Reconversion : les cadres en rêvent mais très peu passent à l’acte au final

Sylvie Laidet et Sylvia Di Pasquale

ETUDE APEC RECONVERSION – Enfin ! Enfin une étude qui parle vrai sur le sujet de la reconversion professionnelle, chiffres à l’appui : selon l’Apec, près d’un tiers des cadres en rêvent mais seulement 8% d’entre eux ont réellement entamé des démarches pour y parvenir. Du fantasme à la réalité, voici les typologies des rêves de reconversion et les raisons pour lesquelles le passage à l’acte est si complexe.
Reconversion : les cadres en rêvent mais très peu passent à l’acte au final

Un tiers des cadres aspirent à une reconversion professionnelle, seuls 8% passent à l’acte

Dans son étude Trajectoires Parcours & Inégalités consacrée à la reconversion professionnelle des cadres*, l’Apec indique que 31 % des cadres ont un projet de reconversion dans le but de changer de métier.

Cette intention est plus répandue chez les cadres au chômage (60 %) et chez les cadres de moins de 35 ans (45 %). En revanche, elle concerne moins les cadres évoluant dans des secteurs ou des fonctions dynamiques, dans des métiers en tension comme l’informatique ou l’ingénierie R&D, par exemple .
Etude « Reconversion professionnelle des cadres », Apec 2022

Les cadres seraient donc enclins à tout envoyer balader ! Sauf que du rêve à la réalité, il y a parfois un grand écart que les cadres même hyper motivés, ne semblent pas prêts à combler.  

 

Quand il s’agit de passer à l’action, les cadres semblent quelque peu se débiner. Selon l’Apec, seuls 8% des cadres donc ont réellement entamé des démarches en vue d’une reconversion professionnelle.

Les typologies de souhaits de reconversion

Leurs motivations pour changer de job ? Elles sont diverses et variées et parfois même s’additionnent.

Se reconvertir car insatisfait de son boulot actuel

  • Quête de sens
  • Nécessité de rebondir
  • Lassitude, envie d’un second souffle
  • Recherche de meilleures conditions de travail
  • Désir de promotion sociale

 

On doit évidemment parler de la fameuse quête de sens. Vous savez celle qui vous fait sentir en décalage entre votre boulot et vos aspirations, entre vos valeurs et votre formation initiale. Bref, un job qui, au quotidien sur le terrain, ne vous correspond plus.

Pour certains, c’est la lassitude du métier qui amorce des velléités de changement. « Ils souhaitent se relancer en acquérant de nouvelles compétences et en exerçant un nouveau métier », précise l’étude Apec.

D’autres doivent faire face à une dégradation de leur environnement de travail pouvant aller jusqu’à la rupture du contrat (licenciement, rupture conventionnelle, etc.).

Enfin, le manque de reconnaissance professionnelle, en termes de salaire ou de promotion, génère aussi une insatisfaction, qui pousse les cadres à envisager un projet de reconversion.

 

Se reconvertir pour des raisons perso

  • Recherche de meilleures conditions de vie
  • Envie de se reconnecter à une passion

 

Une reconfiguration de la vie personnelle peut aussi expliquer (ou s’ajouter) un projet de reconversion professionnelle. Il peut être lié à la recherche d’une meilleure qualité de vie, à des épreuves qui changent la donne (divorce, décès, maladie, etc.) ou à des changements, positifs dans sa situation personnelle (déménagement, naissance d’un enfant, etc.).

Peu de reconversions radicales

 

Contrairement aux idées reçues, les envies de reconversion ne sont pas si radicales que ça. En tout cas, moins radicales que chez les autres aspirants au changement.  

 Dans plus de 6 cas sur 10, le choix du cadre est de s’orienter vers un métier proche de son métier actuel. Seuls 15 % des cadres ayant un projet de reconversion optent pour un métier radicalement diffèrent. Ceux-ci souhaitent rompre avec leur situation présente en changeant d’abord de secteur d’activité (82 %), de région (54 %) ou en se mettant à leur propre compte (56 %).
Etude « Reconversion professionnelle des cadres », Apec 2022

Reconversion professionnelle : les cadres activent plusieurs freins pour ne PAS se lancer

Parmi les freins qui « bloquent » les cadres dans une potentielle reconversion, on retrouve :

  • La complexité à identifier la viabilité de leur projet lors de son lancement et donc de prendre trop de risque
  • La difficulté de convaincre les différents interlocuteurs qu’ils auront à rencontrer, que ce soit pour obtenir un poste ou dans le cadre d’une création d’entreprise.
  • Le sentiment de ne pas avoir les moyens d’assumer financièrement
  • La peur d’avoir une moins bonne rémunération ou de moindres perspectives de carrière
  • La peur de perdre leur statut social. La peur du déclassement en somme !
  • L'attachement à leur diplôme initial :

Pour les cadres, le diplôme est un déterminant de leur parcours professionnel. Se reconvertir revient, pour eux, à renoncer à leur identité professionnelle. Or ils sont attachés et s’attachent à ce qui les détermine. Et puis, pour exercer un autre métier, il faut, selon eux, impérativement se former, reprendre des études et décrocher un nouveau diplôme. C’est long, c’est cher et souvent ils n’en ont pas le courage. Ils savent, pour avoir eux-mêmes parfois participer à des recrutements, que le diplôme est un filtre dans les processus de sélection des candidats. Et ils ne souhaitent pas passer par ce filtre s’ils n’ont pas le bon diplôme. On arrive donc à une situation complètement paradoxale : les cadres diplômés de l’enseignement supérieur, donc théoriquement ceux qui ont le plus de possibilités d’évoluer dans leur carrière, se retrouvent les moins libres de bouger.
Laurent Polet, co-fondateur de l’école Primaveras, également professeur de management à CentraleSupélec

* Etude "Parcours et réalité des reconversions professionnelles des cadres", décembre 2022

Tous nos conseils pour se reconvertir

Sylvie Laidet et Sylvia Di Pasquale
Sylvie Laidet et Sylvia Di Pasquale

Sylvie Laidet, journaliste indépendante, réalise des enquêtes sur le monde du travail. Sylvia Di Pasquale est rédactrice en chef de la partie Actualités de Cadremploi.

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