Philippe Gerbet, DRH de MGEN : "Nous sommes vigilants sur la condition physique de nos salariés"

Sylvia Di Pasquale

Pourquoi un employeur aurait-il intérêt à promouvoir l’activité physique de ses salariés ? Pour montrer l’exemple bien sûr. Car cette mutuelle vend justement une offre appelée « Mon stade » qui vise à aider les employeurs à remettre leurs employés au sport. Prévention des troubles musculo-squelettiques, et même amélioration du climat social, c’est ce que promet la plaquette. Mais quel intérêt un candidat peut-il trouver à postuler dans une boîte qui encourage le mens sana in corpore sano ? Découvrez les arguments de Philippe Gerbet, le DRH de la MGEN, qui embauche 500 à 600 personnes chaque année.

Cadremploi : Depuis combien de temps n’êtes-vous pas allé à la salle de gym de la MGEN ?

Philippe Gerbet : « Depuis la semaine dernière ! Nous sommes une complémentaire santé, le bien-être et la condition physique de nos salariés, c’est essentiel. Avec nos partenaires de "Mon stade", nous avons ouvert depuis un an, au siège de la MGEN, où se trouvent environ 500 collaborateurs, une salle qu’on appelle sport santé. Ce sont là deux termes qui nous paraissent importants.  

Quelle est la surface de cette salle ?

Entre 200 et 250 m², avec un équipement classique de salle de sport. Nous voulions bien entendu que les sportifs aillent dans cette salle, que ce soit celui qui prépare le marathon de Paris, ou celui qui a fait une bonne performance à l’ascension du Mont Ventoux il y a 15 jours. Mais nous, notre concept, c’est d’attirer aussi ceux qui veulent se remettre à une activité physique, ceux qui ont toujours de bonnes résolutions de début ou de fin d’année, qui s’inscrivent à une salle mais qui abandonnent au bout de 2 séances.

Ce serait donc 40 % des salariés qui se seraient inscrits, dont 70 % de non-sportifs ? Comment les avez-vous convaincus ?

Nous avons d’abord eu une concertation avec le CHSCT et avec les partenaires sociaux. Puis nous avons réalisé une enquête interne, à laquelle 300 salariés ont répondu (sur 500 collaborateurs). Mon stade, ce n’est pas la salle de fitness classique où les gens peuvent venir en libre-service. Le concept c’est de proposer un test préalable de condition physique qui est adapté à la personne. On ne vient pas dans la salle pour faire sa séance de muscu, mais pour suivre un programme, en plusieurs séquences, en se faisant accompagner par un coach qui donne un programme personnalisé.

Et tout cela est gratuit ?

Oui et accessible dans les locaux. Il n’est pas rare que je croise dans les couloirs des collègues qui vont à la salle de sport avec leurs sacs. Par rapport à d’autres salles, le taux d’abandon est extrêmement faible. Les gens y vont une à deux fois par semaine. Le programme inclut aussi du sport le week-end. Je connais un certain nombre de collaborateurs qui se sont remis au vélo, à la course à pied, et cela parfois même alors qu’ils sont à un ou deux ans de la retraite. C’est une très bonne opportunité pour se remettre à une activité physique.

Le sport est un plaisir sain, mais en quoi est-ce à l’employeur d’encourager ses salariés à faire du sport ? Qu’est-ce que cela vous rapporte, puisque cela ne peut pas être entièrement désintéressé ?

On m’a déjà demandé si j’avais fait une corrélation directe avec le taux d’absentéisme, la productivité… Mais nous ne sommes pas dans cette approche quantitative. Nous voyons le résultat sur l’ambiance interne, la convivialité… Par exemple il y a des gens qui ne se connaissaient pas et qui se croisent à la salle de sport. Il a fallu que nous installions des vestiaires et des douches, et cela a créé une convivialité, une proximité : il peut s’y croiser un cadre supérieur, un syndicaliste, une secrétaire, qui vont faire du sport en même temps et suer en même temps !

Il y a quand même une étude récente qui dit que le salarié gagne entre 6 et 9 % d’efficacité au bureau.

Sans faire de liens quantifiables, cela nous paraît essentiel en termes de message employeur de nous préoccuper du bien-être interne du salarié. Nous avons commencé avec une première expérimentation probante au siège de la MGEN, mais nous avons 9 000 collaborateurs, répartis dans 150 sites, et nous allons déployer cette formule. Nous avons pour objectif d’avoir dès l’année prochaine 3 ou 4 salles de sport dans certains de nos sites où nous avons 300 ou 400 collaborateurs. Et c’est vrai que nos salariés apprécient de pouvoir dire qu’ils descendent au 1ᵉʳ étage, ils n’ont pas à sortir, c’est tout simplement pratique.

Est-ce que vous pensez que le fait d’avoir cette image de marque d’employeur sportif peut attirer des candidats sportifs à postuler chez vous ?

