
Ils témoignent
- Salomé Benhaïm-Cohen, psychologue clinicienne au sein du cabinet Stimulus
- Philippe de Azevedo, médecin addictologue à La Clinique des Platanes (Ramsay Santé)
La nomophobie, c’est quoi ?
Le terme nomophobie vient de la contraction de l’anglais « no mobile phobia ». Autrement dit, la peur de ne pas avoir son smartphone à portée de main et d’être coupé de ses fonctionnalités. La peur de le perdre, de le casser, de se le faire voler, de ne pas avoir de batterie, que le réseau soit insuffisant pour l’utiliser…
Elle concerne surtout les adolescents et les moins de 25 ans mais pas seulement. Elle touche aussi des salariés angoissés par leur performance professionnelle qui se sentent obligés d’être constamment joignables dans le cadre de leur travail. Et ce, malgré un droit à la déconnexion officiel. Mais ils n’y arrivent pas. C’est plus fort qu’eux.

Etes-vous atteint de nomophobie ?
Pour le savoir, répondez à ce questionnaire mis au point par des chercheurs à l’université de l’Iowa.
Résultats et notice (en anglais) ici
La nomophobie est-elle un trouble mental ?

« Ce trouble n’est toujours pas répertorié par le DSM-V (le manuel diagnostic et statistique des troubles mentaux). La nomophobie n’est pas encore incluse non plus d’ailleurs dans la CIM-10, la classification internationale des maladies », constate Salomé Benhaïm-Cohen, psychologue clinicienne au sein du cabinet Stimulus. C’est en fait une « maladie » du monde moderne intimement liée au développement des réseaux sociaux et de la communication virtuelle dans la vie perso mais aussi professionnelle. Elle peut aussi être liée à certains traits de personnalité, plus réceptifs au mécanisme de la récompense.
La nomophobie sera-t-elle un jour reconnue maladie professionnelle ?
« Pour que la nomophobie soit un jour reconnue comme maladie professionnelle, il faudrait prouver un lien de causalité entre l’utilisation intensive du smartphone au travail et la nomophobie. Il existe des études prouvant que le développement du télétravail a un impact sur l’usage du smartphone mais à ce jour, il faudrait encore des données plus importantes pour que cela devienne une maladie professionnelle », analyse Salomé Benhaïm-Cohen, experte en bien-être et santé au travail.

Pour Philippe de Azevedo, médecin addictologue à La Clinique des Platanes (Ramsay Santé), « il est quasiment impossible de prouver que la dépendance au smartphone est liée au travail car nous l’utilisons au final davantage dans la sphère privée que professionnelle. Il faudrait aussi démontrer que l’employeur impose l’usage de ce smartphone ».
Bref, la nomophobie n’est pas prête de faire son entrée dans le tableau des maladies professionnelles. « Elle ne fait même pas encore partie des addictions répertoriées par l’Organisation Mondiale de la santé. Mais on y viendra sans doute », conclut-il.

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.