Six métiers à impact contre le fléau de l’obésité

Aurélie Tachot

TEMOIGNAGES – C’est une "épidémie" qui gagne du terrain selon les termes de l'OMS (Organisation mondiale pour la santé). En France, 7 millions d’adultes souffrent d’obésité, soit environ 15 % de la population. Cet enjeu sanitaire, plusieurs cadres en font leur cheval de bataille au quotidien, en travaillant dans le médical, la BioTech, l’agroalimentaire, le sport... Quels métiers ont véritablement de l’impact ? Quels postes permettent de réduire vraiment ce fléau ? En témoignant, ces six professionnels espèrent susciter de nombreuses vocations chez les cadres, notamment ceux cherchant à se reconvertir.

Dans cette série d'oeuvres intitulée "Self made man", l'artiste mexicain Víctor Hugo Yáñez Piña représente des sujets sculptant leur silhouette idéale dans leur propre corps. Source : https://escultores.com.mx/ Au premier plan, les six professionnels travaillant sur le fléau de l'obésite qui ont accepté de parler de leur métier à notre journaliste.

Six métiers à impact contre le fléau de l’obésité
Dans cette série d'oeuvres intitulée "Self made man", l'artiste mexicain Víctor Hugo Yáñez Piña représente des sujets sculptant leur silhouette idéale dans leur propre corps. Source : https://escultores.com.mx/ Au premier plan, les six professionnels travaillant sur le fléau de l'obésite qui ont accepté de parler de leur métier à notre journaliste.

Ils témoignent

  • Jeanne Bottin, Health Strategy Senior Manager chez Danone
  • Kevin Caillaud, Chief Science & Innovation Officer chez Kinvent
  • Aline Victor, chef de projet expertise Nutrition & Business Développement chez Nutrisens
  • Caroline Pechery, co-fondatrice de ScanUp
  • Hafida Ahansal, chargée de mission relations avec les usagers, les patients et de l’inclusion sociale au sein de la Ligue contre l’Obésité.
  • Jennifer Sitruk, directrice commerciale de Gymlib

Lutter contre l'obésité depuis un pôle R&D dans l’industrie agroalimentaire

Je mets tout le monde autour de la table pour les faire réfléchir sur un enjeu de santé publique.
Jeanne Bottin, Health Strategy Senior Manager chez Danone.

« Durant ma formation d’ingénieur agronome spécialisée dans la biologie de l’alimentation humaine, j’ai travaillé pour une ONG sur le sujet de la malnutrition puis en R&D sur celui des produits laitiers. J’ai ensuite fait un Doctorat sur la régulation de l’appétit chez les personnes en surpoids et obèses, au cours duquel j’ai dirigé plusieurs études cliniques. En 2014, j’ai estimé que j’allais avoir davantage d’impact sur la santé publique, notamment l’obésité, en intégrant un groupe comme Danone et en définissant les produits de demain plutôt qu’en restant dans le monde académique. Aujourd’hui, je suis en charge de la stratégie santé de Danone pour la catégorie des produits laitiers. Mon rôle est d’interagir avec les décideurs et leurs équipes sur ce qu’est un « bon » produit pour la santé, c’est-à-dire un produit fermenté, réduit en sucre, apportant des nutriments comme du calcium, des minéraux, des vitamines...  J’ai donc un rôle de catalyseur entre le marketing, la recherche et l’innovation. C’est un métier qui a du sens pour moi car je mets tout le monde autour de la table pour les faire réfléchir sur un enjeu de santé publique. »

L'OMS alerte sur le fléau de l'obésité en Europe

L’obésité est souvent désignée comme l’une des plus grandes menaces pour la santé publique au XXIe siècle. Selon des statistiques récentes de l’OMS, 59 % des adultes en Europe sont en surpoids ou obèses. Il s’agit du pourcentage le plus élevé de toutes les Régions de l’OMS, sauf celle des Amériques.

Le surpoids et l’obésité font partie des principales causes de décès et d’invalidité en Europe, et sont mis en lien avec beaucoup de pathologies telles que le cancer, le diabète et les maladies cardiovasculaires. Elles entraîneraient plus d’1,2 million de décès par an. Aujourd’hui, aucun des 53 pays européens n’est susceptible de parvenir à enrayer la progression des niveaux d’obésité pour 2025. 

