"L'apprentissage n'est pas une solution miracle"

Sylvia Di Pasquale

Pour la directrice de la Manu, les mesures gouvernementales pour lutter contre le chômage des jeunes vont dans le bon sens. A condition d'éviter quelques écueils.

Se préoccuper du chômage des jeunes avant que les jeunes ne soient au chômage. C'est la mission de Julie Coudry, à la tête de La Manu qu'elle a cofondée en 2008. L'idée qui guide cette association est simple : faciliter les relations entre les étudiants d'université et les entreprises. Et quatre ans après les manifestations contre le CPE, dont elle fut l'une des têtes d'affiche, la passionaria est dépassionnée, et trouve des qualités au « plan licence » de Valérie Pécresse, ministre de l'Enseignement supérieur.

Attention aux usines à gaz

« C'est le signe que l'on applique enfin la nouvelle mission de l'université : l'insertion professionnelle ». Julie Coudry approuve la volonté de mettre en place des référentiels de compétences pour chaque formation. Tout en prévenant : « Attention à ne pas créer des usines à gaz. Ces référentiels doivent rester compréhensibles. L' étudiant doit pouvoir expliquer simplement aux recruteurs quelles sont ses compétences. » Un demi-satisfecit que l'ancienne syndicaliste étudiante décerne également à Xavier Bertrand pour sa volonté de faire signer 200 000 contrats d'apprentissage de plus d'ici 2015. Car la directrice de La Manu met en garde : « Ce n'est pas une solution miracle. C'est parfait pour un jeune qui a mûri son projet professionnel. Mais d'autres ne sont pas prêts à entrer dans une filière déterminante pour toute leur carrière. »

L'alternance délaissée par les entreprises

Pour Julie Coudry, ces erreurs de casting sont peut être la cause de la désaffection des entreprises pour la formation par alternance, comme le révèle un récent sondage Ipsos selon lequel 7 patrons sur 10 envisagent de réduire le recours à l'apprentissage. « Les débouchés sont réels, mais si l'on y va juste pour profiter de l'aubaine, on risque de passer à côté de soi-même ». De ses envies comme de ses compétences. Ce qui pourrait expliquer le frein principal évoqué par les chefs d'entreprises : l'impréparation des jeunes à la vie en entreprise.

La rencontre de deux mondes qui s'ignorent

Tenter d'y remédier, c'est ce que La Manu s'emploie à faire pour ses milliers d'étudiants adhérents. En faisant se rencontrer deux mondes qui s'ignorent : l'entreprise et l'université. Vivendi, GDF Suez et le Crédit Agricole jouent déjà le jeu. Pour apporter les preuves de son efficacité, l'association de Julie Coudry a demandé à être auditée par une agence indépendante. Et son avenir dépendra, en partie, de l'avis de cet évaluateur et de celui du ministère subventionneur.

Sylvia Di Pasquale © Cadremploi.fr - 09 janvier 2011

Sylvia Di Pasquale
Sylvia Di Pasquale

Je suis rédactrice en chef de Cadremploi depuis 2006, en charge de la rubrique actualités du site. Je couvre des sujets sur la mutation des métiers, l'évolution des rapports recruteurs/recrutés, les nouvelles pratiques managériales ou les avancées de la parité. A la fois sous forme de textes, d'émissions video, de podcasts ou d'animation de débats IRL.

Vous aimerez aussi :