3 bonnes raisons de regarder le documentaire « Les femmes et le top management - Quand les organisations résistent »

Sylvie Laidet-Ratier

PARITE - C’est un documentaire* qui dévoile des vérités qui dérangent. Face caméra, des femmes et des hommes top managers, interviewés pendant de longues heures par deux chercheuses, dévoilent sans filtre leur vécu des politiques de diversité dans leurs entreprises et ce qu'ils en pensent. Pour libérer la parole, les vrais interviewés ont été remplacés à l’écran par des acteurs qui reprennent in extenso leurs propos. Car, oui, le sujet reste délicat à aborder pour les personnes qui sont en poste.... Pour nous, il y a au moins trois bonnes raisons de visionner ce passionnant documentaire, qui sera bientôt distribué. Et si vous proposiez à votre DRH d'organiser une séance publique ?

Un acteur joue le rôle d'un vrai manager, soit-disant pro-diversité mais en réalité sexiste. Extrait du documentaire « Les femmes et le top management - Quand les organisations résistent », réalisé par deux chercheuses expertes de ces questions, Vanessa DI PAOLA (AMU, Lest) et Dominique EPIPHANE (Céreq). Il a été réalisé dans le cadre du projet de recherche WOMAN, financé par l’Agence National pour la Recherche (ANR).

3 bonnes raisons de regarder le documentaire « Les femmes et le top management - Quand les organisations résistent »
Un acteur joue le rôle d'un vrai manager, soit-disant pro-diversité mais en réalité sexiste. Extrait du documentaire « Les femmes et le top management - Quand les organisations résistent », réalisé par deux chercheuses expertes de ces questions, Vanessa DI PAOLA (AMU, Lest) et Dominique EPIPHANE (Céreq). Il a été réalisé dans le cadre du projet de recherche WOMAN, financé par l’Agence National pour la Recherche (ANR).

Parce que les femmes top managers osent raconter leur quotidien

On a beau dire mais c’est assez rare d’entendre publiquement (à part dans des dîners entre copains) que oui, accéder au top management et surtout y rester, c’est plus compliqué pour une femme que pour un homme. Les raisons ? On les connait et elles ne changent pas vraiment : charge mentale domestique, maternité et gestion des enfants, défense de leur pré carré par les hommes… bref, le fameux plafond de verre.

Dans ce documentaire, elles racontent par l’exemple, comment elles vivent leurs soirées à jongler entre leur boulot et leur vie de mère de famille. Elles illustrent leur charge mentale. Elles parlent de leur journée à rallonge, de la façon dont elles doivent jouer des coudes pour se faire une petite place au soleil, de comment elles se font rétamer (et humilier) en public par les hommes apeurés à l’idée qu’on leur pique leurs attributs du pouvoir, de pourquoi on ne leur passe rien au prétexte que ce sont des femmes, etc.

L’une d’elles explique clairement comment elle a dû agiter le cocotier pour que son boss prenne au sérieux sa demande d’expatriation. Une mobilité indispensable pour accélérer sa carrière… mais souvent réservée aux hommes. Et c’est en général madame qui suit et sacrifie sa carrière. En face, son interlocuteur faisait semblant de ne pas comprendre sa demande, somme toute légitime. On aime également quand Ingrid, directrice marketing, raconte comment elle est exclue des réseaux et donc des bonnes infos. Pourquoi ne reçoit-elle pas, comme son mari, les SMS de leur connaissance commune annonçant en avant-première les postes vacants à venir, les projets sur lesquels il va falloir être pour cranter sa carrière… alors que son mari, lui, en est informé en live par son réseau. L’explication est simple : Ingrid n’a pas le temps de réseauter et surtout les hommes protègent sérieusement les secrets de leur réseau. Bref, tous ces exemples ancrés dans le réel sont édifiants.

Parce que des managers hommes donnent leur avis (sans filtre) sur les politiques de diversité

Et leur analyse de la situation n’est pas piquée des hannetons. Ils sont « fatigués de la diversité ». Pour faire simple, ces managers expliquent qu’on en fait trop en matière d’égalité femmes-hommes. Qu’ils sont finalement victimes d’un système.

 

La discrimination positive va trop loin. C’est trop organisé. Les choses devraient se faire plus naturellement. C’est choquant d’imposer l’équité. Mais je suis pour l’égalité. Là, c’est l’homme qui a un handicap par rapport aux femmes. Ca va trop loin, c’est de la discrimination 
Extrait du documentaire

Un autre reconnait que, par confort (et sans doute par conformisme), quand il a le choix, il recrute des hommes. Et d’ajouter « je ne veux pas rentrer là-dedans ». Comprenez dans les politiques de diversité.

 

Parce qu’on découvre comment les politiques de diversité sont dévoyées

Face caméra, des femmes relatent comment, sous couvert de leur donner accès à des postes de top managers, on les forme et les modèle aux codes masculins, toujours prégnants en entreprise. Certes, elles consentent à jouer le jeu. Mais en fait, elles n’ont d’autres choix que d’assimiler ces codes très masculins même si elles le déplorent.

On écoute aussi avec effroi comment un manager détourne les enveloppes d’augmentation dédiées au rattrapage des salaires en faveur de femmes. Tout bonnement, il explique que, vu que les femmes ont une enveloppe genrée, il octroie uniquement son enveloppe d’augmentation générale classique… à des hommes.

 

*Co-réalisé par le Céreq, Aix-Marseille Université (AMU) et le Laboratoire d'Economie et de Sociologie du Travail (LEST) - CNRS - Centre national de la recherche scientifique

Sylvie Laidet-Ratier
Sylvie Laidet-Ratier

Journaliste indépendante, je réalise des enquêtes, des portraits, des reportages, des podcasts... sur la vie des salariés en entreprise. Égalité femmes-hommes, diversité, management, inclusion, innovation font partie de mes sujets de prédilection.

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