Rapport Assises du travail : ce qui pourrait bien changer votre vie professionnelle dans les mois à venir

Sylvie Laidet-Ratier

RAPPORT ASSISES DU TRAVAIL - La réforme des retraites à peine votée, le gouvernement avait promis de s’attaquer au travail. Ou plutôt de s’attaquer aux maux des travailleurs et de leurs employeurs. Le rapport du Conseil national de la refondation vient d’être remis ce jour au ministre du Travail par Sophie Thiéry, présidente de la commission travail et emploi du Conseil économique social et environnemental (Cese), et de Jean-Dominique Senard, président du groupe Renault. Réalisé à l’issue des Assises du travail, le titre est alléchant : « Re-considérer le travail ». Voilà ce qui pourrait bien changer (par la loi, des accords de branche, des accords d’entreprises…) dans votre vie professionnelle dans les mois à venir, si les propositions qu'il contient venaient à être suivies d’effet.

Ce 24 avril, Jean-Dominique Senard (à gauche) et Sophie Thiéry ont remis un rapport, suite aux travaux du Conseil national de la refondation, au ministre du Travail, Olivier Dussopt. Photo : compte Twitter du ministère du Travail.

Rapport Assises du travail : ce qui pourrait bien changer votre vie professionnelle dans les mois à venir
Ce 24 avril, Jean-Dominique Senard (à gauche) et Sophie Thiéry ont remis un rapport, suite aux travaux du Conseil national de la refondation, au ministre du Travail, Olivier Dussopt. Photo : compte Twitter du ministère du Travail.

Formation continue : des sessions renforcées pour les managers

Le rapport* pointe du doigt que les managers, toujours entre le marteau et l’enclume, sont désormais investis de nouvelles missions. Notamment celle de faire collaborer des collectifs de travail œuvrant sur site et/ou à distance. Le tout teinté de fortes attentes en matière de RSE. Pas simple.

Alors les auteurs préconisent de renforcer la formation continue pour les managers. « Un point de départ pourrait être la nouvelle certification “CLEA management”, issue de la démarche paritaire menée par Certif’pro, qui identifie les compétences-clefs d’un management répondant à une logique fonctionnelle, et s’appuie sur des fondamentaux partagés (donner du sens au travail, conduire un travail coopératif et des modalités participatives de travail, par exemple », expliquent les auteurs du rapport.

Dialogue social : davantage d’échange en dehors des instances représentatives traditionnelles

Les auteurs recommandent de « renouveler la démocratie au travail en généralisant le dialogue professionnel sur la qualité et l'organisation du travail, dans le secteur public comme dans le secteur privé ».

Ils suggèrent également « d'abaisser le seuil d'obligation d'installation d'une Commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) sur la base d'accords de branches étendus, notamment dans les secteurs d’activité les plus exposés aux risques professionnels ».

RSE : une évaluation des entreprises à mission

Objectif ? Redonner un nouvel élan aux entreprises à mission. Comment ? En évaluant l’impact, en termes de qualité du travail, du choix du statut d’entreprise à mission et de l’élargissement de la participation des salariés à la gouvernance des entreprises.

Vie pro-vie perso : vers généralisation la semaine de 4 jours ?

Pour répondre aux attentes des salariés sur un meilleur équilibre vie pro / vie perso, le rapport préconise de faire une évaluation grandeur nature des entreprises passées à la semaine de 4 jours. Ce qui permettrait aux salariés dont le poste n’est pas télétravaillable de profiter de jours off supplémentaire.

Vie pro-vie perso : rendre efficient le droit à la déconnexion

Pourtant inscrit dans le code du travail, ce droit à déconnecter le soir, le week-end, pendant les vacances… est, pour l’instant, très peu respecté par les employeurs et les salariés eux-mêmes. Les rapporteurs du texte encouragent donc « la signature de chartes des temps co-construites, y compris les chartes de parentalité ; les faire vivre dans la durée, en les animant et en les actualisant régulièrement avec les travailleurs ».

Ils préconisent également de former les managers à ce sujet, et notamment d’être sensibilisés aux bonnes pratiques pour repérer les signaux faibles d’épuisement professionnel. Rien de bien nouveau sous le soleil, en somme.

Congé : création d’un compte épargne temps universel portable

Déjà dans le programme électoral d’Emmanuel Macron, le compte épargne temps universel permettant de capitaliser des jours de congé non pris pour en disposer plus tard, et ce, même en cas de changement d’entreprise, refait surface dans ce rapport. Une banque de temps portable en somme !

 

Seniors : aménager les fins de carrière

En plus du dispositif de retraite progressive qui vient d’être entériné par la nouvelle loi portant réforme des retraites, les auteurs de ce rapport préconisent de « concevoir un dispositif d’aménagement des fins de carrière permettant une diminution progressive d’activité compensée partiellement pour les entreprises/organisations et les travailleurs ». Malheureusement sans en dire plus. Donc une nouvelle piste à creuser pour le (semi)-maintien dans l’emploi des seniors.

Reconversion : des dispositifs plus lisibles

Parce que l’intelligence artificielle fait le forcing et parce que les enjeux liés au réchauffement climatique, aux énergies, aux nouvelles technologies sont réels, les métiers évoluent et vont continuer de changer. Certains salariés pourront prendre le train en marche en se formant, d’autres devront peut-être se reconvertir… Quelle que soit l’option, des dispositifs (CPF, C2P, CEP, etc.) existent déjà pour chacun de ces parcours. Sauf que leur lisibilité (et leur compréhension) est quasi nulle pour le commun des mortels.

Le rapport pointe du doigt l’utilité de créer un portail unique d’accès aux différents comptes sociaux (CPF, C2P, CEP) afin d’en assurer la connaissance et surtout la mobilisation par tout un chacun. Suffisant pour s’y retrouver dans cet imbroglio administratif ?

 

Social : des parcours professionnels davantage sécurisés grâce à des droits sociaux portables

Les Assises du Travail ont relevé les difficultés qu’avaient les différentes catégories de travailleurs précaires d’une part à se constituer des droits sociaux et d’autre part à pouvoir les utiliser. Notamment l’absence ou la faiblesse des indemnités journalières, d’une couverture au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, l’accès au chômage, aux pensions de retraite… Outre une mission IGA-IGAS-IGF visant à évaluer le caractère effectif des droits sociaux acquis par les travailleurs dont les contrats de travail sont les plus précaires, dans le secteur privé et dans les fonctions publiques, ce rapport insiste sur le fait qu’une négociation puisse déboucher sur une couverture décente du risque accidents du travail et maladies professionnelles pour tous les travailleurs des plateformes par exemple.

 

Santé au travail : se concentrer sur la prévention primaire

Le rapport insiste sur la notion de « prévention primaire » pour limiter les accidents du travail, maladies professionnelles et autres troubles psychosociaux chez les salariés. Et recommande « d’ajouter un 10e principe général de prévention à l’article L.4121-2 du code du travail : écouter les travailleurs sur la technique, l’organisation du travail, les conditions de travail et les relations sociales ».

Les auteurs préconisent également de renforcer la formation des salariés et des employeurs sur le sujet. Mais aussi d’insister sur ces sujets dans les formations initiales.

REPLAY video : Conférence de presse à l'occasion de la remise du rapport au ministre du Travail le 24 avril

Texte intégral du rapport des Assises du travail du 24 avril 2023

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Sylvie Laidet-Ratier
Sylvie Laidet-Ratier

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.

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