Je pense que oui, dans la mesure où nous sommes un important recruteur. Nous embauchons en moyenne entre 500 et 600 collaborateurs en CDI par an, et cela dans différents domaines. La MGEN est d’ailleurs deux fois une mutuelle dans le domaine de la santé : en tant que complémentaire santé, mais aussi en tant qu’acteurs de santé, car nous avons 33 établissements sanitaires et sociaux de convalescence.

Recrutez-vous des profils  très différents selon vos activités ?

Tout à fait. Nous pouvons embaucher 150 à 200 commerciaux par an, des managers de centres d’appels, une centaine de médecins par an, des chirurgiens-dentistes, etc. En termes d’images, c’est important de montrer que nous sommes une entreprise en mouvement, qui se préoccupe de la condition physique  et du bien-être global de ses collaborateurs. Cela rentre dans le cadre d’un accord qualité de vie au travail, que nous avons négocié avec nos organisations syndicales, afin de montrer que le bien-être et la condition physique de nos employés est un point clef. Mais nous ne voulons pas attirer que des sportifs.

Est-ce que la MGEN propose une bonne prévoyance santé à ses salariés ?

C’est un point qui est d’actualité, car nous sommes en train de négocier avec nos partenaires sociaux un nouveau contrat de complémentaire santé. Nous essayons d’offrir un dispositif de qualité, il faut être exemplaire, et je pense que nous le sommes, en faisant en sorte qu’il y ait un minimum de reste à charge, dans le domaine dentaire ou encore optique. Cela fait partie de notre politique sociale.

Avez-vous déjà calculé, avec les autres compléments de rémunération que sont la participation, l’épargne salariale –et je ne sais pas si vous en avez une -, combien de mois de salaire cela peut représenter en plus pour un salarié ?

Pour la mutuelle, la participation est un peu compliquée à calculer, cela se fait sur des ratios de fond propre. Nous avons depuis 3 ans un accord d’intéressement, si on y ajoute la participation de la mutuelle de santé on obtient ce qui peut s’approcher d’un mois de salaire supplémentaire. Un 13ᵉ mois en quelque sorte, avec des primes variables par ailleurs en fonction des performances commerciales.

La loi de la généralisation de la complémentaire santé va entrer en vigueur au 1er janvier 2016. Est-ce qu’elle vous a incité à recruter d’avantage de commerciaux pour aller évangéliser les entreprises ?

Nous avons surtout redynamisé nos réseaux commerciaux pour proposer la gamme d’offres de la MGEN. Nous sommes déjà une mutuelle interprofessionnelle, en dehors du ministère de l’Education nationale, de la Jeunesse et des Sports. Nous sommes en train d’absorber la Mutuelle générale environnement et territoires, donc nous serons également leur mutuelle. Nous avons dynamisé nos réseaux commerciaux pour proposer aussi une offre collective, ce qu’on appelle des contrats groupes, ciblant des structures qu’on appelle « affinitaires » du domaine sanitaire et social, ou des TPE dans le domaine de l’économie sociale et solidaire.

Utilisez-vous de nouvelles techniques de recrutement par vidéo ?

Pas du tout. Nous sommes dans une approche éthique du recrutement, c’est-à-dire d’abord un entretien, puis un test PAPI que nous demandons systématiquement aux candidats. C’est à la fois un éclairage pour nous, mais aussi un éclairage pour le candidat, en lui permettant de cerner ses points forts et ses domaines professionnels privilégiés

En quoi êtes-vous un employeur différent ?

En tant que mutuelle, nous n’avons pas d’éléments liés à une recherche de rentabilité à tout crin ou à court terme. Aujourd’hui beaucoup de candidats viennent à la MGEN parce qu’ils y perçoivent du sens : sur des valeurs de solidarité, des valeurs humanistes, et un projet d’entreprise sur le long terme. Aujourd’hui il y a une perte de sens dans les entreprises, avec notamment une recherche de rentabilité à 6 mois que l’on peut voir dans beaucoup de structures. Nous allons travailler sur cette identité de mutualiste. Un professionnel du marketing, un médecin, un kinésithérapeute, peuvent tous travailler dans une entreprise à vocation sociale.

 

Si on reste dans le domaine des mutuelles, qu’est-ce qui vous distingue des autres en tant qu’employeurs ?

C’est le métier de la solidarité, et d’une mutuelle en mouvement. Nous sommes plus dynamiques que les autres, nous proposons par exemple de la complémentaire santé, quand plus de la moitié de nos collaborateurs sont dans des métiers sanitaires et sociaux, ils travaillent dans le domaine de la santé en tant que tel. Nous ne vendons pas des produits d’assurance, mais de la santé !

Votre programme Mon Stade a été présenté le mois dernier, à des DRH. Combien ont signé à ce jour ?

Je pense que des entreprises sont en train de signer, c’est notre objectif.

 

 

 

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

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