Pourquoi les start-up françaises gèlent moins leurs recrutements que les autres

Gwenole Guiomard

ETUDE – Alors que les recrutements baissaient partout ailleurs de 41%, les start-up françaises ont beaucoup moins subi la récession depuis le début de l'année, selon une étude américaine. Avec "seulement" 9% de baisse des postes ouverts, les Frenchies s'en sortent mieux. Pourquoi cette exception ? Des aides gouvernementales plus importantes, une gestion plus prudente et un tropisme pour le business to business réputé plus solide. Eclairage de Claude Calmon et conseils carrière d'Emmanuel Stanislas, fins connaisseurs de la French Tech.

Claude Calmon, fondateur de Calmon Partners Group, et Emmanuel Stanislas, DG du cabinet Clémentine, commentent l'étude NGP Capital sur les recrutements des start-up françaises.

Pourquoi les start-up françaises gèlent moins leurs recrutements que les autres
Claude Calmon, fondateur de Calmon Partners Group, et Emmanuel Stanislas, DG du cabinet Clémentine, commentent l'étude NGP Capital sur les recrutements des start-up françaises.

Ils témoignent

  • Claude Calmon, fondateur de Calmon Partners Group, une société tripartite associant un cabinet de recrutement, une structure d’accompagnement à la levée de fond et une agence de communication
  • Emmanuel Stanislas, directeur du cabinet de recrutement Clémentine

Coup de gel mondial dans les start-up

Pour les start-up, est-ce aussi la fin de « l’abondance » prédite par le président Emmanuel Macron le 24 août 2022 ?  Une étude* de NGP Capital, société de capital-risqueur spécialisée dans la tech, confirme en tous cas un coup de gel mondial.

 Dans cette étude qui prend le pouls des emplois dans 12 000 start-up à travers le monde, « les offres d’emploi ont baissé de 40 %, au niveau mondial entre février et juin 2022 » et même de 60 % pour les start-up BtoC (dédiées à la vente aux particuliers).

Si lors de la semaine du 30 janvier 2022, 14 944 jobs se sont ouverts, ils n’étaient plus que 8 813 la semaine du 19 juin dernier…

Des start-up françaises plus résistantes

Surprise, « les start-up françaises ont moins souffert que leurs consœurs    européennes ou américaines, explique NGP Capital. Leur nombre d’offres d’emploi n’a baissé que de 9 % en 5 mois » contre une baisse, par exemple, de 60 % en Suède et en Allemagne ou de 53 % en Grande-Bretagne…

Source : étude NGP Capital*

Comment expliquer cette résistance ?

 

Merci les aides de l’Etat

Claide Calmon

 « La principale explication réside dans le fait que ces start-up ont pu bénéficier de beaucoup plus d’aides étatiques que leurs homologues européennes ou américaines, notamment le plan garantie par l’état (PGE). Cela a permis aux start-up français de se maintenir à flot voire se développer et ne pas licencier », explique Claude Calmon, fondateur de Calmon Partners Group. Il y a donc eu peu d’impact sur le recrutement et les levées de fond ont continué bon train ».

 

Des investissements plus prudents et un tropisme BtoB plus protecteur

Le culturel a aussi joué. Les investisseurs français sont plus sensibles aux risques, investissent moins, concentrent leurs fonds aux start-up les plus solides, avec des processus plus complexes, plus longs et des analyses plus poussées…

A cela, il faut ajouter des investisseurs français finançant des start-up BtoB, des sociétés prenant moins de risques que celles qui travaillent à destination de consommateurs individuels (BtoC), plus versatiles et moins « fortunés ».

Est-il encore prudent de postuler dans les start-up ?

Emmanuel Stanislas

Face à cette crise, les cadres doivent-ils alors délaisser les start-up ?

« Je ne parlerai pas de crise, tempère Emmanuel Stanislas, directeur du cabinet de recrutement Clémentine, spécialisé dans l’embauche de cadres experts en digitalisation. Mais plutôt de temporisation et des start-up plus économes par peur d’un retournement de tendance. Mais, quoi qu’il en soit, les cadres de ces sociétés n’ont pas de soucis à se faire. Ils ne dépendent pas de la santé financière de leur boîte mais de leur employabilité. Et cette dernière est excellente. Je constate une "décorrélation", assez unique, entre un éventuel ralentissement économique et les embauches. Ces dernières sont au firmament. J’invite donc les cadres de la tech à rester sereins. Il y a énormément d’offres d’emploi sur le marché. et s’ils ne trouvent pas de job dans une start-up ou s’ils perdent leur job, tous les autres employeurs recherchent des spécialistes de la transformation digitale. 10 % de mon chiffre d’affaire sont réalisés par des employeurs publics comme la CAF, le CNED ou les CCI. Les grands groupes recrutent aussi en masse ».

Gwenole Guiomard
Gwenole Guiomard

Je suis journaliste spécialisé dans les questions de formation et d’emploi. L’un ne doit pas aller sans l’autre et la compréhension des deux permet de s’orienter au mieux. Je rédige aussi, tous les deux ans, le Guide des professionnels du recrutement. Je suis aussi passionné d’histoire et amoureux des routes de la soie.

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