Réussir son entretien d'embauche dans une mutuelle santé

Sylvie Laidet-Ratier

Très attachées aux valeurs humanistes, à l’intérêt général mais aussi (et surtout) à leur histoire, les mutuelles de santé recherchent des candidats qui leur ressemblent. Du moins des candidats capables de s’adapter à leur environnement très consensuel et déconnecté de la course au profit à tout prix.
Réussir son entretien d'embauche dans une mutuelle santé

Quand l’intérêt général prime 

On ne postule pas dans une mutuelle de santé comme on postulerait ailleurs. Les recruteurs ne sont pas exactement des employeurs comme les autres. « Y aller en pensant que c’est la même chose que de travailler chez un assureur ou dans une banque est une grossière erreur. Au mieux, vous ne serez pas retenu, au pire, vous y serez en souffrance », prévient d’emblée Guillaume Chocteau, délégué général de Ressources Solidaires, un portail de recrutement et de sensibilisation à l’économie sociale et solidaire. « Les valeurs y sont par exemple complètement opposées à celles de la banque. Dans les mutuelles, le sens de l’humain prévaut », illustre Florence Paul-Leblache, consultante en recrutement au sein du cabinet TalentPeople. L’intérêt général prime sur l’intérêt particulier. Lors des entretiens d’embauche, les recruteurs apprécient les candidats capables de rendre visible des expériences de solidarité au sein d’une équipe. « Dans ce secteur plus qu’ailleurs, les centres d’intérêt sont passés au peigne fin. Le candidat est-il tourné vers les autres ? Au delà du déclaratif, le fait qu’il puisse illustrer concrètement son engagement comme président,  trésorier, etc dans une association est un bon indicateur de sa fibre solidaire », résume Anne-Sophie Luçon, responsable des divisions Banque et Assurance du cabinet Michael Page.

 

Faites en toute une histoire

Pour marquer des points face à un recruteur du secteur de la mutualité, les candidats doivent aussi (et surtout) s’intéresser aux origines de la mutuelle visée. « Toutes ont une histoire différente et sont marquées par des courants politiques ou religieux, voire des obédiences différentes », insiste Guillaume Chocteau, également ancien salarié du monde mutualiste. Très implantée dans l’Éducation Nationale via ses élus, le rapport à l’école et à l’enseignement est par exemple très prégnant à la MGEN. « Donc les candidats devront être capables de dialoguer avec des profs. Harmonie Mutuelle est davantage marqué par un courant CFDT donc plutôt réformiste », ajoute-t-il. Récemment, un président de mutuelle insistait pour rencontrer des candidats connaissant bien la culture ouvrière. « Pour sonder cette fibre-là, nous avons par exemple demandé aux candidats s’ils avaient déjà travaillé avec des partenaires sociaux, s’ils avaient par exemple un ancrage dans une région ouvrière », commente Anne-Sophie Luçon.

 

Politiquement correct

Outre une bonne maîtrise de l’histoire des mutuelles, le candidat doit savoir qu’il devra composer avec une double contrainte hiérarchique. D’un côté son manager direct, un opérationnel, de l’autre, des élus qui peuvent parfois interférer dans les décisions et qui ont souvent le dernier mot. « Plus on monte dans la hiérarchie, plus le job devient politique. En entretien, un recruteur va donc s’attacher à vérifier la capacité du candidat à dialoguer avec l’autre monde, celui des élus », observe Guillaume Chocteau. Pour éclairer le positionnement du candidat sur le sujet, il actionne 2-3 questions piège dont une sur la gestion de conflit. « La réponse la plus fréquente est de mettre tout le monde autour de la table pour sortir de la crise par le haut. Dans une mutuelle, cette solution peut être fatale car un élu parle à un élu, un administrateur dialogue avec un autre administrateur. Il faut connaître les règles du jeu», illustre-t-il.

 

Mercenaire s’abstenir 

La question du non-profit des activités de mutuelles de santé est parfois également mise sur le tapis lors des entretiens. « Si nous recherchons l’excellence opérationnelle et l’efficacité auprès des candidats, nous les questionnons aussi sur leurs motivations pour rejoindre le secteur de l’économie sociale », commente Hélène Terrien-Thomas, responsable RH métiers de La Mutuelle Générale. Un secteur à vocation non lucrative donc l’inverse du secteur marchand. « Nous sommes sensibles à l’intérêt du collectif qui porte le candidat dans l’exercice de ses activités », ajoute-t-elle. Pendant longtemps, les commerciaux de ce secteur mutualiste ne touchaient d’ailleurs pas de part variable individuelle. « Et puis pour gagner des parts de marché notamment sur les contrats collectifs santé, les mutuelles ont compris qu’elles devaient motiver leurs commerciaux avec une part variable », constate Anne-Sophie Luçon. Il n’en demeure pas moins que la course au profit n’est pas le principal moteur des mutuelles.

Sylvie Laidet-Ratier
Sylvie Laidet-Ratier

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.

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