Témoignages : comment elles vivent la non-mixité dans leur métier

Sylvie Laidet-Ratier

EXPERTES DANS UN MILIEU TRES MASCULIN – Traditionnellement, l’expertise juridique après sinistre est surtout un métier d’hommes. Un job de terrain où les femmes doivent parfois jouer des coudes. Mais les choses changent. Et chez Eurexo, une société d’expertise en gestion de sinistres, il y a aussi des femmes. Deux d’entre elles, Julie Lethelier et Marie-Flore Fumadelles, nous racontent comment elles vivent cette non-mixité. L’une est au taquet, l’autre ne voit presque pas de différence de traitement.

Julie Lethelier et Marie-Flore Fumadelles, expertes chez Eurexo, ne ressentent pas la non-mixité dans leur métier de la même façon.

Témoignages : comment elles vivent la non-mixité dans leur métier
Julie Lethelier et Marie-Flore Fumadelles, expertes chez Eurexo, ne ressentent pas la non-mixité dans leur métier de la même façon.

Marie-Flore Fumadelles, 36 ans : « il faut avoir du caractère et être capable de recadrer »

Marie-Flore Fumadelles

Son poste : experte conciliatrice chez Prunay Protection Juridique (groupe Eurexo) à Bordeaux.

Des anecdotes sur son quotidien de femmes dans un monde d’hommes, Marie-Flore Fumadelles en a à la pelle. Comme cette fois, où lors d’une expertise, un assuré tente d’abord de lui mettre la main aux fesses pendant la visite. Pour, à la fin, lui caresser le visage en commentant « Qu’est-ce qu’elle est mignonne l’experte ». Face à ces gestes déplacés de la part d’un assuré, c’est une colère froide qui l’a emportée. « J’ai appelé mon mandant pour lui signaler les faits et j’ai rédigé un rapport d’expertise factuel et objectif », se souvient-elle.

Une autre fois, sur un gros chantier, le conducteur de travaux s’adresse exclusivement à ses trois confrères… hommes.

« Au bout de 5 minutes, j’ai dit avec le sourire ‘’excusez-moi, mais vous avez 4 experts en face de vous’’ ». Et le conducteur de travaux de s’excuser de sa gaffe par manque d’habitude. J’ai renchéri avec un ton très ferme « ce n’est pas grave mais à partir de maintenant, faites bien attention, et tout se passera pour le mieux », raconte-t-elle volontiers.

Cette jeune femme, fière de faire évoluer les mentalités sur davantage de mixité dans des sphères très masculines, ne croise parfois que quelques femmes par mois parmi les experts présents sur les sinistres. « Pour se faire respecter, il faut avoir du caractère et être capable de recadrer. Parfois même fermement. Encore plus que mes confrères, je dois aussi user de jargon technique pour prouver que je maitrise le sujet », déplore-t-elle. Et du caractère, elle n’en manque pas !

Julie Lethelier, 45 ans : « Je n’ai rien à prouver de plus du fait de mon genre »

Julie Lethelier

Son poste : responsable des agences Eurexo de Rouen et Caen

Sur 20 employés, Julie Lethelier encadre 10 femmes… toutes assistantes et 10 experts dont une seule femme. « Au quotidien, j’insiste bien sur le fait que les assistantes sont là pour assister les experts et pas pour être leurs secrétaires. Les assistantes ont de vraies compétences en matière d’expertise. Dans les rapports, elles sont capables de relever des oublis, des imprécisions… Elles travaillent en collaboration avec les experts et pas à leur service », prévient d’emblée Julie Lethelier, la seule responsable d’agence d’expertise dommage parmi la dizaine que compte Eurexo en Normandie.

Pour elle, évoluer dans un univers non mixte n’est pas un sujet. « Je ne me souviens pas d’avoir entendu de mauvaises réflexions sur le fait d’être une femme. Ou que j’ai eu à prouver quoi que ce soit du fait de mon genre. A compétences égales, les femmes peuvent tout à fait se faire une place dans ce secteur. Et d’ailleurs, j’encourage toutes celles qui le souhaitent à se lancer. On a une femme PDG, ça peut aider aussi », insiste-t-elle.

Avant de reconnaître, mais alors du bout des lèvres, que « tout n’est pas toujours rose », qu’il y a parfois « quelques coups de griffe » mais que l’humour arrange bien des situations.

Dans l’hypothèse où on lui ferait sentir qu’elle n’est pas exactement à sa place, il lui arrive de répondre en souriant « Voulez-vous que je m’en aille ? ». Un ange passe et le dialogue reprend.

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Sylvie Laidet-Ratier
Sylvie Laidet-Ratier

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.

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