La MedTech lutte contre l'obésité et attire des scientifiques reconvertis

Par ma mission, je participe à l’éducation thérapeutique des patients obèses.
Kevin Caillaud, Chief Science & Innovation Officer chez Kinvent

« Mon rôle au sein de la start-up Kinvent, qui commercialise des dispositifs connectés à destination des kinésithérapeutes, c’est de piloter la roadmap software (matériels et logiciels) et de rendre l’utilisation de nos dispositifs médicaux la plus simple possible. Je ne suis pas issu de la Tech mais du monde de la science. Après avoir travaillé sur le terrain, dans l’accompagnement des athlètes de haut niveau puis en cabinet auprès de personnes en surpoids souffrant de douleurs chroniques, j’ai basculé dans le monde de la Tech, qui est très ouvert aux profils non-issus du sérail. Mon métier a beaucoup de sens : j’accompagne le changement de paradigme qu’est la digitalisation des métiers de la santé et j’objective la santé des patients, notamment des personnes obèses. Via notre application, ces dernières peuvent en effet avoir accès aux données de santé qui les concernent et ainsi prendre le pouvoir sur leur situation. Par ma mission, je participe donc à l’éducation thérapeutique de ces patients. Je leur donne également confiance en eux en leur insufflant de la motivation, qui est clé pour les personnes obèses cherchant une nouvelle hygiène de vie. »

Diététiciens de l’agroalimentaire, des influenceurs au cœur de la lutte

Je travaille avec des équipes pluridisciplinaires qui apportent des solutions à des patients qui souffrent d’une pathologie comme l’obésité, la dénutrition, le diabète...
Aline Victor, chef de projet expertise Nutrition & Business Développement chez Nutrisens

« J’ai d’abord été diététicienne en libéral puis au sein d’un groupe de restauration collective de santé. Puis j’ai intégré l’industrie agroalimentaire. Chez Nutrisens, mes missions sont transverses : je travaille à la fois au développement des produits avec les équipes marketing et je forme nos commerciaux sur la technicité de nos produits. J’interviens également auprès de nos clients (médecins coordinateurs, directeurs médicaux, personnel non-médical...) afin de les sensibiliser à la nutrition. Ma fierté, c’est d’avoir créé un réseau composé de 80 diététiciens libéraux en France, en pleine période de crise sanitaire et d’avoir, par son biais, formé plus de 200 professionnels de santé ! Ce que je préfère dans mon poste, c’est de travailler avec des équipes pluri-professionnelles mais aussi d’apporter des solutions à des patients qui souffrent d’une pathologie comme l’obésité, la dénutrition, le diabète... Nous travaillons par exemple à développer des produits dédiés aux personnes obèses qui ont subi une chirurgie bariatrique afin qu’elles ne perdent pas leur masse musculaire. »

Une warrior à l’affût du Nutriscore au sein d'une FoodTech

Avec notre application, nous aidons les consommateurs, dont les personnes obèses, à choisir les produits qui sont bons pour leur santé.
Caroline Pechery, co-fondatrice de ScanUp

« Après avoir travaillé au sein du cabinet KPMG, en particulier auprès des franchises de restauration et de distribution, j’ai co-fondé l’application ScanUp, dont l’objectif est d’analyser la qualité des produits alimentaires présents en supermarché. Mon premier enjeu était d’apporter de la transparence sur la qualité nutritionnelle des produits, notamment via l’affichage de scores dont le Nutriscore et le score Nova, qui évalue le degré de transformation des produits, à l’origine de l’émergence de maladies chroniques comme l’obésité. Le second enjeu était d’accompagner les industriels dans l’élaboration de leur offre, donc d’améliorer leur recette en réduisant le sucre, le sel et les acides gras saturés de leurs produits. Nous leur fournissons par exemple des benchmarks lorsqu’ils lancent une nouvelle offre et qu’ils veulent la positionner sur leur marché. Aujourd’hui, ce qui me rend particulièrement fière, c’est d’avoir réussi à développer un outil qui a un impact. Avec notre application, nous aidons les consommateurs, dont les personnes obèses, à choisir les produits qui sont bons pour leur santé. C’est également d’avoir un rôle de lanceur d’alerte. »

Le choix associatif pour aider les personnes obèses

Mon métier me permet de répondre à un enjeu de santé publique, qui touche un Français sur deux, et sur lequel il y a un cruel manque de prévention.
Hafida Ahansal, chargée de mission relations avec les usagers, les patients et de l’inclusion sociale au sein de la Ligue contre l’Obésité.

