès de 445 entreprises européennes, plus les boites sont transparentes sur les rémunérations, moins les écarts femmes-hommes au même poste sont importants.
Écart salarial pour un même poste
- 3,5% pour les entreprises non transparentes
2,4% pour les entreprises dont la politique d'entreprise est transparente
2% pour les entreprises dont la politique d'entreprise et la grille salariale sont transparentes 0% pour les entreprises dont la transparence est totale
Progression de carrière : les femmes accèdent à une certaine forme de management
En 2023, le fameux plafond de verre qui empêche les femmes de se hisser au sommet des organigrammes, est-il entrain d’exploser en vol ? Est-il en train de se fendre ou au contraire toujours en parfait état ? Sur ce point encore, force est de constater qu’il y a du boulot.
L’accès au management
Seules 33% des femmes cadres sont managers contre 46% des hommesSource : Apec
D’abord en termes d’accès aux responsabilités de management. Selon une étude Apec, 33% des femmes cadres sont managers contre 46% des hommes. Et ce, dès le début de leur carrière. Pire, d’année en année, ce chiffre tend à baisser. « Cette sous-représentation des femmes cadres dans les postes de management prive un certain nombre de femmes de modèles dont elles pourraient s’inspirer : seules 29 % des femmes cadres sont aujourd’hui managées par une femme, alors que 79 % des hommes cadres sont managés par un homme », note l’Apec.
Des postes de pseudo-management
Et puis, quand elles accèdent à des fonctions de management, leur poste s'apparente plus souvent à du management de proximité mais sans réelle responsabilité hiérarchique. La taille de leur équipe, le statut de leurs collaborateurs, le périmètre de leur budget… est en général en deçà de ce qui est proposé aux hommes. Si on devait résumer et caricaturer un peu (oui forçons le trait pour mieux comprendre), on parlerait d’un pseudo management, ou un titre pour faire plaisir mais qui ne paie pas (vu que le salaire ne suit pas).
Plafond de verre avant le codir
23% de femmes dans les comex du CAC40 et 22% dans le SBF120 alors qu’elles représentent 33% des cadres
De même, les femmes accèdent moins souvent que les hommes au comité de direction ou comex. « Les femmes ne représentent que 22,95 % des membres des comités exécutifs des entreprises du CAC 40 alors qu’elles représentent 35,46% de la population des cadres, vivier traditionnel de recrutement des dirigeants souligne le dernier Observatoire Skema de la féminisation des entreprises.
Au sein du SBF 120, on ne compte toujours que 26,81 % de femmes dans ces instances selon l’étude sur la féminisation des instances dirigeantes de cet indice. A périmètre constant, il manque aujourd’hui 212 femmes dans les comex du SBF 120 pour atteindre le seuil de 40 %. Autant de femmes à promouvoir ou à recruter. Sans compter les professionnelles qu’il faudra remplacer sur la période. Pour atteindre cette nouvelle proportion imposée par la loi Rixain d’ici le 1er mars 2030, les grands noms du CAC 40 vont devoir nommer et/ou embaucher 78 femmes supplémentaires. Mesdames, à vos CV !
Congé parental et paternité : les pères, présents à court terme mais grands absents à long terme
70% des pères cadres prennent leur congé de paternité
Commençons par la bonne nouvelle : 7 pères sur 10 prennent leur congé paternité, dont la moitié dans le mois qui suit la naissance selon une étude du Cereq. Sauf que, comme souvent, ce chiffre cachent de forte disparité. Sur le sujet, les plus hauts revenus en général ne montrent pas l’exemple. « Les pères les mieux rémunérés sont susceptibles de valoriser leur investissement dans leur emploi ou de ressentir une injonction à la disponibilité plus forte, par exemple s’ils exercent un poste de direction. Par ailleurs, le montant maximal des indemnités journalières (84,90 € en 2017) peut entraîner une perte de revenu chez les salariés du secteur privé aux salaires les plus élevés », soulignent les auteurs. Des données correllées par la Chaire diversité et inclusion de l’Edhec qui indique que les pères qui émargent à plus de 4238 euros sont ceux qui y ont le moins recours. Le revenu étant corrélé avec des responsabilités et une charge de travail importantes, ces pères CSP+ hésitent davantage à passer par la case biberonnage. Et que dire des femmes avec des revenus et des responsabilités équivalentes… mais là n’est pas le débat (quoique).
Seuls 15550 pères ont pris un congé parental contre 238 000 mères.
Passons désormais, à la bad news : le congé parental (ou administrativement, la PréPare pour Prestation d’éducation partagée de l’enfant) et les pères. En 2020, selon le dernier opus de l’Observatoire national de la petite enfance paru en 2021, seuls 15 550 pères (contre 17200 un an plus tôt) ont arrêté de bosser (entièrement ou partiellement) pour s’occuper de leur(s) kid(s) contre 238 690 (259 000 mères en 2019). Les preuves sont là : ce sont encore les femmes qui se collent à l’éducation des jeunes enfants, au détriment donc (entre autres) de leur progression de carrière.
Formations : un gars, une fille (cadre), même traitement
Parus en juillet 2020, les chiffres du ministère du travail sur les inégalités hommes-femmes en matière de formation professionnelle continue se basent sur des données récoltées entre 2010 et 2015 (donc un peu anciennes) mais donnent tout de même une bonne vision d’ensemble de la situation. Si on résume, on constate que plus les femmes sont diplômées, plus elles suivent des formations. Sur le sujet, les femmes cadres font même « cours » égal avec les hommes. Environ sept femmes ou hommes sur dix ont suivi une formation au cours des cinq années précédentes.
Conseils d’administration : la parité progresse vraiment
Pas de quotas, pas de résultat.
12 ans (eh oui il en aura fallu du temps) depuis le vote de la loi Coppé-Zimmermann qui impose 40% de femmes dans les conseils d’administration, ça twiste enfin dans les salles des conseils. En gros, quand il y a des quotas et un suivi, la loi est un succès. On applaudit ainsi des conseils paritaires au sein des grandes capitalisations boursières. 46,2% d’administratrices pour les grandes entreprises cotées du CAC40 (contre 10% en 2009) en 2020 et 46,1% pour le SBF120 selon l’étude Ethics & Boards « Où en est la mixité des instances dirigeantes ? » (mars 2022). Grâce à ces résultats, la France est sur la première place du podium au sein de l’Union européenne. », se félicite la Haut Conseil à l’Égalité. Voilà pour les bons élèves car après, ça se corse. Même avec des quotas, s’il n’y a pas de suivi, ça coince.
Dans les entreprises cotées en deçà du SBF 120, les femmes ne sont plus que 34,1% (2018) « Les entreprises non cotées, de 500 salari.é.es et plus et au moins 50 millions de CA, compteraient 23,8% de femmes en 2018 dans les CA », note le Haut Conseil à l’égalité (HCE). Et que dire des entreprises « no quota » ? C’est simple : pas de quotas, pas de résultat. A peine 17% de femmes aux CA des boites cotées sur Eurogrowth. Qui a dit que les quotas ne servaient à rien déjà ?
Impact de la Covid en 2020 : les femmes plus durement affectées
Pas question de monter les femmes contre les hommes (ou inversement) mais les faits sont là ! « Si la crise impacte l’ensemble des salariés (33% d’entre eux considèrent que la pandémie a des conséquences négatives sur leurs perspectives de carrières), elle affecte plus durement les femmes », note le Boston Consulting Group dans une étude dédiée. Seuls 6 femmes sur 10 ont confiance en leur avenir professionnel, soit 15% de moins que les hommes. « Par rapport à leurs collègues masculins, elles sont 13% de moins à avoir entretenu leur réseau professionnel depuis le début de la crise, et 29% de moins à avoir pris la parole en réunion », soulignent les auteurs.
En termes de conditions de travail, ce n’est pas non plus la panacée : elles sont moins nombreuses que les hommes à disposer d’un espace isolé pour bosser. Et ce sont elles que l’on interrompt le plus souvent dans la journée quand elles télétravaillent à leur domicile. Et puis, on ne peut pas ne pas mentionner la charge mentale domestique. Certes, depuis la crise, les hommes en font plus à la maison, « ce qui laisse espérer une transition vers un "nouvel équilibre" à plus long terme ». « Mais, même si l’augmentation des tâches domestiques et le temps consacré aux enfants concernent tous les parents salariés, les femmes portent toujours le plus gros du poids. Cette difficile conciliation vie professionnelle et personnelle pèse davantage sur la santé mentale des femmes : elles sont 1,3 fois plus susceptibles d'être en situation d'anxiété » souligne les auteurs.
Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.