« Avant d’intégrer la Ligue contre l’Obésité, je n’avais pas de connaissances particulières en matière d’obésité. Toutefois, cette pathologie m’interrogeait, parce qu’elle est multi-factorielle, et non simplement liée à une alimentation ou une sédentarité. Après avoir travaillé, par vocation, dans le secteur social, j’ai donc rejoint l’associatif, où je suis chargé de mission. C’est un métier qui me permet de répondre à un enjeu de santé publique, qui touche un Français sur deux, et sur lequel il y a un cruel manque de prévention. Mon rôle, c’est de gérer une ligne d’écoute, la seule de France dédiée à l’obésité. Cette dernière informe les patients, que je préfère appeler « bénéficiaires », qui ont parfois été des années dans une errance médicale. J’aide également les travailleurs sociaux et les professionnels de santé à orienter les personnes obèses vers des centres spécialisés, des soins de suite... Pour parfaire mon accompagnement, qui est d’ordre psycho-social, je me nourris du conseil scientifique qui m’entoure mais aussi du conseil patient. »

Commerciale dans une SportTech motivée à faire reculer les pathologies

Tous les matins, je me lève avec cette volonté d’aider les gens à transformer leur vie, pour qu’elle soit plus saine et plus active, grâce au sport.
Jennifer Sitruk, directrice commerciale de Gymlib

« Si j’ai rejoint Gymlib, c’est parce que j’avais envie de travailler pour une entreprise ayant pour mission d’offrir aux Français un mode de vie plus sain, dans un contexte où le niveau de stress au travail augmente. J’ai aujourd’hui la chance d’avoir de l’impact en aidant les salariés à avoir un meilleur équilibre de vie, via la pratique d’une activité sportive. Mon rôle en tant que directrice commerciale ainsi que celui de mon équipe composée d’une trentaine de personnes, c’est de convaincre les entreprises de développer la pratique du sport en interne. Je me souviens avoir échangé avec l’un de nos utilisateurs, qui m’avait confié avoir perdu 20 kilos en six mois. Il travaillait au sein d’un cabinet de conseil et occupait un poste plutôt sédentaire dans la Tech. Grâce à l’application, il s’était motivé à faire du running, du football et du renforcement musculaire avec ses collègues et avait ainsi retrouvé une meilleure hygiène de vie. Tous les matins, je me lève donc avec cette volonté d’aider les gens à transformer leur vie, pour qu’elle soit plus saine et plus active. Ça a beaucoup de sens ! »

 

 

Quels autres métiers peuvent avoir de l’impact dans la lutte contre l'obésité ?

 

  • Responsables de centres spécialisés dans la prise en charge de l’obésité (CSO)
  • Professionnels de santé spécialisés dans la chirurgie bariatrique
  • Enseignants en activité physique adaptée
  • Psychologues & psychiatres
  • Ingénieurs nutritionnistes
  • Chargés d’affaires réglementaires
  • Commerciaux dans l’agroalimentaire
  • Ingénieurs R&D produits
  • Chefs de produit
  • Ingénieurs IT dans la MedTech
  • Data scientists
  • Chargés de relation prescripteurs...

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Aurélie Tachot
Aurélie Tachot

Après avoir occupé le poste de rédactrice en chef d’ExclusiveRH.com (entre autres), je travaille désormais à mon compte. Pour Cadremploi, je contribue à la rubrique Actualités via des enquêtes, des interviews ou des analyses sur les évolutions du monde du travail, sans jamais oublier l'angle du digital.

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